Sorn ♮ Head full of lies

Oublier... un mot que tu détestes. Tu aimerais oublier, tout un tas de choses. On ne peut pas dire que tu n’essaies pas d’une façon ou d’une autre mais jusqu’à maintenant, ça n’a jamais été concluant.

Tu as essayé d’oublier la guerre qui t’as arraché une bonne partie de ta famille, les bâtiments détruits et les corps. Tu n’étais qu’un gamin mais les images sont restées gravées. Tes parents ont fini par réussir à vous éloigner de tout ça grâce à leur argent. Il était trop tard. Vous aviez vu. Toi en tout cas.
Tu as essayé d’oublier les espérances de tes parents. Une espérance née d’un simple désir d’enfant de rendre le monde meilleur. Tu voulais être médecin à l’époque et Varn, ton jumeau aussi. L’espérance s’est transformée en un poids lourd à porter. Trop lourd. Tu as déraillé, Varn non. Il était l’exemple, le modèle. Tu étais la déception, son contraire, celui qui entendait sans cesse les comparaisons entre lui et toi. Un rappel permanent du fait que tu ne serais jamais à la hauteur. Plusieurs fois, on t’a fait comprendre que tu devais rester discret, ne pas discréditer leur nom. Tu étais jaloux. Jaloux et blessé.
Tu as essayé d’oublier le meurtre de ton frère par ta propre femme. Ta femme qui jouait sur les deux tableaux et qui n’a pas accepté un non de sa part. Si elle ne pouvait pas l’avoir à ta place, personne ne l’aurait et elle te ferait souffrir au passage. L’image de la mort de ton jumeau, ton miroir, se faire tuer devant tes yeux. L’image de ta femme à l’autre bout du canon de l’arme qu’elle a utilisé et que tu as retourné contre elle avant de l’abattre. Tu n’as pas été condamné par la justice mais ça te hante encore, quatre ans après.

Et pourtant, tu t’obstines à essayer de voir le monde en couleur au milieu de la grisaille, au milieu des cauchemars et de la cendre. Tu affiches ce visage heureux et souriant comme un masque avec lequel tu essaies de te convaincre. La musique te permet parfois d’oublier juste l’espace de quelques minutes, comme l’ivresse et les médicaments ou même tes histoires d’un soir. Tu vis dans un monde illusoire mais ça te convient. Médecin légiste, tu sais que tu vas droit dans le mur et tu t’en moques. Mais tu es là pour les autres, ne manquant pas d’argent malgré toi.
Ton altruisme est parfois absurde. Tu serais capable de donner ta chemise et tes pompes, jusqu’à tes sous-vêtements, tout ça parce que tu te sens coupable d’avoir de l’argent, ton argent mais aussi celui de ton jumeau aussi.

L’oubli… Tu en as tellement besoin...