Statut civil (rp) : Veuve et mére d'un garçon de 3 ans
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“S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza Mer 13 Mar - 20:54
“S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” Charles Dickens
Camenko et Eliza
13/03 8h00
Les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur le hall d'entrée du cabinet d'avocat. La standardiste assise derrière son comptoir lève la tête dans ma direction lorsque je sors de l'ascenseur. Elle doit être en communication, car je l'entends demander à son interlocuteur de patienter. En approchant, je remarque l'oreillette Bluetooth qu'elle porte.
Bonjour Maitre Markovic
Je la salue à mon tour tout en prenant la pile de courrier qu'elle me tend. J'ai toujours gardé mon nom de jeune fille même marié pour le cadre professionnel. Je me dirige vers le bureau que s'occupe depuis mon retour à Sarajevo. Mes talons hauts claquent sur le parquet. Mon père est de la vieille école, mais niveau décoration son Cabinet est plutôt moderne et épuré. Je devrais dire notre Cabinet, car je reprends sa relève dans les affaires.
A cette heure, il y a encore peu de monde au Cabinet, mais dans une heure cela ressemblera à une fourmilière. Je trouve Georgina -ma secrétaire attitrée- dans mon bureau lorsque j'y pénètre. Vue la pile de dossier qu'elle tient dans ses bras. Elle est surement venue les déposer pour que je puisse les étudier avant mes rendez-vous. Nous nous saluons puis elle me débarrasse de mon manteau et mon écharpe pour les ranger dans un placard.
Avant de sortir, elle demande si je souhaite un café ou besoin de quelque chose. J'accepte volontiers le Café tout en m'asseyant dans mon fauteuil. J'attrape le premier dossier de la pile pour le potasser avant mon premier rendez-vous professionnel de la journée.
Re: “S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza Ven 31 Mai - 22:22
Les bras croisés, adossé à la paroi de fond de l’ascenseur, Camenko regardait défiler les chiffres des étages sans penser à autre chose. Le regard encore embrumé d’une absence cuisante de sommeil, il ne parvenait à se défaire de cette étrange contemplation qui le reposait miraculeusement. Il n’avait jamais remarqué que l’une des barres de l’affichage numérique ne fonctionnait plus, tronquant considérablement les nombres pour leur donner un petit rien de hiéroglyphes de science-fiction qui hypnotisait. Le trentenaire écarquilla les yeux pour se sortir de sa rêverie en sentant l’élévateur perdre en vitesse. Il se redressa quelque peu lorsque les portes de métal s’ouvrirent pour laisser passer un homme en costume impeccable qu’il salua de sa voix de contrebasse ébréchée qui n’avait pas encore soufflé le moindre mot depuis le début de la journée. Les orbes clairs du brun tombèrent sur le cadran de la montre qui lui ceignait le poignet. Il était encore tôt, sans doute trop pour une visite de courtoisie. Mais il était tombé du lit ce matin ; et plutôt que d’attendre patiemment le moment où il faudrait rejoindre le palais de la présidence pour une énième réunion supposée apporter des solutions aux crises qui leur pendaient au nez, il avait quitté son appartement en avance pour traiter le sujet d’une manière différente.
L’ascenseur ralentit une nouvelle fois sa course, et les panneaux d’acier se séparèrent à l’étage qu’il était venu visiter. Camenko prit une longue inspiration, s’éclaircit la voix, se composa un masque d’homme pleinement réveillé et alerte avant de poser le pied dans le hall du cabinet des Markovic. La réceptionniste, derrière son comptoir, leva le nez de son écran d’ordinateur et articula un bonjour muet accompagné d’un sourire stérile. Du coin de l’œil, il la vit fureter dans son agenda pour vérifier si l’un des Drazavic était attendu, sans succès. Quand bien même elle ne trouva pas son nom inscrit dans la colonne du jour, elle ne s’opposa pas à ce qu’il prenne la direction du bureau d’Eliza. Camenko faisait partie des quelques personnes qu’on ne filtrait pas dans cette fichue ville, les autres portant pour la plupart le même patronyme que lui.
Au bout du couloir, il aperçut Georgina accélérer le pas pour venir à sa rencontre, une tasse de café fumant dans les mains. Ses escarpins martelèrent le parquet avec la régularité d’un métronome pressé, si bien qu’elle arriva à la hauteur du visiteur à une vitesse étonnante. Le visage de la secrétaire d’Eliza s’illumina de cette expression de franche amabilité que seules les standardistes qui n’étaient pas encore usées par leur métier affichaient.
« Elle est … ? - Oui, oui, elle vient d’arriver. - Et le premier rendez-vous ? - Dans une heure seulement. - Parfait ! »
Camenko considéra le moka avec envie, ses yeux bleus passant successivement de l’allongé au regard de Georgina qui n’eut pas besoin de plus de temps pour comprendre le message. Elle tendit la tasse de café à son interlocuteur en se piquant d’une moue faussement agacée.
« Je vais finir par me faire à ces petites attentions, lâcha-t-il dans un sourire charmeur. »
La jeune femme hocha la tête et s’écarta, indiquant d’une main la voie libre :
« Je vous en prie ! Je vais en faire un autre pour Maître Markovic. - Vous êtes merveilleuse. »
La secrétaire leva les yeux au ciel pour balancer un peu le rouge qui lui montait aux joues. Elle attendit que le brun s’éloigne pour reprendre le cours du concerto de ses talons aiguilles sur le parquet. Camenko les entendit s’éloigner en direction de la machine à café alors qu’il avançait vers le bureau de son amie, serrant entre ses doigts le liquide noir salvateur qui lui permettrait probablement d’entrer pour de bon dans le monde des vivants. Il en avala une lampée en s’immobilisant devant la porte de l’avocate. Le trentenaire passa une main dans ses cheveux pour y remettre un peu d’ordre et frappa le panneau de bois pour s’annoncer. Il passa le nez par la porte entrouverte, la poussa très légèrement et se faufila dans le royaume d’Eliza. La jeune femme, de quelques années sa cadette, était plongée dans la lecture d’un dossier lorsqu’il entra. Elle avait toujours l’air sérieuse et grave derrière ses lunettes noires qui lui allaient si bien.
« Toujours aussi matinale … »
Il avait instinctivement prononcé ces quelques mots en anglais, comme de vieux relents londoniens qui apportaient avec eux le temps de merde, la mauvaise cuisine et des litres de thé noyés dans du lait.
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Re: “S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza Lun 10 Juin - 17:51
Lorsque le coup retentit et la porte s'entrouvre, je ne prends pas la peine de lever la tête dans cette direction, pensant qu'il s'agit de Georgina qui m'amène mon café. La voix masculine familière arrête la course mon stylo sur mon carnet de note. Un sourire étire mes lèvres avant de dire dans un anglais parfait. Tu te souviens que mon père nous répétait “Il faut toujours avoir plusieurs coups d'avance sur ses adversaires”.
Le deuxième frère Drazavic avait débarqué dans ma vie lorsque l'on avait envoyé faire ses études universitaires à Londres. Il parlait un anglais à hacher au couteau. J'avais étonné de découvrir qu'il était demi-frère avec Slavenko. Mon père m'avait demandé de l'aider à s'intégrer dans sa nouvelle vie étudiante Londonienne.
Je finis d'écrire quelques notes avant de lever la tête vers Camenko et croiser son regard. Je remarque ses traits fatigués et qu'il boit tranquillement une tasse qui ressemble étrangement à celle qui m'est attribué au cabinet. Tu m'as piqué mon café ?
Je l'observe plus attentivement derrière mes lunettes et j'ajoute sur un ton amusé. Nuit de folie ou une de tes opérations de 007 serbe ?
J'ai plus ou moins connaissance des activités - sans trop de détail- de Camenko dans l'organisation. Et depuis que j'ai repris plus en détails les affaires du cabinet. Je sais qu'il nous fournit parfois des informations pour nous aider à défendre les intérêts de nos clients.
Re: “S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza Mer 19 Juin - 13:35
Un rien de Londres lui manquait par moments. Il n’était qu’un gamin quand il y avait emménagé, un gosse aux idées et aux paroles embrumées par une idéologie familiale torve, qui n’avait jamais connu que les Balkans et leurs conflits, et s’était retrouvé dans un monde si différent du sien qu’il avait manqué ne pas se remettre du dépaysement. Il s’était fait rapidement, le choc passé, à la richesse culturelle de l’Angleterre, au coût bien trop onéreux de la vie, aux bières de bonne qualité, à la politesse hypocrite des habitants, à la simplicité des pubs, et à la moquette qu’on posait volontiers partout, y compris dans les pièces qui s’en seraient volontiers passées. Mais plus que tout, Camenko s’était habitué à respirer un air qui n’était pas vicié, une atmosphère loin de celle qui pesait alors sur les villes yougoslaves et les étouffait aujourd’hui encore. L’herbe était toujours plus verte ailleurs ; toujours plus verte, en tous cas, qu’en Serbie et en Bosnie où la guerre, la violence et la démence politique rendaient la terre stérile. Il ne regrettait pas pour autant d’être revenu ; le trentenaire avait plus sa place à Sarajevo que n’importe où ailleurs. Mais il lui arrivait parfois encore de considérer avec nostalgie ses années d’études, cette tranche de vie où les choses étaient bien plus simples. Sans grande surprise, ce sentiment se trouvait exacerbé en présence d’Eliza. Camenko l’avait rencontrée peu après avoir posé ses valises dans un studio sobre de la capitale britannique, sur ordre de son oncle et de son géniteur qui, malgré les barreaux derrière lesquels il pourrissait à l’époque, contrôlait encore la vie des membres de sa famille d’une main de fer. Aucune cage, aucune laisse n’aurait pu empêcher le poison qu’était Jelenko de courir dans les veines de ses enfants ; on aurait sans doute dû lui passer une muselière, un bâillon, ou simplement lui couper la langue pour que le venin de ses paroles reste à jamais coincé dans sa gorge.
Le cadet des Drazavic était connu pour être observateur. Il cernait sans trop de difficulté les personnes qu’il rencontrait, et son instinct, pour le moins viscéral, ne se trompait que rarement. Il n’avait pourtant jamais été aussi en tort qu’avec Eliza. La jeune femme, alors âgée de seize ans, lui avait paru inintéressante tant elle semblait superficielle. Elle évoluait avec une facilité déconcertante dans le cercle doré de la jeunesse privilégiée londonienne, celle qui perdait jour après jour sa dignité en faux-semblants et dilapidait la fortune parentale avec une rapidité indécente en alcools hors-de-prix qu’ils n’appréciaient pas et en drogues dures. Camenko en avait rencontré beaucoup trop, des gamins qui jouaient aux grands, qui ne devaient leur place dans une université prestigieuse qu’à la grâce de dieu leur père dont les dons plus que généreux leur assuraient une scolarité facile couronnée d’un diplôme, quand bien même ils n’avaient pas travaillé. Ces mêmes gosses, adulés par leur géniteur, finissaient toujours par reprendre les rênes de l’entreprise familiale qu’ils ruinaient en une décennie quand leurs prédécesseurs n’avaient pas eu assez d’une vie pour la bâtir dignement. Eliza, dans ce monde-là, avait fini par jurer. A force de la fréquenter, il avait réussi à percer le masque qu’elle s’était constituée et avait rencontré un esprit intelligent, désireux d’apprendre, de bien faire, mais surtout d’être.
« Tu te souviens que mon père nous répétait “Il faut toujours avoir plusieurs coups d'avance sur ses adversaires”. »
Camenko acquiesça, entendu. Il avait appliqué ce conseil avec une certaine ferveur par le passé et continuait toujours et encore à le faire. Markovic était un homme intelligent, un avocat aussi brillant que redoutable, ce qui impliquait automatiquement qu’il était l’une des ressources les plus importantes du Klan. Mais il se faisait vieux, il se gâtait lentement, comme Jelenko et Mirko. Il avait dû laisser un peu de sa place, un peu de son pouvoir et de l’autorité dont il jouissait entre les mains de sa fille unique.
La brune releva finalement le nez de son ouvrage, et ses prunelles sombres se posèrent sur le visage de son invité avant de tomber sur la tasse qu’il avait entre les mains. Elle avait toujours eu un œil incisif qui lui donnait la sensation qu’elle tentait de le percer à jour. Camenko détestait ce regard, Dieu savait pourtant qu’il l’avait lui-même en permanence.
« Tu m’as piqué mon café ? - Je ne peux ni confirmer ni infirmer cette allégation, répondit-il en haussant les épaules, un sourire vaporeux illuminant ses traits. Mais si ça peut te rassurer, Georgina arrive avec le prochain ! »
Il s’approcha du bureau, tira légèrement en arrière l’un des fauteuils opposés à celui de l’avocate alors qu’elle l’interrogeait sur ses activités nocturnes. Il n’attendit pas une quelconque invitation de la part de son amie pour prendre ses aises, et se défit donc de sa veste qu’il accrocha soigneusement au dossier de la chaise avant de prendre place.
« Nuit de folie ou une des tes opérations de 007 serbe ? - Un peu des deux ! Mais je ne peux malheureusement t’en dire plus sans avoir à te tuer derrière. »
Et il se fendit d’un sourire amusé qu’il noya dans une gorgée de café brûlant. Camenko était habitué à être considéré comme un agent secret ou un espion aux allures bondesques, son activité prêtant régulièrement à confusion. Les costumes griffés, le goût prononcé pour les voitures de collection, les garde-temps précieux, les spiritueux travaillés avec soin, l’amour des belles femmes, … tous ces petits plaisirs qu’il appréciait tant le rattachaient davantage encore, dans l’esprit des gens, à une image d’agent de renseignement véhiculée par Hollywood et EON Productions. Mais sa réalité était loin de celle d’un Sean Connery ou d’un Daniel Craig. Il n’agissait plus directement sur le terrain et n’était que rarement envoyé en mission comme il pouvait l’être auparavant, quand il avait commencé à travailler pour l’OSA. En presque quinze ans de bons et plus ou moins loyaux services, le Serbe avait réussi à se faire une place dans les étages proches du sommet de la pyramide hiérarchique de l’Agence. Le temps des basses œuvres était loin. Aujourd’hui, son travail avait des airs de montagne de paperasse plus qu’il n’était synonyme d’hôtels de luxe, de champagnes millésimés et d’interventions pour défaire les plans machiavéliques d’un personnage imbu de lui-même et ivre de pouvoir souhaitant gouverner le monde – ce qui, par ailleurs, n’existait tout bonnement pas dans le quotidien d’un homme du renseignement.
« Luka risque de m’en vouloir s’il apprend que je l’ai rendu orphelin … Sa vengeance serait terrible, je le sais. Il est comme toi : il est plus dangereux qu’il n'en a l’air, mieux vaut ne pas le sous-estimer. Il ponctua sa phrase d’une nouvelle lampée de caféine. Comment va-t-il, d’ailleurs, ton mini-monstre ? »
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Re: “S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza Ven 12 Juil - 20:27
Je ne doute aucunement que Georgina va débarquer dans le bureau d'un instant ou l'autre avec une autre tasse de café qui m'est destiné. Je me demande juste, comment a-t-il négocié pour qu'elle lui donne. A-t-il joué les séducteurs ou ne lui a-t-il pas laissé le choix tout en la déstabilisant comme il sait si bien le faire. Je souris quand il me menace de devoir me tuer s'il me révèle ses activités nocturnes. Je n'avais pas l'intention d'en savoir plus de toute façon. Vaut mieux que j'ignore certaine chose tant que je n'ai pas à les défendre au tribunal. Quand à sa menace, je ne crains nullement qu'il ne fasse du mal. J'ai déjà observé les ténèbres et la rage qu'il abrite, mais elles n'ont jamais été dirigé vers moi. Il avait bien essayé de m'intimider au début de notre rencontre. Une façon de me tenir à distance de lui. Mais je suis la fille de mon père. L'homme capable de retourner en sa faveur et celle de son client un jury hostile.
Oui une vengeance terrible … surtout s'il tient de son grand-père.
Mon père m'avait éduqué comme un joueur d'échec. Dans chaque chose que j'entreprenais, je devais avoir plusieurs coups d'avances. Quitte a montrer ses faiblesses dans le but de détourner l'intention sur mon prochain coup. J'avais surpris mon père de tenter de faire la même chose avec mon fils.
Mon petit monstre est en pleine forme. Mon père lui passe tous ses caprices. Le dernier en date un “poney”. Il n'a que quatre ans et il a déjà un poney.
Je prends un air légèrement outré et exagéré tout en m'adossant à mon fauteuil de bureau.
J'ai dû attendre mes huit ans pour en avoir un et il avait fallu que je lise entièrement Hamlet. Crois-moi, du Shakespeare a huit ans ce n'est pas facile.
Je ne peux m'empêcher de rire à mes divagations. J'ai bien conscience que j'ai eu la chance d'avoir eu une enfance dorée comparée à celle de Camenko. Il ne sait jamais gêner lors de nos premières rencontres de me le rappeler.
Georgina choisit ce moment pour toquer à la porte et entrer. Elle me tend la tasse de café et en échange je lui donne une pile de dossier. Je lui donne aussi mes directives concernant ses dossiers et les personnes à contacter dans la journée. Elle fait semblant de n'accorder aucune attention à la présence de Camenko. Peut-être, une petite vengeance à son attitude cavalière de tout à l'heure. Ce qui m'amuse un peu.
J'attends qu'elle referme la porte pour dire.
Elle t'aime bien tu sais.
Je bois une gorgée de café avant de poser ma question. Celle qui me trotte en tête depuis son arrivée.
Alors, Camenko , que me vaut ta visite ce matin ?
Je pose sur lui le même regard inquisiteur que lorsque je pose la même question à n'importe lequel de mes clients.
Re: “S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza Sam 3 Aoû - 0:01
Luka n’était encore qu’un petit diable quand on avait enterré son père, trop jeune pour réaliser l’importance d’une figure paternelle dans sa vie, mais déjà trop vieux pour ne pas remarquer son absence criante et le vide laissé dans le cœur de son dernier parent. Il n’y avait pas deux ans que Matt perdait la vie dans un accident de voiture. Les rapports des secours et des forces de l’ordre avaient conclu un banal incident causé par un tiers qui n’avait jamais eu le cran de se dénoncer. Ce devait être bien difficile, lorsqu’on avait une âme intacte, de vivre avec la culpabilité d’avoir envoyé quelqu’un au cimetière. Il fallait se faire aux longues nuits d’insomnie, les yeux rivés sur le plafond, à se repasser en boucle les petits riens qui auraient pu empêcher le drame d’avoir lieu. Le retard de deux minutes sur le planning quotidien à cause d’une chemise mal repassée, les secondes qui s’étaient accélérées en passant un feu rouge pour ne pas perdre davantage de temps, le raccourci qui aurait pu être pris pour gagner un quart d’heure. Et tous les si du monde : si le coursier mal garé n’avait pas ralenti la circulation dans le cœur de la ville, si la jauge d’essence n’avait pas indiqué qu’il valait mieux faire le plein, si cet enfant n’avait pas traversé la route à ce moment-là, si l’asphalte n’avait pas été mouillée par la grisaille du pays, … On mettrait Paris en bouteille avec des si, mais on aurait surtout pu éviter de mettre le mari d’Eliza en bière si ces si ne s’étaient pas posés. Il fallait croire les comptes-rendus de l’enquête qui avait été menée. C’était plus simple de blâmer un individu quelconque que de remettre toute une réalité en cause en se posant les bonnes questions. Camenko n’avait jamais cru à la thèse de l’incident, le père de son amie non plus. C’était la voiture de la brune qui était visée, à son bord l’avocate plus que son époux. Ils en avaient tous conscience, comment justifier sinon la présence constante des armoires à glace qui suivaient Eliza comme deux ombres particulièrement disproportionnées ?
« Oui une vengeance terrible … surtout s’il tient de son grand-père. »
Le trentenaire échappa un soupir entendu. Markovic avait toujours été fin stratège, trop bon calculateur pour qu’on s’essaie à lui causer du tort. Eliza avait été élevée selon ses préceptes, son modèle, et il ne doutait pas une seule seconde que Matt décédé, le patriarche s’était mis en tête de remplacer son gendre dans le rôle de figure paternelle pour ne pas abandonner le petit Luka à son triste sort.
« Mon petit monstre est en pleine forme. Mon père lui passe tous ses caprices. Le dernier en date un “poney”. Il n'a que quatre ans et il a déjà un poney, râla la brune dans une mine faussement contrariée. J'ai dû attendre mes huit ans pour en avoir un et il avait fallu que je lise entièrement Hamlet. Crois-moi, du Shakespeare a huit ans ce n'est pas facile. - Allez Calimero, tu devrais être contente que son deda passe du temps avec lui ! Et qu’il puisse lui offrir certaines des choses que tu lui refuseras. C'est à ça que servent les grands-parents. »
Camenko se fendit d’un léger rire. Il imaginait sans trop de peine une petite Eliza, concentrée, les sourcils froncés, le nez plissé pour essayer d’entendre quoi que ce soit aux thou, doth, thine, et autres réjouissances linguistiques qui parsemaient les grands classiques en anglais moderne naissant.
Quelques battements contre la porte du bureau précédèrent l’entrée de Georgina, venue apporter son café à l’avocate et récupérer les informations dont elle aurait besoin pour entamer correctement la journée. Le Serbe suivit chacun de ses mouvements des yeux, un sourire aux lèvres, notant la ferveur qu’elle mettait à l’ignorer, jusqu’à ce qu’elle se détourne dans un claquement de talons hauts.
« Elle t’aime bien tu sais. » - J’avais cru remarquer ce petit détail ... »
Il noya un rictus moqueur dans une gorge de caféine, songeant un instant à la taille marquée de la secrétaire, au galbe de ses jambes, à ses lèvres toujours parfaitement peintes, étirées dans un sourire lumineux.
« Alors, Camenko , que me vaut ta visite ce matin ? »
Il leva les yeux de sa tasse, un sourcil arqué. Eliza le connaissait suffisamment pour savoir que les visites de courtoisie à huit heures du matin n’existaient pas dans leur monde, et qu’il se déplaçait rarement sans avoir au moins la décence de prévenir de son arrivée par message. Percé à jour, il s’éclaircit la gorge.
« Tu vois qui est Koroman ? L’un des membres de la Chambre des représentants, affilié au Parti d’action démocratique ? C’est un très bon ami du Premier ministre et de quelques hommes influents du gouvernement. Malheureusement pour lui, certains de ses petits secrets vont lui éclater au visage dans très peu de temps. Pour le moment le Cabinet de Zvizdic a réussi à museler les journalistes, mais ce n’est qu’une question d’heures avant que l’affaire devienne publique. Un peu plus tard dans la journée, mes confrères et moi allons nous accorder sur l’avocat à faire intervenir dans la défense de Koroman. Et c’est ton nom qui va sortir. »
Camenko marqua une pause. La réputation des Markovic n’était plus à faire en matière judiciaire. Ils étaient de loin les plus influents de la ville, et certainement les plus compétents, capables de sortir n’importe qui de sa misère en un battement de cils. Ils auraient même été en mesure d’épargner la chaise électrique à Ted Bundy s’ils s’étaient penchés sur son cas.
« J’aimerais, il se reprit, nous - le Klan - aimerions que tu refuses la proposition du Cabinet du Premier ministre. »
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Re: “S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza Mer 14 Aoû - 21:05
Dans l'attente de la réponse de Camenko, j'avale une gorgée du café que m'a apporté ma secrétaire précédemment. Je sens la caféine faire sa magie sur mon esprit. C'est donc toute attentive que j'écoute Cam.
Koroman n'est pas un nom que m'est inconnu. Je sais que l'homme officie à la chambre des représentants pour le Parti d'action démocratique et c'est un des proches alliés du premier ministre. Je l'ai croisé a plusieurs reprises dans une soirée de charité ou soirée d'ambassade quelconque. L'annonce du scandale ne m'étonne guère. Quel domaine touche-t-il ? Professionnel : Détournement de fond public, pot de vin, fraude à l'élection... ou Personnel : infidélité, détournement de mineur, viol .... J'ai côtoyé suffisamment le monde des grands dirigeants pour savoir qu'ils ont tous des squelettes dans le placard. Tout le monde en a, même moi. Mais certains sont juste plus difficiles à planquer. Un sourire en coin fleurit sur mes lèvres quand il m'annonce qu'il fait partie des personnes choisies pour nommer l'avocat qui sortira le politique de la merde.
Alors que Camenko fait une pause, surement pour laisser le temps assimiler la nouvelle. Mon esprit tourne déjà à plein régime sur comment aborder la crise et détourner les médias à notre avantage. J'allais porter ma tasse à mes lèvres, mais stoppe mon geste a mi-course quand il m'annonce qu'il aimerait que je refuse cette affaire. Je ne peux m'empêcher de marque mon étonnement par un haussement de sourcil parfaitement épilé. Je finis par poser la tasse sur mon bureau tout en le dévisageant.
Que veut tu … enfin que Voulez-vous exactement ? Que je refuse à titre personnel –je réfléchis déjà à qui dans le cabinet je pourrais refiler le bébé - ou que le Cabinet refuse ?
J'ai une totale confiance en Camenko, mais il me demande de me détourner d'une affaire en or. Que nous gagnons l'affaire ou la perdons, nous pourrions toujours un tirer un bénéfice quelconque. Camenko , je sais que tu as des raisons pour me demander cela. Et je suis suffisamment intelligente pour ne pas te demander des détails. - tu ne peux mentir sur ce que tu ne sais pas, foi d'avocat - Mais j'ai des associés et un conseil d'administration à qui je dois rendre des comptes.
J'entends déjà les associés et actionnaires du cabinet me tomber dessus à la première occasion. Et je ne parle pas de mon père.
Je reprends sur un ton calme. Alors, pourquoi je refuserais ? Ce refus doit-il être public ou officieux ?
Re: “S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza Mer 2 Oct - 0:58
Le Cabinet proposerait une somme conséquente pour la défense de Koroman, une juste rançon quand on comptait parmi les proches de Zvizdic mais qui ferait tache dans le budget annuel. Outre le fait qu’il faudrait passer les dépenses sous une autre nomenclature que : « Y a-t-il un flic pour sauver l’un des mignons du Premier ministre ? », les intérêts du Parti d’action démocratique allaient surtout à l’encontre des besoins du Klan, du SNSD, et de Dodik. Et ce que le Tigrovi désapprouvait, les Markovic devaient théoriquement condamner également. A quoi servaient, sinon, les liens si forts qui unissaient le père d’Eliza aux patriarches Drazavic ? A quoi rimaient plus de quarante années d’une amitié teintée d’intérêt si ce n’était à être utile en cas de crise ?
L’avocate haussa les sourcils, son geste suspendu alors qu’elle allait redonner à son cerveau le coup de fouet nécessaire à planifier les événements. Le contact de la céramique immaculée sur le bureau tinta délicatement.
« Que veut tu … enfin que voulez-vous exactement ? Que je refuse à titre personnel ou que le Cabinet refuse ? Camenko , je sais que tu as des raisons pour me demander cela. Et je suis suffisamment intelligente pour ne pas te demander des détails. Mais j’ai des associés et un conseil d’administration à qui je dois rendre des comptes. Alors, pourquoi je refuserais ? Ce refus doit-il être public ou officieux ? »
Eliza était la meilleure avocate de la ville si on omettait son père dont les affaires se faisaient de plus en plus rares - quoiqu’on le considérât toujours comme une personnalité éminente du monde juridique. Ses associés, si doués qu’ils étaient pour qu’elle ait daigné s’intéresser à eux et signer un partenariat, ne lui arrivaient pour la plupart pas à la cheville. Il n’en avait pas toujours été ainsi pourtant, en dépit des apparences ; la brune, malgré son nom et la réputation de son géniteur, avait dû affirmer son statut d’une main de fer. Si privilégiée qu’elle fut durant ses jeunes années, l’université lui avait valu de se battre comme n’importe qui d’autre, de prouver ses capacités et sa valeur en dehors du giron de son patronyme. Elle ne devait sa réputation finale qu’à son assiduité et son esprit acéré. Toute autre personne, Markovic ou non, n’aurait jamais tenu face au manque de pitié cruel des Serbes et Bosniaques à l’égard des gamins pourris gâtés nés avec une cuillère d’argent dans la bouche.
« C’est une histoire d’une banalité affligeante : détournement de fonds, financement abusif de soirées privées, relations sexuelles non consenties avec plusieurs mineures qui ont étonnamment toutes décidé de parler au même moment. Laisse l’opportunité passer, prends la partie adverse. »
Les confrères d’Eliza ne pourraient reprendre une affaire que le nom principal du cabinet avait lui-même refusé. Pour le bien de leur association et de leur réputation, il valait mieux éviter de perdre contre ses propres associés.
« Le Cabinet confiera finalement le dossier aux Finnigan. L’accusation est solide, il faudrait un miracle pour que Koroman ne tombe pas, et j’ai du mal à croire que qui que ce soit puisse en faire dans cette ville, si ce n’est toi. Représenter la partie adverse ne sera pas aussi bien payé, mais nous, et il parlait du Tigrovi, apporterons une contribution à ton travail. Koroman perdra le procès, sa place à la Chambre, et il sera remplacé par Horvat, c’est aussi simple que ça. Tu n’auras pas à te justifier publiquement, le Cabinet du Premier ministre ne prendra jamais le risque d’ébruiter que tu as refusé l’affaire. Du reste, tu pourras expliquer à tes associés que le père de l’une des demoiselles est un ami. Tu connais Marijana, l’aînée de Bozovic, non ? C’est l’une des trois filles qui ont fait les frais de la conduite de notre bon représentant. »
Camenko termina sa tirade par une lampée de café. Marijana était à peine âgée de seize ans ; une gamine intelligente, ambitieuse, surtout, qui avait compris qu’elle pouvait aller loin si elle savait mentir, jouer la comédie, se taire quand on lui demandait de le faire, parler quand on le lui ordonnait. Son père, une connaissance plus qu’un ami du trentenaire et de l’avocate, avait bien failli faire un arrêt cardiaque quand sa précieuse petite fille avait relaté, en larmes, les mains de Koroman sur son corps d’adolescente, la pression de son poids sur sa silhouette si fine, si frêle. Elle avait omis de préciser, en revanche, qu’on l’avait incitée à être présente aux soirées organisées par le membre du SDA, à se faire belle, désirable, suffisamment pour attirer son attention.
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Re: “S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza
“S'il n'y avait pas de mauvaises gens, il n'y aurait pas de bons avocats.” - Camliza