Nothing's gonna save us now - Yuna

Un sursaut fait bouger mon corps entier quand j’entends un tambourinement continuel contre ma porte, puis des cris. Je reconnais immédiatement Nina et je cours presque jusqu’à la porte que je dois d’abord déverrouiller avant d’ouvrir. Putain, Nina… Rien d’autre ne peut sortir de ma bouche parce que je ne sais pas, je ne sais pas comment réagir face à ça, même si ce n’est foutrement pas la première fois. Je me baisse et l’entoure de mes bras pour la ramasser et la faire entrer. Son visage est déformé par la tristesse et instantanément la toquante devant mes poumons s’échauffe à s'accélérer. J’ai le souffle court et mon esprit est complètement embrumé d’incompréhension. Y’a quelques jours on était tous à la crémaillère du couple qui semblait heureux mais je me rends soudain compte que ça n’a toujours été que des “semblants” avec eux, réalisant que ce beau bordel n’est qu’une boucle continue qu’ils ne cessent de reformer. Je fais marcher Nina jusqu’au canapé sur lequel elle se recroqueville et prends un paquet de mouchoir que je dépose à côté d’elle. J’ai presque peur de la toucher, comme si elle était fendue et que le moindre contact pourrait la briser encore plus. Nina… Qu’est-ce qu’il s’est passé ? J’imagine toujours le pire avec Slavo. Je connais leurs antécédents, je sais ce qu’il lui a fait subir et j’espérais secrètement que ça ne se reproduise plus, pour éviter justement ce genre de situation avec Nina… Les larmes roulent à une vitesse incroyable sur ses joues et elle suffoque, inlassablement… Je me décide à l’entourer de mes bras et pose une main rassurante sur son crâne. Aller… C’est bon, t’inquiète, je suis là maintenant… Calme toi… Je ne sais pas si je suis efficace mais en tout cas, c’est tout ce que j’espère.

Ma gorge se serre en même temps que mon ventre et ça me heurte violemment. Ce n’est pas en mal, c’est de la surprise, une surprise si grande que je ne sais pas quoi dire. Je la serre contre moi comme je peux et serre ma main sur son crâne. C’est ça qui te met dans cet état…? J’y crois pas forcément, je sais que Nina a toujours voulu avoir un bébé et la dernière fois qu’elle était enceinte, ça s’est très mal fini à cause de son mari. Alors, ma première pensée se dirige vers le slave. Ca pose problème à Slavenko ? C’est ça ? J’essaie de deviner parce que Nina n’est pas très explicite et je pense qu’elle est juste incapable de l’être, présentement. Je serai tellement prêt à tout pour Nina que ce bébé, je l’éléverai avec elle s’il fallait, si Slavenko avait encore souhaité un avortement. Je suis là Nina... Tu sais que je serais toujours là pour toi, hein ? J’éloigne son visage en mettant mes deux paumes contre ses joues inondées. Tu le sais ça, d’accord ? Alors, arrête de pleurer… J’attrape un mouchoir pour lui essuyer moi-même les joues. C’est génial que tu sois enceinte Nina… Slavo peut pas tout gâcher encore une fois, ok ? Je serai là, moi. Je déglutis difficilement, croyant comprendre ce qu’il se passe sans vraiment réellement être très clairvoyant.

Je l’écoute avec toute l’attention que mon esprit peut contenir et je suis réellement sincère quand je lui dis que je suis prêt à être là pour elle et le bébé. Ce serait fou mais j’en serais vraiment fier. D’accord… J’ai compris. C’est une énième dispute entre eux qui fait encore tout éclater et qui remet tout en question dans l’esprit de Nina. Seulement, je me demande quand est-ce que tout ça sera fini, quand est-ce que Nina pourra être enfin tranquille avec son mari. J’inspire profondément en réfléchissant, glissant une main contre ma barbe, machinalement. Tu éléveras pas le bébé toute seule, t’inquiète pas… Qu’est-ce qui s’est passé pour que vous vous disputiez ? Qu’est-ce qui s’est passé à la base ? J’imagine que si le bébé était voulu, Slavenko reviendra mais si c’est pour qu’ils se disputent toutes les semaines, je n’ai pas vraiment de solution pour eux...

Elle ne suffoque plus et c’est déjà presque une victoire pour moi. Je la regarde attraper les mouchoirs, s’essuyer et tout ça en silence. Je l’observe, essaie de comprendre tout en ayant un regard neutre parce que si je m’écoutais, je remettrais entièrement la faute à Slavo et irait lui casser la gueule -encore-. Je calme mes ardeurs quand elle m’explique concrètement ce qu’il se passe et en fait… Je ne comprends pas parce que je n’ai jamais vécu la situation et même en essayant de me mettre à leur place, j’comprends pas comment on peut faire passer le boulot avant sa femme enceinte. Bref, tout ça est nouveau pour moi et j’dois bien avouer que je ne pense pas être d’une grande aide. Ok, j’crois que c’est plus clair, là. Je me relève pour aller chercher de l’eau fraîche au réfrigérateur, pas loin et tout en me dépêchant pour éviter qu’elle ne croie que je ne l’abandonne. Je lui tends la bouteille. T’es en train de me dire qu’il te laisse seule, souvent, c’est ça ? J’ai les sourcils froncés, non seulement parce que je suis en colère mais aussi parce que j’essaie de réunir toutes les informations que j’ai dans mon cerveau pour en faire quelque chose de logique. T’es loin d’être folle. T’es une femme enceinte qui a besoin de son mari, c’est tout ce que je vois. Putain mais il est trop con ! Je comprends pas ce mec, sérieusement ! Il a une femme parfaite, enceinte en plus, une maison énorme et géniale, et il ne sait pas en profiter comme il faut, c’est dingue, j’comprendrais jamais. P’t’être… J’sais pas, qu’il a peur de pas réussir à gérer la situation ? Quand on connaît pas quelque chose, nous, les mecs, on est loin d’essayer d’affronter le truc, tu vois ce que je veux dire ? ‘Fin, on est plutôt du genre à s’éloigner… J’crois et c’est pas vraiment en essayant de faire de la psychologie avec Nina qu’on arrangera la situation. J’irai lui parler si tu veux…. Tu veux ? De mec à mec, il comprendra p't'être mieux.

Je soupire longuement en regardant Nina et j’espère très lointainement au fond de moi que je puisse l’aider rien qu’à travers mes mots. Ouais mais même si vous travaillez, c’est pas censé fonctionner comme ça… C’est pas censé vous rendre la vie plus compliquée qu’elle n’est déjà. On devrait même pas se soucier du boulot quand on est censé vivre sa vie à fond comme Nina qui est enceinte, finalement. Je hoche la tête de bas en haut. J’comprends, il pense que tout ça… Tout ce qui est matériel au final, compensera le fait qu’il soit pas là ou sache pas comment s’y prendre… J’accepte le fait que Nina ne veuille pas que j’aille lui parler et acquiesce. Ok, comme tu veux. Je ne répète pas que je serais là si besoin parce que j’ai bel et bien l’impression de me répéter. J’pense qu’il faut juste que vous éclaircissiez les choses, ce que toi tu veux versus ce que lui il veut et puis à chacun de faire des concessions. Parfois en parlant, j’ai l’impression d’avoir été en couple pendant des années alors qu’il n’en est rien, j’ai, du coup, peut-être pas l’air très convainquant. En tout cas.... Félicitations. J’ai pas pensé à te le dire avant, désolé. J’ai un léger sourire en coin, réellement très heureux pour Nina.

J’irais n’importe où pour Nina. Je ferais n’importe quoi pour elle aussi, même si la chose que je devrais faire était la chose la plus absurde du monde. J’ai un respect hors-norme pour cette femme, une affection sans pareille et avec le temps j’ai appris aussi à me contrôler grâce à elle et à ce qu’elle m’apporte. J’ai l’impression de devoir être clean pour pouvoir supporter ce qu’elle ne peut pas supporter et ce, à n’importe quel moment. Il faut bien admettre aussi que je ne suis pas indifférent à elle et qu’au final, mon amour est tellement grand que la voir avec quelqu’un d’autre mais heureuse, me convient, même si parfois c’est douloureux. Je resserre notre étreinte quand elle vient vers moi pour m’enlacer. Un silence nous embrase et je prends une inspiration avant de passer ma main dans ses cheveux ébouriffés. T’inquiète pas Nina… Il grandira pas dans les cris et les pleurs. Je sais que vous arriverez à trouver un équilibre. Ma main se met à caresser délicatement l’arrière de son crâne et le silence reprend, comme pour permettre aux battements du coeur de Nina de se calquer sur les miens et l’apaiser. Les minutes s’étirent et on reste un moment comme ça, enlacés et l’un contre l’autre. Je crois qu’elle va mieux et seulement quand j’en ai la certitude, je m’éloigne légèrement. Ca va mieux ? Que je demande, la voix un peu plus basse qu’à l’accoutumée.

Y’a rien qui déconne chez toi Nina… Si t’as trouvé qu’il manquait quelque chose à votre couple, c’est que tu l’as pas rêvé. C’est à lui de changer quelque chose. Je sais que Nina est trop gentille avec ce type, ça, depuis le début. Elle aurait dû l’envoyer balader dès le départ, dès qu’il a commencé à lui faire du mal. Je sais que cette relation est nocive pour elle et même si j’ai souvent voulu y changer quelque chose, je sais que je n’y parviendrai jamais. Je crois même que Nina est tellement soumise qu’elle remettrait la faute sur elle même s’il y avait des preuves que le problème vient de lui.

Je la laisse s’essuyer les joues et je fronce les sourcils à sa remarque. Subir ? Je subis rien du tout Nina. Arrête. Je suis content que tu viennes sonner à ma porte quand ça va pas… J’préfère ça qu’autre chose. Et je sais pertinemment que Nina serait prête à des choses horribles pour le slave. N’arrête jamais de venir chez moi quand ça va pas. Ok ? Je lui prends le menton pour qu’elle redresse le visage vers le mien, pour que nos yeux se fixent mutuellement et qu’elle l’imprègne bien au fond de son crâne. Ma voix se faisant plus rauque et insistante. Je t’interdis de rester dans ton coin ou de faire je ne sais quoi si ça va pas. Je veux pas… Je veux pas qu’il t’arrive quoi que ce soit alors je t’en supplie, ne pense pas à ça. Crois pas que ça me dérange ou que je “subis”, je serais plus rien si t’arrêtais de compter sur moi dans ces moments-là. Je suis infiniment sincère et l’émotion est telle que je reprends la jeune femme contre moi, comme pour lui signifier réellement que je ne la lâcherais jamais; jamais. Mes sourcils restent froncés et je serre les dents parce que ce qu’elle vient de me dire m’a vraiment blessé.

Ca a jamais été simple d’être en couple, pour personne… J’suppose que c’est juste ça… La raison. Je hausse les épaules en faisant cette conclusion. De toute façon, Nina et moi avons jamais été très bons dans ce domaine, enfin son cas est tronqué vu ce qu’est Slavenko. Ca va marcher, t’inquiète. J’essaie de la rassurer comme je peux parce que je ne suis pas dans leur relation, je ne peux pas comprendre la moitié de ce qui se dégage de leur couple.

Je n’ai aucune arrière pensée quand je regarde Nina de cette manière, ni même quand je la prends contre moi parce que j’ai réussi à me convaincre qu’il fallait mieux pour nous deux qu’on ne couche plus ensemble et que ça nous attirerait que des ennuis de toute façon… Tu m’utilises pas, c’est bon. T’inquiète. Je soupire à mon tour tout en réfléchissant à cette peur insensée qui vient de me prendre, celle selon laquelle Nina me laisserait tomber. J’ai besoin de toi aussi Nina. Si tu penses que c’est à sens unique, tu te trompes. Que j’avoue, la voix rauque et un peu plus basse. Je me décale à nouveau tout en restant proche d’elle. Alors en fait, si je réfléchis bien, je vais être “tonton” ? Je garde l’air sérieux jusqu’à ce que… Je sais bien qu’on est pas frère et soeur mais bon, j’suis pas sûr que la famille de Slavo soit aussi cool que moi. Je lui souris un peu, essayant de détendre l’atmosphère et juste...Changer de sujet.

Dis pas n’importe quoi. Tu m’as aidé combien de fois quand ça allait pas ? Tu m’as donné un boulot, tu m’as motivé à arrêter mes conneries, t'as toujours été là quand il fallait. Que je la rassure tout en la fixant du regard. C'est pas parce que ses problèmes prennent plus de proportions compte tenu de sa situation que Nina doit s'imaginer prendre plus de place dans notre relation. C'est juste… Différent. Je sais que t'es là, t'en fais pas…


Je n'ai pas l'habitude d'être aussi démonstratif et aussi affectueux mais on parle quand même d'un bébé et pas n'importe lequel. Celui de Nina; Putain ! J'en reviens toujours pas… Putain je vais lui en apprendre de ces conneries. J'espère que ce sera un mec, pas que je doive m’embrouiller avec des petits morveux qui veulent pécho ta fille. Je fais peut être un peu trop de plan sur la comète mais je sais que parler de ça empêchera forcément Nina de penser à autre chose.

Je ne me rends pas encore bien compte que Nina va être maman et pourtant, sa main en témoigne de l’existence formel de cette être qui est en train de pousser en elle. Outre le fait que je sois un mec et que par conséquent il est évident que je ne sache pas m’y faire avec les gosses; j’ai, en plus, une fâcheuse tendance à vouloir les éviter à tout prix. C’est peut-être aussi un peu pour ça que j’aimerai que ce soit un mec, qu’on ait au moins des choses en commun. Mouais, j’vois. T’as vraiment la pression en fait avec la famille de ton mec… J’crois pas que ce soit très bon pour toi, ni pour le bébé d’ailleurs. Peut-être que j’imagine le pire mais de toute façon, avec le slave, y’a que ça à faire ! Tu lui donneras un prénom serbe ou américain ? Non attends ! S’te plaît, trouve un truc original parce que “Slavenko”... ’Fin voilà quoi. Je suis pas du tout contre un prénom étranger, au contraire, ça peut-être être génial mais je veux surtout pas qu’elle me sorte un truc qui se rapproche du prénom de son mari. Les yeux de Nina se relèvent vers moi et en levant les mains j’ajoute: Ben quoi ? Tu peux pas t’appeler Nina et donner à ton enfant un prénom pourri. Je finis par lui sourire, montrant bien que je plaisante et que tout ce sketch n’est fait que pour lui changer les idées et/ou la faire sourire.

Mes sourcils sont froncés dans le souci de comprendre rien qu’une seconde ce que Nina vit aux côtés de Slavo et sa famille. Je sais qu’elle n’a pas une très bonne relation avec eux et connaissant les états d’âme de la brune, ça ne peut que l’affecter négativement. Ouais, c’est sûr que tu peux pas faire autrement mais Nina, c’est ton bébé avant le leur même avant Slavo. Donc t’as pas à faire de concession parce que c’est la famille Drazavic, te laisse pas faire. Même en essayant de m’imaginer à sa place, c’est vraiment très difficile et je ne suis pas sûr d’y arriver le moins du monde, n’ayant jamais eu à faire avec une quelconque belle-famille.

Oui, pour être original, c’est original. Pas sûr que ce soit dans le bon sens du terme ! ‘Fin, si t’aimes bien… Quelques secondes passent et je remarque le regard insistant de Nina sur son ventre, pas du tout rond pour l’instant. Je ressens aussi sa tristesse qui émane du soupir qu’elle lâche, de ce faux sourire aussi. Je finis par m’étaler en allongeant les jambes pour poser mes pieds sur la table basse et garde un bras autour des épaules frêles de mon amie en la rapprochant de mon torse, l’obligeant à s’étreindre contre moi. T’as intérêt si tu veux pas subir mes moqueries jusqu’à la fin de ta vie. Comme si la vie ne nous séparera jamais, comme si du jour au lendemain Nina ne pouvait pas partir et comme si nous étions inséparables. J’ose espérer que la vie que l’on mène sera la même jusqu’à la nuit des temps mais c’est dans cette naïveté que je pêche mon espoir et c’est décemment rassurant pour moi.

Mes sourcils se froncent un petit peu quand j’entends Nina dire que le bébé est le leur et je peux difficilement la contredire là dessus alors je me tais, regarde simplement son visage contrarié dont je crois ne plus pouvoir changer l’air. J’ai un peu de mal à savoir si la famille de Slavenko est réellement si terrible que ce que Nina peut l’imposer à mes pensées mais je ne pense pas qu’elle soit si différente du slave et si les femmes sont aussi dures que les hommes, il est clair que Nina ne doit pas être tranquille. Seulement, en disant oui à Slavenko, elle accepte tout le bagage qui va avec et elle ne pourra rien en faire d’autre. Je te crois. Je te connais assez pour savoir que t’es pas du genre à te laisser faire. Je m’inquiète pour toi, c’est tout, tu sais. Et je crois que ce sentiment s’arrêtera jamais réellement, Nina est une personne vraiment trop précieuse à mes yeux.

Puis il y a ses mots si touchants que je prends en essayant de ne pas montrer que ça m’ébranle réellement, le coeur qui se serre et mes mains qui deviennent moites. C’est pareil pour moi Nina. Puis, si je suis venu ici c’était un peu pour toi aussi, je dois bien te l’avouer... Je ne lui ai pas clairement dit d’emblée parce qu’en plus de ne pas l’avoir prévenue, je ne lui ai même pas dit que j’étais dans la même ville quand je suis arrivé. Je peux vraiment être un enculé parfois mais je suis persuadé que la brune ne m’en tient pas rigueur, ou en tout cas j’espère. Eh, désolé si je suis venu sans rien te dire ni rien… J’sais pas ce qu’il s’est passé dans mon crâne, j’fais des trucs absurdes souvent. Tant que ce n’est pas de reprendre la merde que je prenais avant, j’crois que j’m’en sortirais.