L'amour ça craint, mais pas les promos / Rauera

Une heure de retard, puis trois tours du machin destiné à récupérer les bagages plus tard, j'avais réussi à franchir la douane sans trop de problème. Mon identité n'est un problème que dans l'état de New York, ici, je peux continuer à être moi sans le moindre problème.
Je jette un coup d’œil à ma montre. Mon comité d'accueil n'est pas encore arrivé, ça n'est une surprise pour personne, le jour où Pussy sera à l'heure, c'est que de sérieux ennuis nous attendront à l'arrivée, et puis ce retard, c'est presque déjà un avant goût des retrouvailles: c'est familier, et ça fait du bien.
Bien plus que les emmerdes qui me collent au cul à New York en tout cas.
C'est ça de jouer les flics ripoux.

Un lourd sac type bagage militaire sur le dos, je le vois cependant bientôt apparaître, toujours aussi bien sapé, toujours aussi classe, toujours suivi de Rotschild qui le suit comme son ombre.
Le sourire de Legence s'étire, le mien aussi. Nous sommes en terre bosniaque et ici, coller sa bouche sur celle de son patron, ou lui coller une main au cul pour lui faire savoir qu'on est content de le retrouver n'est pas un comportement tout à fait socialement admis. - Nickel. Ca ira mon vieux, tracasse. Je suis un grand garçon, j'devrais m'en sortir avec mon sac.

- Comment va mon chat préféré? Ca te gêne si on sort? J'ai b'soin d'une clope. J'ai pas fumé depuis trop longtemps pour parvenir à me concentrer correctement pour l'instant.

L'éclat de rire de Pussy a quelque chose de rafraîchissant dans cette ambiance étrange où tout les gens qui l'entourent parlent une langue qu'il ne maîtrise absolument pas et dans laquelle il ne trouve aucun point de repère. Il va falloir qu'il s'y familiarise pour de bon cette fois, mais ça risque de prendre du temps. - C'est sympa merci, je devrais réussir à trouver d'ici une semaine. T'inquiètes. Je précise en accompagnant la remarque d'un clin d'oeil.
Legence est une compagnie appréciable, je sais qu'il apprécie la mienne aussi, mais nous savons tout les deux qu'être trop souvent au même endroit serait une idée très con. Et on a tout les deux trop besoin de liberté.

- Wow. Chapeau. Et ton projet d'élection? Ca en est où? Je me renseigne, en allumant une clope alors que nous arrivons dehors. Le temps est gris, sans surprise, et je tire une bouffée de tabac dans un soulagement qui se manifeste dans un râle de contentement. - Hm, on peut pas dire que j'avais vraiment envie de faire tout ça. Je grimace légèrement.
Je laisse Rotschild s'éloigner pour aller chercher la voiture dieu sait où avant de reprendre: - La police de New York m'a fait un procés. Paraîtrait que j'ai laissé passer des trucs louches. Bon, on sait tout les deux que c'est vrai, mais... disons que je suis parti avant le rendement du jugement. Je hausse les épaules: - Mais j'ai des faux papiers si besoin. T'inquiètes tu seras pas inquièté. En plus, je connais deux, trois personne dans le coin. Comment? J'ai eu des contacts avec des bosniaques dans le Bronx.

- Comment tournent les affaires? Y'a déjà des gens que t'as agacé au point qu'ils aient envie de te tuer? C'est totalement son genre, me jugez pas.

Je sais que contrairement à Legence, je suis pas fait pour rester dans un hôtel. Si Legence ne sait pas tourner en place, personnellement, je suis pas capable de rester trop longtemps dans un petit espace clos. Chacun ses défauts je suppose. J’ai besoin de pouvoir sentir le grand air, même si dans le cas présent, ce sera l’air pollué de la ville. Ça ne changera pas tant de la ville de New York finalement.

Je hausse les épaules: - Je suppose que même si t’avais envie de te casser du jour au lendemain, ce serait possible. Tu sais soigner tes sorties non? Je lui décoche un clin d’oeil taquin. - mouais, évite de sortir seul quand même. M’est avis que ton joli petit cul pourrait attirer des emmerdes. Leg pourrait paraître hétéro dans ce pays ou l’homosexualite est tabou. Mais, il est aussi d’un goût qu’on ne saurait pas trouver chez les beaufs intolérants qu’on trouve dans les mauvais quartiers de Sarajevo.

Un rire éclate dans ma poitrine, sonore comme à son habitude: - Non, de quoi me choper? Enfin! Mon ethique professionnel n’a jamais été à mettre en cause chaton... Je minaude avec amusement. - Adorable... sérieux? Légal? Quel est le cingle qui t’a proposé un truc pareil? Un type qui n’avait pas conscience du fait que Leg pouvait à lui seul attirer le légal vers’ l’illegal A la vitesse de l’éclair. - Tu vas me faire croire que t’as pas de gros coup prévu? Mais tu t’emmerdes pas? Je demande, sincère, en montant à ses côtés dans la voiture.
Rothschild se mettant a l’arriere avec le sac.

Je tire sur ma clope en jetant un coup d'oeil à Legence d'un air distrait: - J'appelle ça comme ça. Et tu as laissé un souvenir impérissable aux flics du pays. Je précise dans un sourire mutin, alors qu'il fait démarrer la voiture. Je suis surpris de ne pas trouver la Lambo, mais je suppose qu'elle doit être stockée quelque part pour ne pas attirer trop l'attention.
En même temps, on parle de Leg. Il finira forcément par avoir envie d'attirer l'attention.

Je jette un coup d'oeil à Rotschild dans le rétroviseur intèrieur. Ce mec a quelque chose qui s'approche d'une cocotte minute. Sincèrement, si mon flegme insulaire m'a permis de m'habituer à la conduite sportive de Pussy, j'ai l'impression que ce type n'arrivera jamais à s'y faire, mais s'il a envie de gerber, ou de se pisser dessus, il le cache bien. - Sérieux? Un peu que j'veux savoir. Je crache un petit nuage de fumée par la fenêtre: - Recruteur? J'arque un sourcil: - Recruteur de quoi? Faut avouer que t'as un sens de la persuasion à toute épreuve, mais j'avoue que j'ai du mal à t'imaginer offrir de grosses payes derrière un bureau. Calme toi, je laisse la place de confesseur ! C'pour savoir si on va avoir du boulot. J'ai bien du mal à imaginer ce type capable de rester en place plus d'une trentaine de minute, et encore, dans les jours où il est fatigué.

J'esquisse un petit sourire: - Ah ça te fait frétiller ça hein? C'est un sacré bordel. Les ritals se sont embrouillés avec les russes. Et ça tu sais c'que ça veut dire Pussy? Je passe la main dans mes cheveux, inspire une nouvelle bouffée: - La semaine où je suis arrivée, y'a eu deux morts dans une superette, altercation à la con. Ils tirent comme des abrutis, au hasard. J'pense même qu'ils vont finir par faire sauter le MAIS FAIS ATTENTION PUTAIN. Oui bon, mon flegme insulaire vient de me trahir sur un virage un peu serré.

Glissant une cigarette entre mes lèvres que j’allume d’un geste précis, je regarde le paysage défilé tout en écoutant les informations que me filent Legence. Je sais que ses sources sont souvent bien placées et généralement fiables. En somme, c’est un très bon menteur mais il n’aurait aucun intérêt à me mentir à moi sur un truc qui ne le concerne de toute façon, pas le moins du monde.
Je fronce les sourcils; - Mon ancien équipier? Mais je l’ai vu la semaine dernière je… Je sais qu’il n’a pas bien pris mon départ de la police parce qu’on formait une bonne équipe. Mais de la à me balancer aux supérieurs? Je n’avais jamais imaginé que ça puisse être lui. - Merci. J’vais me renseigner. Je connais deux ou trois collègues aussi pourris que moi qui sont donc de confiance. On verra ce qu’ils ont à m’en dire.

Je ne suis pas vraiment surpris quand il me dit qu’il a décliné. Legence est un patron très cool. Par contre, personne n’aurait l’idée très con d’essayer de le mettre à ses ordres. - Ouai, un coup à se retrouver emmerder ça. Puis à la moindre embrouille entre eux, jte raconte pas les problèmes. L’homme est un loup pour l’homme, et deux hommes puissants finissent toujours par se bouffer la queue. Parfois même littéralement.
Je manque l’arrêt cardiaque et je roule des yeux alors qu’il accélère davantage comme pour se donner tort. - Hé je suis jet laggé, ais un peu de respect pour ma fatigue. Je sais que tu sais conduire. Mais j’aimerais éviter de crever à peine arrivé.
Je crache ma fumée par la fenêtre et me tourne vers lui, plus attentif: - Tu fais des allers-retours la bas ? Ou alors t’as des gens sur place? que je sache si je vais encore changer de fuseau horaire s’il y a du boulot la bas.