I call her devil, 'cause she makes me wanna sin - Slavina

Dieu qu'elle est excitante quand elle fait ça ! Qu'elle fait sien mon désir avec un naturel confondant, quand elle prend l'initiative, quand elle m'embrasse, quand elle crochète les portes quand... tout le temps ! D'ailleurs je le lui souffle quand elle s'évertue à crocheter alors que j'ai les mains posées sur ses hanches, mon bassin frottant ses fesses indécemment !


"Ah ah, oui, c'est mon fantasme ça, touché srce. T'imagine si j'étais un homme politique et toi ma secrétaire ? Clinton et sa Monica... " L'idée me plait par delà la plaisanterie que je peux en faire. Je vais m'affaler lourdement dans le fauteuil en cuir, en testant le pivot tout en posant les mains sur les accoudoirs. "Mademoiselle Monica, je crois qu'il y a un truc sous mon bureau qui demande à être traité urgemment. Un gros dossier !" J'ai un rire rentré, le regard brillant. A ma décharge pour mon humour douteux, j'ai beaucoup bu et la drogue coure dans mes veines, me rendant très mutin moi aussi ! Je la regarde s'approcher de sa démarche féline, si sexy qu'elle me rend fou. "t'es trop sexy chérie" Il faut que je le lui dise sinon je vais exploser d'amour, de désir, de tout ce que je ressens pour elle, cet amour totalitaire et exigeant. Je passe la meilleure soirée de ma vie. On est à Sarajevo, Dodik vient d'être élu et ma femme est la créature la plus parfaite, la plus bandante, la plus merveilleuse du monde. Dans mes rêves érotiques les plus fous c'est moins bien que ça vous vous rendez compte ? Non c'est pas un manque d'imagination, c'est que ma réalité dépasse la fiction ! Je me repousse du bureau pour laisser un espace à Nina.

Oh je sais bien ce qu'est son fantasme, je me souviens de tous ses désirs, de toutes ses envies avec une précision affolante. Cent fois je me suis demandée si je n'avais pas failli à les réaliser, à le satisfaire puisqu'il était parti malgré tout. Mais j'essaie de toutes mes forces de ne pas laisser cette pensée prendre trop de place dans mon esprit ce soir. Notre complicité au cours de la soirée m'y aide beaucoup. Je m'approche de lui lentement, démarche de louve à l'appui, d'abord sérieuse mais je ne peux pas m'empêcher d'éclater de rire à sa vanne ridicule. Un gros dossier ? Je répète dans un nouveau rire, avec l'impression d'assister au tournage d'un mauvais porno. Je secoue la tête en tentant de reprendre mes esprits et mon self-control !

​Il nous est impossible de verrouiller la porte sans la clé, alors j'espère vraiment que personne ne fera irruption dans le bureau ! Vu les circonstances, ce serait vraiment un coup de malchance. Je contourne le bureau pour venir m'installer sur ses genoux, je pense que je peux prendre mon temps avant de passer sous le bureau. Je m'assois de côté sur ses jambes, passe un bras autour de son cou pour nicher ma main dans ses cheveux, l'autre venant se glisser sous son tee-shirt pour caresser son ventre tout doucement. Je me penche pour poser mes lèvres sur sa gorge, embrasser la peau tendre sous laquelle je sens les battements de son cœur qui s'accélèrent. Je crève d'envie de le marquer, rien qu'un peu, mais je ne suis pas sûre d'en avoir le droit alors je mordille doucement son cou en retenant mon souffle, attendant qu'il me repousse.

Je fais mine de froncer les sourcils très sérieusement, bien que je ne soit pas crédible vu l'air hilare qui persiste à venir sur mes traits "Un très gros dossier Monica ! " Je ne peux pas m'empêcher de rire moi aussi mais mon rire se meurt dans un soupir quand elle vient s'asseoir sur mes genoux pour se faire chatte câline. Le désir reflue d'un cran face à la bouffée d'amour qui me saisit. Je fonds d'amour à ses tendres caresses et mon regard s'adoucit sur elle. Je la dévisage, les prunelles remplies d'amour, un sourire béat aux lèvres. Qu'est-ce qu'elle est belle ma Nina, je suis ébloui, émerveillé par le fait qu'elle soit près de moi, avec moi. Mon cœur s'emballe dangereusement. Je penche le cou quand elle l'embrasse et le mordille, gronde tout doucement d'approbation. J'ai glissé sans m'en rendre compte à la câlinerie et la tendresse, juste parce qu'elle s'est fait docile, si mignonne que je craque. Je lève la main pour caresser sa nuque du bout de l'index dans un soupir ravi. "Srce, srce, tu es si belle !"

Sous sa main, mon ventre se contracte en pulsations rythmées, le désir est présent, chaud, doux, poids brulant dans mon bas ventre, tension délicieuse. J'attends, je ne suis soudain plus si pressé de l'assouvir, j'ai des envies différentes, plus douces, plus tendres, très charnelles pourtant. Elle et moi, sa peau contre la mienne, nos corps qui s'emmêlent, qui ne font qu'un. Je cache mon nez contre l'épaule de Nina en lui offrant toujours mon cou, ma nuque, très câlin brusquement alors que je proteste avec la faiblesse d'un chaton "Tu me fais perdre la tête zlato."

Je ne sais pas pourquoi son regard change soudain, de prédateur il se fait plus tendre, s'adoucit en se posant sur moi et je fronce les sourcils en me demandant ce que j'ai bien pu faire. J'entortille ses cheveux autour de mes doigts en me serrant un peu plus contre lui, légèrement anxieuse parce que j'ai peur d'avoir loupé quelque chose. Toute envie de le marquer s'envole à ses mains qui se font bien trop douces sur ma peau, et j'embrasse son cou pour me faire pardonner d'avoir voulu le meurtrir. Son compliment, comme tous ses mots d'amour, résonne étrangement en moi. Entre espoir fou et inquiétude parce que je me demande s'il a eu ces mots-là pour une autre en mon absence... Le spectre de cette vie qu'il a menée sans moi me hante, chaque heure de chaque jour et je désespère de parvenir à en faire abstraction un jour.

Je me fais câline aussi, en miroir de ses réactions auxquelles mon corps se plie toujours, sans même me demander mon avis. Je ne sais pas comment il s'est débrouillé mais le fantasme de la secrétaire me paraît si loin à présent ! Je soupire contre lui, l'enlace plus étroitement en fourrageant du nez dans son cou pour me cacher quand je demande à voix très basse : C'est vrai... Que je t'ai manqué ? Il me l'a dit tout à l'heure quand on est arrivés mais il était encore dans l'euphorie de l'instant. A-t-il seulement pensé à moi durant ces deux jours ou bien m'a-t-il rangée dans une petite boîte comme il l'a fait durant quatorze mois ?

Je me renverse dans le fauteuil en cuir qui fait un mouvement de bascule et Nina s'échoue sur mon torse, entre mes bras tenue fermement. Je suis amoureux d'elle, amoureux fou avec cette impression hallucinée, ce sentiment d'irréalité tant c'est merveilleux. Je ronronne quasiment de plaisir sous ses caresses tendres, quand elle tiraille mes cheveux, quand elle frotte son nez dans mon cou, c'est un mélange très primal de soupirs et de grondements approbateurs. Je réponds gravement à sa question, tout bas. "Oui c'est vrai. Et tu m'as manqué." Je sais que ça peut sembler difficile à comprendre mais ce n'est pas parce que je ne lui écris pas, que je ne l'appelle pas qu'elle ne manque pas. Pour moi la contacter revient à remuer le couteau dans la plaie puisque je pourrais quand même pas la rejoindre à ma guise. De la même façon, elle m'a manqué durant quatorze mois mais j'ai appris à vivre avec. Je suis très doué pour survivre. "Je pense à toi tous les jours, très souvent, y a plein de choses qui me font penser à toi quand je les vois, à nous. Je me dis tiens, ça Nina aimerait, ou il faut que je pense à l'emmener ici...ce genre de truc." Ça m'arrivait souvent cette dernière année avant que je me souvienne que non, j'étais parti, Nina n'était pas là. Je fantasmais sur sa présence avant de me morigéner et me dire qu'elle était heureuse maintenant. J'étais fou.

"Tu es mon cœur, mon amour, mon âme, ti si moje srce, moja ljubavi, moja dusa i moj andjeo. I ja volim te. Je n'ai jamais, jamais, jamais cessé de t'aimer, pas une seule seconde." J'ai peur qu'elle pleure alors j'écrase ses lèvres doucement d'un baiser passionné qui ravive le désir. Je cherche la volupté qui nous a toujours plutôt bien réussie.

Sa réponse me surprend parce que j'ai plutôt l'habitude qu'il se contente de me dire que oui, je lui ai manqué, avant de m'embrasser pour me faire taire avant que j'ai le temps de protester. Très honnêtement j'ai du mal à imaginer qu'il puisse penser à moi quand je ne suis pas là... Mais je ne vois pas pourquoi il me mentirait, pourquoi il donnerait ce genre de détails quand il pourrait se contenter de répondre oui. Un mince sourire se dessine sur mes lèvres et je tiraille ses cheveux un peu plus doucement quand j'avoue : Moi aussi, il y a toujours quelque chose qui me fait penser à toi... C'est forcément le cas ici puisque c'est son pays, mais c'était aussi le cas à New-York où il me manquait à tel point que j'en arrivais à être capable de trouver des liens avec des lieux qu'il n'avait jamais vus, des objets qu'il n'avait jamais touchés !

Il vise juste parce que sa déclaration me fait monter les larmes aux yeux, comme chaque fois qu'on fait référence de manière plus ou moins détournée à ces longs mois de séparation. J'aurais tellement de questions à lui poser, des questions ridicules seulement pour me rassurer. Est-ce qu'il n'y a que moi maintenant ? Est-ce que je passerais avant les autres, avant les Tigrovi ? J'ai envie de lui demander s'il regrette d'être parti. Si aujourd'hui, maintenant qu'il sait ce que j'ai vécu, il regrette. Mais j'ai bien trop peur qu'il réponde que non, qu'il me dise que ce n'était que pour mieux nous retrouver ou une connerie du genre. Alors j'étouffe ma question contre sa bouche, en pressant son ventre sous mes doigts, en mettant tout mon désespoir dans ce baiser qui me coupe le souffle. Ma main gauche revient encadrer son visage et je souffle tout bas contre ses lèvres : Moi non plus... Je n'ai jamais cessé de t'aimer.

Je caresse la joue de Nina, tout doucement. L'alcool et weed coulent dans mes veines, la débauche de sexe, la joie, les endorphines, le lieu étranger, calme alors qu'à coté il y a la fête, tout contribue à abattre mes défenses, à libérer les mots que je ne dis jamais parce que je ne sais pas comment les dire. "Je ne veux pas que tu pleures à cause de moi srce... Je n'ai jamais voulu que tu pleures à cause de moi. Je n'en vaux pas la peine." Je lui ai déjà dit ces mots là, je les pense sincèrement. Nina est un trésor, je ne comprends vraiment pas ce qu'elle me trouve ! C'est étonnant qu'elle m'aime non, hein, vous aussi ça vous ébahit ! "Je pensais à toi quand il a neigé l'année passée, parce qu'il faisait si froid, et que toi tu as toujours froid. Et puis, j'ai gouté ce truc sucré parce que toi tu aimes les choses sucrées, je me suis dit que tu aimerais ça, à la fleur d'oranger et au miel. Et il y a ce restaurant où ils mettent des bougies parfumées, celle que tu mets contre l'odeur de cigarette..." Des millions de détails sans cesse. Une fille à la peau pâle mais pas si parfaite que celle de Nina, une moto comme la sienne, parfois même une jupe dans une vitrine ! Taré.

Je retiens un soupir en la berçant contre moi, la cajolant au rythme lent de mes mots noyés de silence. Comment expliquer l'inexplicable ? Il faudrait repartir en arrière, se replonger dans ce moment où j'ai pris ma décision. Le sentiment d'être pris à la gorge, de me noyer à NY. Je ne peux pas l'expliquer aujourd'hui mais je sais que j'avais des raisons, peut-être pas bonnes, mais j'en avais. Aujourd'hui j'ai Nina contre moi et elles m'échappent. "Je suis heureux que tu restes avec moi, je sais que tu comprends pas tout, moi non plus, mais je sais juste que je t'aime. Et tu vas voir, ça ira, je te ferais découvrir Sarajevo pour que tu l'aimes aussi et on ira à Subotica où je suis né. On va aménager l'appartement, je t'achèterais des fleurs pour mettre dans ton vase et Tigar ira se promener sur les toits du quartier... "

Il a beaucoup changé durant cette année passée à Sarajevo, et j'ai beaucoup changé également. Avant, nous aurions l'un comme l'autre été incapables de parler de cette façon sans nous être battus avant. Il aurait fallu des cris, des larmes, des coups peut-être, sans doute une séparation de plusieurs heures, voire de quelques jours... Ensuite le manque se serait fait sentir, on se serait retrouvés et on aurait baisé longtemps avant de pouvoir parler comme on est en train de le faire maintenant. On a eu la baise, mais je suis heureuse qu'on ait pu se passer des blessures avant d'en arriver là. Je ne peux pas dire que je lui pardonne, ou que je le crois sur parole... Mais je le crois un peu plus qu'hier, et sans doute un peu moins que je le croirais demain. Si les choses continuent ainsi, avec le temps mes doutes finiront par n'être plus que de l'histoire ancienne. En tout cas je l'espère.

Je secoue doucement la tête. Si tu n'en valais pas la peine, je ne serais pas là... Et cette image qu'il a de lui me blesse infiniment parce que je sais que c'est en partie à cause d'elle qu'il est parti. Mon regard s'éclaire et je le serre plus fort contre moi, il a cette lueur d'espoir dans les yeux qu'li n'avait plus -ou qu'il n'a jamais eue- lorsqu'il m'a quittée. Tu crois qu'il neigera encore, cette année...? J'aimerais bien qu'il neige... J'aime le froid quand t'es là pour me réchauffer. Ou plutôt j'aime savoir qu'il fait froid dehors et être blottie au chaud dans ses bras, sous une couverture, devant le feu de la cheminée... A New-York aussi il a neigé... Le Chalet devait être inaccessible... Je cherche son regard quand j'avoue : Je n'ai jamais pu me résoudre à le vendre...

Ma main vient chercher la sienne et j'enroule mes doigts aux siens pour les toucher, les caresser, les triturer. Je ne pense pas que c'est parce que j'en vaux la peine qu'elle est ici. Il y a toujours eu une attirance indéniable et surtout une dépendance malsaine entre nous. Peut-être moins aujourd'hui mais je n'en suis pas persuadé. Mais elle a raison sur un point, c'est différent ici. Je suis plus à ma place ici que n'importe où au monde. Ici mes parts d'ombre sont acceptées et si j'ai voulu les renier je sais aujourd'hui que je dois les accepter, elles font parties de moi. Il y a forcément un endroit auquel vous appartenez et moi c'est Sarajevo. J'espère juste que Nina trouvera sa place ici sinon ce sera un problème insoluble !

"Oui il neigera. Il neige toujours l'hiver. Plus ou moins. Je te réchaufferais mon ange" Étrangement la pensée du chalet me trouble et me fait mal. Là bas je me sentais chez moi aussi. Mais je ne sais pas vivre isolé en permanence, j'ai besoin de ma meute, j'ai besoin de combat à mener aussi. "C'est bien que tu l'ais gardé..." Nous n'y avons pas que des souvenirs heureux pourtant, je lui ai fait beaucoup de mal là-bas aussi. Je me souviens de sa tentative de noyade, des bleus sur sa peau, de ses larmes, je n'ai rien oublié. "Je suis désolé." Un silence. "du mal que je t'ai fait". je crois que je n'étais finalement pas du tout prêt à vivre une telle passion. Le suis-je aujourd'hui. Je l'espère. En tout cas, j'ai le sentiment d'un autre équilibre entre nous.

Une question me turlupine depuis un moment et tout en laissant ma main se promener sur elle, par dessus sa robe, sur son ventre et ses cuisses, je demande du bout des lèvres "Tu as dit que tu retournerais à NY pour tes affaires. Tu sais quand ?"

Mon regard s'éclaire un peu et je souris, je suis heureuse d'apprendre qu'il va neiger, j'ai envie de vivre la neige avec lui... J'ai toujours eu envie de tout vivre avec lui, toutes les saisons, tous les jours de l'année, toutes les années de ma vie, dans tous les lieux du monde... Je ne suis pas sûre qu'avoir gardé le chalet soit une bonne chose, pourtant, mais ce n'est pas comme s'il me coûtait quoi que ce soit. Je n'ai jamais été capable de prendre de décision à ce sujet, et il m'aura de toute façon fallu un an pour accepter qu'il ne reviendrait pas et oser enfin demander le divorce. Je n'avais pas entièrement tort... Après tout il n'est pas revenu.

Je baisse les yeux, fuyant son regard à ses excuses qui me heurtent, appuient sur des plaies jamais fermées. Je serre les dents pour ne pas pleurer, tente de me maîtriser encore. Tu m'en feras encore... Je finis par murmurer, pourtant il n'y a pas une once de reproche dans ma voix, ce n'est qu'une vérité à laquelle je crois. Il se lassera, comme il s'est lassé il y a plus d'un an, ou bien il aura peur à nouveau, il trouvera d'autres raisons de prendre la fuite. Quelqu'un, quelque chose lui donnera le sentiment que sa vie avec les Tigrovi est incompatible avec notre mariage, peut-être même que c'est moi qui lui donnerais ce sentiment, et il les choisira eux. Encore. Je n'ose pas lui dire que je n'y survivrais pas s'il m'abandonne encore, qu'est-ce que ça changerait ? J'aurais seulement l'impression de lui faire du chantage, et ça ne l'empêcherait de toute façon pas de partir.

A sa question je hoche la tête, j'ai déjà la date depuis quelques jours mais je n'ai jamais trouvé le moment opportun pour aborder le sujet. Je repars le 12. Je ne sais pas encore combien de temps, une semaine au maximum... Je soupire, tripote ses doigts moi aussi parce que je ne veux pas rompre le lien, surtout pas. J'ai pas envie de renier NY... Je n'ai pas envie de ne plus jamais y aller et je sais que tu ne m'en empêcheras pas mais... J'ai une vie là-bas aussi... Et je ne veux pas que tu restes sur le côté, je ne veux pas avoir l'impression de vivre une double-vie, d'en vivre une dont tu ne fais pas partie... Je sais bien que ce sera compliqué pour toi mais j'aimerais... Je sais pas... J'aimerais que tu puisses venir avec moi, de temps en temps... Que tu rencontres Dimitri, mes amis, qu'on puisse avoir les deux... Est-ce qu'il comprend comme c'est dur pour moi de renoncer à tout ce que j'ai, à ma vie là-bas ? Pour une histoire dont je suis chaque jour convaincue qu'elle ne fonctionnera pas.

Est-ce que je lui ferais encore du mal ? Je ne pense pas en cet instant à celui que j'ai fait en partant, mais à celui avant. Je ne crois pas, mais j'ai toujours juré que c'était la dernière fois avant de recommencer quelques semaines après alors je crois sincèrement que ne pas présumer est d'une importance capitale. Si je ne dis pas non, peut-être que cette fois ce sera vrai. C'est de la superstition pure. Et puis ça la blesse et moi aussi alors je n'insiste pas, à quoi bon raviver les blessures ?

Le 12 ? Dans 5 jours. Je ne nie pas que je suis terrorisé qu'elle parte mais je sais aussi que c'est une épreuve de confiance nécessaire et je crois même que cette fois il faut qu'elle parte seule, pour aller au bout de la démarche. "Je sais, je ne demandais pas pour ça...Tu as tes amis et ton travail, je comprends. Je ne te demande pas de les abandonner, je sais ce que c'est d'âtre dans un pays étranger sans personne" A mon arrivée à NY, j'ai morflé et ça a créé cette nostalgie poignante de Sarajevo. Peut-être que si - à l'époque - j'avais pu faire des allers retours chez moi ça aurait été différent.

Une semaine c'est long et je pose mon front contre son épaule dans un geste câlin d'auto-réconfort parce que je sais déjà qu'elle va me manquer. "Je ne sais pas, peut-être que je pourrais venir, de temps en temps..." Je pourrais demander à Goran de me dire de venir. je peux ruser si Jelenko n'est pas coopératif. C'est que durant quatorze mois j'ai fait quasiment du 24/24 7/7 alors je ne l'ai pas habitué à prendre des jours de repos ! "Pas forcément une semaine à chaque fois, mais je t'accompagne quelques jours et après je rentre avant toi, ce serait moins long et comme ça tu as aussi du temps pour toi voir tes amis, sans que je te colle aux basques. Et puis si tu me racontes, c'est pas une double vie !" Je suis fatigué soudain, un peu morose et pour chasser ça, je propose à Nina "si on se rentrait à la maison, on serait mieux dans un bain tu sais."

Je ne prends pas sa phrase comme un reproche à mon encontre, mais je me sens tout de même obligée de préciser : Je n'ai jamais voulu te donner cette impression, tu sais...? Celle de devoir renier ta famille, tes amis, ton pays... Le Klan. J'essayais... Maladroitement sans doute, sans tout comprendre sûrement mais j'essayais de te protéger... Ma réticence envers son oncle n'a toujours tenu qu'à ça, à cette impression prégnante que cet homme ne lui voulait pas du bien, qu'il ne faisait que se servir de lui. J'ai jamais voulu te faire de mal, j'ai jamais voulu que tu sois malheureux, que tu te sentes... comme coupé en deux... Mais je ne suis pas parvenue à le rendre heureux, à faire en sorte qu'il se sente bien, qu'il ait envie de cette vie-là. Je ne lui répète pas qu'on aurait pu venir ici, parce que je le lui ai déjà dit et puis je suis là aujourd'hui, c'est un acte qui en dit bien plus que des mots je crois.

Je secoue la tête. Je sais bien, je ne te demande pas de venir à chaque fois... Mais j'aimerais bien que tu viennes oui, parfois... Je sais bien qu'il ne peut pas se permettre de disparaître trop souvent, je sais qu'il n'a pas la même vie ici, que tout est différent, mais j'avoue quand même, parce que je ne veux pas de non-dits qui nous rongent : Et puis... J'ai besoin de temps seule avec toi... Quelques jours juste tous les deux, comme avant. Pas tout le temps, pas tous les mois, je sais bien que tu pourrais pas tout le temps et moi non plus mais... De temps en temps... Pour qu'on se reconstruise vraiment j'ai aussi besoin de l'avoir pour moi seule, de ne pas le partager sans cesse avec les Tigrovi.

​Comme moi aussi j'ai très envie de rentrer, je hoche la tête et me lève en lui tendant la main pour qu'il y mêle ses doigts. Pour détendre l'atmosphère je lance dans un sourire : J'aurais pas joué les secrétaires finalement... Mais on se rattrapera.​

"Quoi ?" Je suis désorienté par sa remarque. Je ne l'ai jamais accusée de me couper de quoique ce soit. Mes choix je les ai toujours fait égoïstement, elle me l'a assez reproché. "Non, je parlais d'avant...Quand je suis arrivé à NY et puis tu n'y étais pour rien si j'étais en conditionnelle..." Je n'ai pu revenir ici qu'à la mort de ma mère et encore, parce que mon oncle est intervenu. Comme ça a été dur de revenir ici, de devoir en repartir aussi. Mais en toute franchise, Nina n'est pour rien, la mélancolie et le mal de mon pays me rongeait depuis longtemps, bien avant notre rencontre.

"Mais c'est bien mon intention de venir de temps en temps Srce. Je serais content de revoir Goran et NY..." C'est uniquement parce qu'elle était là-bas que je ne voulais pas y mettre les pieds. C'était trop difficile d'aller là-bas sans la voir. Il me fallait bien 7000km entre nous pour tenter de l'oublier. Et d'ailleurs à la seconde où je l'ai vue, j'ai craqué ! J'esquisse un sourire timide "des vacances ?" Est-ce qu'on survivrait à des vacances ? On s'est souvent déchiré à ces occasions là, ou alors au contraire, elles étaient nécessaire pour se réparer. Je me souviens du fiasco de Tacoma ! "Ce serait bien. T'inquiète pas, je me débrouillerais, je peux bien partir en vacances avec ma femme tu sais ! "Etre le fils de Jelenko ne devrait pas me priver des avantages des autres !

Je hausse les épaules en souriant à se remarque. "C'est toi aussi. Tu étais bien trop mignonne pour passer sous un bureau moj andjeo. J'ai plutôt envie de te faire un massage dans les bulles tu vois ? Et puis, je dois t'avouer que je suis un peu fatigué, ces deux derniers jours ont été intenses. Heureusement que ça va se calmer. Pour ça aussi je me réjouis qu'il ait été élu." On s’éclipse du bureau et de la fête et on rejoint la bagnole. Je chiffonne et je balance le pv accroché au pare-brise et je nous ramène à l'appartement. "On se répartit les tâches ? Je mets la cheminée en route pendant que tu fais couler l'eau du bain. Deal ?"

Le mot vacances ne me plaît pas beaucoup, parce que j'ai peur qu'il l'inquiète je crois bien... Des vacances, oui... Mais des petites vacances, ça peut n'être que deux jours, et on n'est pas obligés de partir. On peut faire comme avant, louer quelque chose pour une nuit, une chambre d'hôtel ou autre chose, dans le fond ça m'est égal, c'est seulement pour se couper du monde... Disons que s'il est officiellement en vacances, qu'on le pense hors de la ville, il y a moins de chances qu'on l'appelle en pleine nuit pour qu'il rapplique. De nos escapades je veux surtout retenir les bonnes choses, on en est bien souvent sortis plus proches, plus complices encore... Et réparés aussi. J'imagine oui, ça tombe bien moi aussi je suis fatiguée, je devrais pas t'épuiser cette nuit. Je plaisante avant de me coller à lui dans la voiture, jusqu'à ce qu'on soit rentrés.

​Une fois à l'appartement, j'accepte le deal et je file dans la salle de bain préparer la baignoire. Je fais couler l'eau chaude, mets de la mousse sans aller jusqu'à allumer les bougies pour ne pas pousser trop loin le romantisme. Et comme il m'a avoué être crevé (oui pour Slavenko "un peu fatigué" veut dire complètement mort, je sais lire entre les lignes), j'allume même les bondes de massage pour qu'on puisse se détendre. Je l'attends sagement dans la salle de bain, et je commets même l'affront d'entrer dans l'eau la première une fois la baignoire remplie. Je m'immerge jusqu'au cou, souffle sur la mousse qui me chatouille le cou et j'ai un sourire angélique quand il entre dans la salle de bain à son tour. J'avais trop froid pour t'attendre !

Deux jours me rassurent, c'est vrai. Pour commencer en tout cas. Deux jours, on ne peut pas se faire si mal que ça en deux jours ? On peut bouger en Bosnie, pousser même à la mer quand il fera beau. Je note mes idées dans lui dire, les gardant comme autant de précieuses surprises. Je préfère ne rien promettre, je suis devenu frileux sur les promesses, elle ne m'en voudra pas je pense.

"Quoi ? Ah traîtresse." Avec un sourire, en représailles, je lui envoie une pichenette de cette mousse qu'elle met toujours dans le bain. Je me déshabille, j'ai déjà enlevé mes chaussures dans le hall et je viens me plonger dans l'eau en créant un remous de vaguelettes. "Tu viens quand même contre moi ou tu m'en veux d'avoir été trop long à allumer la cheminée ? " Je ne plaisante qu'à moitié, peut-être qu'elle m'en veut un peu de la conversation après tout. On n'a remué des choses douloureuses même si on l'a fait sans se déchirer pour une fois. Alors c'est moi qui vient vers elle. Je me coule en face d'elle pour m'emparer d'un pied. J'appuie doucement sur la plante "Je t'avais dit que je te masserais."

L'eau du bain est brûlante, exactement comme j'aime parce qu'autrement elle se refroidit bien trop vite et je ne peux pas y rester longtemps. Je ne le quitte pas des yeux pendant qu'il se déshabille et je pousse mes jambes sur le côté pour lui laisser la place de me rejoindre sans la baignoire. Je dodeline de la tête dans un sourire mutin, toute prête à me glisser dans ses bras mais il attrape mon pied alors finalement je m'abstiens. Mmh... Je viendrais contre toi après le massage. C'est le genre d'instant qui me réconforte, parce qu'une partie de moi est convaincue (de façon très présomptueuse sans doute) qu'il n'a pas pu faire ça avec une autre, qu'il n'a pas pu avoir ces gestes-là pour une autre. Il y a tant de choses que je n'ai partagées qu'avec lui...

Je soupire en me laissant aller un peu plus dans l'eau, tendant ma jambe vers lui pour réclamer encore ses caresses. Je pense déjà à notre séparation à venir et j'appréhende le manque contre lequel je n'ai jamais su lutter. Je pense que je vais rentrer mardi... J'arriverais en même temps que Tigar comme ça. Je ne voudrais pas que mon chat arrive tout seul et continue de penser que je l'ai abandonné, il doit déjà se demander où je suis passée !

Je souris, amusé, en la dévisageant. "tu te trompes de semaine srce. Tigar arrive mardi-ci, le 09. Toi tu pars le 12. Je garde le chat en otage pour que tu reviennes." Je dis tout haut ma crainte, sur le ton de l'humour, autant désamorcer l'angoisse. J'ai souvent constaté que garder les choses pour moi n'étaient pas une bonne chose, surtout quand ça concerne Nina. Comme lorsqu'elle est partie à Washington pour ses études avec Arthur dans son sillage. Elle a raison, j'ai changé en quatorze mois. "Si tu as besoin d'une semaine, je garderais le chat, mais si tu restes que quatre jours, je vais pas me plaindre de te voir rentrer plus vite !" J'embrasse son pied joli que je tiens dans mes mains, à la portée de ma bouche pour se faire dévorer.

"Ce que je peux faire quand tu sera partie, c'est faire une mission, p'tre avec Camenko à Mostar ou Banja Luka et puis après quand tu rentres, je prends deux jours de repos. Je dis pas qu'on partira, mais on pourrait en profiter au contraire pour s'occuper de l'appartement. On m'a parlé d'un dépôt de meubles sympa, du recyclage et c’est pas cher. On pourrait aller faire un tour. J'aimerais franchement bien qu'on ait un canapé confortable pour baiser plutôt que de devoir baiser par terre..."

J'écarquille les yeux, en effet j'avais mal calculé ! Oh, mais il arrive bientôt alors ! Non, je ne cherche même pas à dissimuler le fait que la boule de poils me manque terriblement. Je crois que Slavenko ne s'en rend pas bien compte, mais si j'ai toujours adoré ce chat, c'est encore plus fort depuis qu'il est parti. Disons qu'après l'avortement j'avais un cruel besoin de réconfort, mais j'étais trop déprimée, trop en colère pour supporter l'espèce humaine. Donc j'ai reporté tout mon manque d'affection sur Tigar, qui me l'a toujours bien rendu parce qu'il est très câlin. Je fronce les sourcils, secoue la tête. Je reviendrais. Je partirais jamais comme ça... Comme lui, il sait très bien ce que je veux dire par là. Mais du coup je rentrerais peut-être que mercredi alors, ça me fait quatre jours pleins sur place, comme ça. Les journées de voyage ne comptent pas, il y a trop d'heures de vol et le décalage horaire va me flinguer.

Je plisse le nez dans un sourire amusé. Si tu pars en mission pendant mon absence, qui s'occupe du chat ? Interdiction de laisser Tigar mourir de faim, j'te préviens. Ce qui me fait penser à autre chose. On devrait installer une chatière, pour qu'il puisse aller et venir même quand on n'est pas là. Mais je suis certaine qu'il trouvera bien quelqu'un pour passer nourrir le chat, ne serait-ce que le concierge de l'immeuble peut-être ? Mais oui, c'est vraiment une bonne idée, s'occuper de l'appartement, il est grand temps qu'on commence à meubler. Par contre je vais rapidement être short niveau thunes... J'ai un coup à organiser en rentrant, mais j'aurais assez en attendant pour aller au dépôt.

J'ai un grognement, entre l'amusé et le dépité parce que je me fais gentiment tacler mais j'ai en quelque sorte tendu le bâton pour me faire battre. Pourtant, je ne mériterais pas tant d'égard et elle pourrait me rendre la monnaie de ma pièce en faisant la même chose que moi, je ne mérite rien de mieux. " Pas comme moi, je sais. Humm mercredi, ok, tu me donneras tes horaires de vol ? "

"T'en fait pas pour le chat, je trouverais un baby-sitter qui viendra lui filer à bouffer. Un voisin ou un ami. Et j'installerais une chatière lundi, un truc qui marche avec un collier parce que je veux pas tous les chats du quartier dans l'appart' ! "

"On achètera le nécessaire, un canapé, une table, deux chaises...Ce sera une chaise de plus que dans mon appart' du Bronx, souviens-toi ! " On peut commencer "petit". Je sais bien que l'argent est un problème mais au dépôt on devrait trouver de quoi meubler pour pas cher et dans l'intervalle je me ferais quelques extras en cash. Je préfère être très occupé pour ne pas me morfondre en pensant à Nina à NY avec son Dimitri et ses amis qui tenteront surement de la dissuader de la folie. C'est à ça que je pense, le visage grave, ma joue appuyée contre son pied que je caresse distraitement.

Après un silence, je demande en réalisant seulement ce qu'elle m'a dit "Un coup à faire ? "

Je ne me sens pas vraiment coupable de la pique lancée parce que je crois que j'aurais eu tous les droits d'être beaucoup, beaucoup plus méchante que ça avec lui depuis qu'il est revenu dans ma vie. J'essaie d'ailleurs au quotidien de ne pas faire référence à ses erreurs (c'est fou comme le mot est trop faible pour qualifier ce qu'il a fait) parce que j'essaie de ne pas le blesser inutilement. Il m'a finalement mieux dressée qu'il ne le croit parce que même après tout ce temps je n'arrive pas à lui vouloir de mal. Oui, t'en fais pas, je te donnerais ça. Mais si tu peux pas venir me chercher à l'aéroport je prendrais un taxi, c'est pas bien grave. En ce qui me concerne j'ai bon espoir de ne pas revenir seule mais d'amener une ou deux filles avec moi, vous voyez ?

Plutôt que des chaises il nous faudrait des tabourets hauts d'abord, on pourra manger sur l'îlot de la cuisine comme ça et ça nous laisse le temps d'acheter une table qui nous plaise vraiment. Un truc en bois, solide, donc forcément un peu plus cher. Mais j'ai pas envie de tout racheter alors je te préviens, même si c'est pas cher, j'achèterais que si ça me plaît. Je ne veux pas de meubles "en attendant" d'avoir mieux. Je veux que tout soit parfait, tout de suite. Psychoriquoi...? Pas du tout.

L'air de rien, je récupère ma jambe et lui tends l'autre, histoire qu'il masse des deux côtés, mh ? Ouais. Un cambriolage, histoire de me renflouer un peu le temps que la boîte fonctionne ici... Je sais pas encore quoi, faut que je me renseigne... Probablement une bijouterie.

Je ne cherche pas du tout à la faire se sentir coupable des remarques qui lui échappent, au contraire. Je cherche plutôt à éviter les non-dits. Ce n'est pas "comme ça" qu'elle voulait réellement dire mais bien "comme toi" et elle peut le dire sans prendre de gants, elle ne devrait pas avoir se retenir. Je dois assumer ce choix que j'ai fait. "ok, on verra, je saurais surement qu'à la dernière minute tu sais."

"bonne idée les tabourets, j'avais oublié cet îlot pourtant bien pratique" J'ai un léger rire graveleux pour bien signifier à quoi je pense (enfin je ne sais pas si on pourra réitérer l’exploit sans le truc s'écroule sous nos poids conjugués. "On achète au moins un canapé zlato, j'en démordrais pas. Le reste on verra. Attends, c'est con de pas pouvoir se vautrer devant la cheminée."

En souriant je récupère l'autre jambe que je masse à son tour, cheville et pied. "Oh, je croyais que tu avais déjà repéré un truc. Tu me diras hein ?" Je préfères jeter un coup d’œil par sécurité. Je ne voudrais pas qu'elle se mettre à dos un gros maffieux local, ce serait con. Je chatouille la plante de son pied, fripée à cause de l'eau trop chaude. "t'avais pas dit que tu viendrais près de moi ? "

Je roule des yeux. Mais oui t'en fais pas, au moins un canapé. D'une part moi aussi j'ai envie d'un canapé où me poser quand je rentre du boulot, ensuite dans le pire des cas si le seul qu'on trouve ne me plaît pas on pourra toujours le foutre dans le bureau par la suite, et il nous servira de chambre d'amis. Parce que croyez-le ou non mais je ne désespère pas de convaincre certains proches de me rendre visite à Sarajevo. Leur faire accepter ma relation avec Slavenko va être compliqué, mais je ne veux surtout pas me couper d'eux ou du reste du monde. Disons que je n'oublie pas qui était là lorsque j'en ai eu besoin, et le nom du slave n'est pas sur la liste. Je l'aime à en crever, sans doute plus désespérément qu'avant encore, mais je suis aussi très lucide.

Mon regard s'illumine d'une lueur à la fois amusée et tendre quand il entreprend de masser mon autre jambe et je le rassure dans un sourire. Oui bien-sûr je te dirais. Je te l'ai dit, je ne veux pas m'en prendre aux mauvaises personnes. Et par mauvaises j'entends aussi bien des types trop dangereux que des alliés des Tigrovi, ce qui mettrait mon mari dans une position délicate. J'appréhende suffisamment le moment où il devra de nouveau choisir entre les Tigrovi et moi, je vais éviter de le provoquer moi même.

Ses chatouilles m'arrachent un rire et je retire ma jambe brusquement pour y échapper, foutant de l'eau partout au passage. Docile... Et surtout d'humeur très câline en fait, je me coule jusqu'à lui, prenant d'abord un baiser sur ses lèvres avant de lui tourner le dos pour me glisser entre ses bras. J'ai un long soupir de contentement quand il les referme sur moi, bon sang, je ne me laisserais jamais de la sensation de sa chaleur m'enveloppant.

Je récupère Nina contre moi avec un sourire purement guimauve. Je l'enveloppe de mes bras protecteurs, attentif à son regard, son sourire, son humeur. J'appréhende son départ mais je ne veux pas me laisser bouffer par l'angoisse, je ne suis plus comme ça pas vrai ? En tout cas je ne veux plus que ça gâche les moments où nous sommes ensemble. Je me démanche le cou et ma bouche vient chercher la sienne dans un voluptueux baiser. Je glisse un peu dans la baignoire dont les bulles ne cessent de venir nous chatouiller. Mes mains caressent son ventre, remontent langoureusement à ses seins, redescendent sensuellement. C'est un doux instant, celui où j'explore et vénère con corps, où elle s'abandonne à moi. le savon me permet de glisser aisément sur sa peau, jusqu'à la lisière de la toison douce. Je descends vers ses cuisses, en caresse l'intérieur en l'incitant à les ouvrir alors que je bécote son cou en silence. j'y bois les petites gouttes d'eau, grignote un bout d'oreille avec un petit rire doux. "Ferme les yeux zlato, laisse toi aller mon ange. Je m'occupe de toi"

Une main sur sa gorge, je la tiens contre moi sans violence, juste pour ne pas qu'elle glisse dans l'eau. L'autre main sous l'eau trouve son chemin. Doucement je pose les doigts sur son sexe, en écarte lentement les lèvres dans une pression brève. Je m'immisce, glisse, imprime des attouchements plus ou moins précis dans une subtile balance entre plaisir et détente. Je ronronne des mots à son oreilles, indécents, je lui dis qu'elle est belle, qu'elle bonne, sexy, que sa peau est un champ de neige, que j'aime quand elle jouit de moi, tout un tas de bêtises romantiques et salaces à la fois. Plus que le sexe brutal qui souvent nous unit, ce sont ces moments là qui m'ont le plus douloureusement manqués durant notre séparation.

Je ne suis étrangement pas très anxieuse concernant mon départ. Parce que pour une fois, c'est moi qui m'en vais, et ça n'a jamais été le cas durant tout le temps où nous étions dans le Bronx. C'est toujours lui qui avait des missions, des affaires à régler, beaucoup de boulot... Et moi je l'attendais chez nous, désespérée parce que je ne savais pas gérer le manque. Aujourd'hui il me manque toujours aussi douloureusement quand il n'est pas là, mais disons que j'ai un côté fataliste qui me souffle que je ferais mieux de m'y habituer parce qu'il finira par repartir. Alors quand c'est moi qui m'en vais, c'est plus simple, parce que je sais que c'est lui qui restera à attendre que je rentre... Et je me demande, forcément, si je vais lui manquer comme il a pu me manquer, s'il souffrira de la crainte que je ne rentre pas comme je peux en souffrir chaque fois qu'il passe la porte.

Je me laisse aller contre lui, pas parce qu'il me le demande mais parce que je suis vraiment bien dans ses bras à cet instant précis. Ses caresses sont exquises, elles font savamment grimper le plaisir sans rendre la tension douloureuse, et j'ondule doucement sous l'eau pour accompagner ses doigts, des gémissements bas m'échappant. Je pose ma main sur la sienne, au niveau de mon cou, juste pour le garder contre moi. L'orgasme m'emporte sans violence, dans la continuité naturelle de ses gestes et je jouis en le serrant plus fort, le corps complètement saturé de toutes les sensations de la soirée. Quand je redescends, que j'ai repris mon souffle, je murmure tout bas : Tu m'as manqué moja duša, c'était long deux jours sans toi...

je souffle, apaisé par son orgasme qui me rassure, me rassénère, il y a certaines choses qui n'ont pas changées, et son abandon dans mes bras en fait partie. Je pose ma joue contre la sienne, frotte d'un geste câlin en répondant "Je sais moj andjeo, c'est toujours long sans toi" Même ces quatorze mois ont été d'une lenteur infinie, comme pris dans une mélasse de routine et de douleur rentrée. "Allez viens, on va se coucher."

On sort de l'eau qui de toute façon va trop refroidir pour qu'elle y reste encore lentement. Je lui donne son peignoir tandis que je préfère me sécher rapidement avec une serviette avant qu'on gagne la chambre. Le chauffage conjugué à la cheminée fait que je peux me balader à poil dans cet appart ! Nina est de nouveau là et je vais à nouveau vivre dans une chaleur permanente, je m'en amuse à dire vrai. J'abandonne ma serviette, et je me vautre sur le lit, attends que Nina me rejoindre pour venir me coller à elle. Je suis épuisé, un peu déphasé aussi. ce n'est pas si simple d’enchaîner mission, soirée de plaisir, vie de couple. En tout cas pas pour moi, rien n'est naturel mais je trouve que je ne me suis pas mal débrouillé même si je devine que Nina aurait aimé que je l'appelle ou lui envoie des sms. J'ai de la marge de progression on va dire. Mon front contre son épaule, ma main sur son ventre, je ferme les yeux en respirant l'odeur de Nina, en me repaissant de sa présence. "Ja volim te zlato moje. Bonne nuit mon amour"