Chaque jour une nouvelle cascade, j'aurais du demander une doublure. || Slavina

Mon regard sur lui s'adoucit, je secoue la tête. « Tu sais bien que je le saurais quand même... Mais c'est pas grave mon ange, tu te rattraperas quand je pourrais rentrer à la maison, pas vrai ? » J'espère seulement qu'une fois chez nous, je ne serais plus alitée. Me reposer, je veux bien, ne pas trop en faire, m'allonger plusieurs heures par jour, ne rien porter de lourd. Mais ne plus pouvoir bouger du tout, non, je ne tiendrais pas. Pas jusqu'à la fin de la grossesse en tout cas. « Il va falloir que je m'en occupe à distance, oui. » Et que je songe à embaucher une aide administrative. Une... Comment on dit ? Une assistante de direction ? Quelqu'un qui peut prendre le relais complètement si je suis absente, et ne me contacter que pour les décisions importantes. Parce que j'ai l'intention de prendre du temps pour mon fils quand il sera né.

Je réprime un rire, attendrie pourtant, quand il se penche sur moi pour parler au bébé. Je caresse ses cheveux avec tendresse, secoue doucement la tête face à son air un peu idiot quand il se relève. « Tu veux une bonne nouvelle, mon amour ? Tu n'as pas besoin de t'adresser directement à lui, il entend ta voix quand tu es près de moi, c'est suffisant. » Je sais bien que c'est étrange de parler à mon ventre et à vrai dire, même moi je trouve ça légèrement gênant, je n'ose pas m'adresser au bébé à haute voix. Mais j'essaie de lui faire comprendre, je crois, que l'important c'est surtout qu'il soit près de moi, physiquement. Je lui rends son baiser, glisse ma main sur sa joue. « I ja volim te. » Je frotte brièvement mon nez contre le sien. « Il est encore tôt, Slavo, si tu dois aller bosser vas-y, je vais m'occuper, c'est promis. »

 Percé à jour, j’ai un rire bas et grave, gêné. “c’est une bonne nouvelle, j’m’sens un peu idiot de parler à ton bide” Je niche mon visage dans le creux de sa main, me laissant aller à un instant câlin. Non, toi tu ne vas pas t’occuper, tu vas te reposer. Tu as l’air épuisée srce moje. Je repasse ce soir. Je ne promets rien pour la suite, parce que je sais bien que tout peut brusquement s’accélérer, il suffit que Camenko se pointe plus tôt pour que tout soit chamboulé, ou à l’inverse qu’il ne puisse pas se libérer pour que ça piétine. Je ne veux pas demander à Mirko de m’aider, pas quand ça concerne Nina, j’ai besoin d’une personne qui se sentira concernée et je ne vois que mon frère pour ça.  “A tout à l’heure moj andjeo, volim te.”  Sur un dernier baiser je m’arrache à elle pour essayer d’aller démêler l’imbroglio de la situation à laquelle je ne comprends toujours rien. En me relevant, je grimace d’être resté appuyé un peu trop longtemps sur mon bras blessé, le retour de la circulation sanguine étant douloureuse, heureusement Vuk m’a juré que ce serait vite remis.

Je file hors de l’hôpital pour rejoindre le QG. Après le message reçu de Camenko, je vais voir la personne qu’il devait rencontrer et je m’excuse pour lui, passant du temps avec le politique pour l’amadouer. Heureusement, ça je sais faire et comme je ne suis au courant de rien, je ne risque pas de faire un impair. Tout ça ne m’avance pas et malgré le temps que je passe ensuite avec nos amis croates, je n’apprends que peu de choses utiles si ce n’est que l’un laisse échapper par mégarde que leur cheffe est une femme. Voilà qui est assez inhabituel dans le milieu. Mais je connais mal les factions venues de croatie, pourtant, je pense immédiatement à ma connaissance de Neum, celle là même qui m’avait prêté sa villa pour y emmener Nina : Drisna Marishkova. Je pourrais peut-être avoir des informations par son intermédiaire, mais c'est délicat...

Je suis épuisée, c'est vrai, mais je ne sais pas si je pourrais dormir. L'idée de rester enfermée ici durant plusieurs jours a tendance à m'angoisser, je ne peux pas le nier même si je m'efforce de faire bonne figure. « Sois prudent. » Je reprends sur ses lèvres le baiser volé, et je le laisse sortir de la chambre parce que je ne peux pas le retenir ici indéfiniment.

Je dors finalement plusieurs heures, complètement assommée par la soirée de la veille et ma nuit à ne faire que somnoler. Mon corps supplie pour un peu de repos, et puisque je suis coincée dans ce lit je n'ai d'autre choix que de l'écouter. Je suis réveillée aux alentours de midi parce qu'on m'apporte un plateau repas, bien plus appétissant que dans les hôpitaux publics que j'ai pu fréquenter, à tel point que je n'en laisse rien. Quand les infirmières viennent une nouvelle fois vérifier que le bébé va bien, j'en profite pour leur demander de me passer mon ordinateur avant de sortir.

Je passe le reste de l'après-midi à faire des achats en ligne, à me balader sur pinterest ou autres blogs d'inspiration, ce qui ne me ressemble pas du tout. Seulement, je ressens une urgence vitale à préparer la chambre de Tomas. J'ai besoin qu'il sente, et de sentir moi aussi, qu'il est attendu, désiré, que je ne remets pas sa venue au monde en question. Ce bébé va naître, je ne supporterais pas qu'il y ait le moindre doute à ce sujet. Je prépare donc sa chambre à distance, me forçant même à commenter à voix haute chacun de mes choix, comme si je lui demandais son avis.

Je réponds rituellement, "Toujours srce" Mes seules prudences sont pour sauver Nina, faisant toujours passer sa sécurité avant la mienne parce que je supporterais un monde sans elle, tandis que le monde supporterait très bien de se passer de moi.

L'heure des visites est passée quand je reviens à l'hôpital mais j'ai l'aval de l'infirmière et de la gynéco et il n'est pas si tard que ça, c'est juste que les visites se terminent normalement à 18h puisque après ils distribuent les repas. Je toque à la porte de Nina avant d'entrer, poussant la porte de l'épaule droite parce que je tiens un bouquet de fleurs et un petit sac faiblement lesté. Je me suis vaguement fait engueulé par Stefan qui m'a dit que ce serait bien que j'amène des fleurs à ma femme, qu'elles aiment bien ça etc etc... Sur ce bon conseil, je me suis donc arrêté à la boutique qui est en face de la clinique, judicieusement placée pour faire des affaires.

Je m'approche donc du lit où est cloîtrée Nina. A coté, un autre lit a été préparé, à ma demande. "bonsoir zlato" Je montre maladroitement les fleurs. "J'ai amené de quoi égayer ta chambre" puis le sac, "et de quoi manger." Je n'ai pas eu le temps de bouffer, alors j'ai ramené de quoi, et même un peu plus si Nina a envie. J'embrasse ma femme avant de me poser sur le fauteuil, empêtré avec mon bouquet et mon sac. "ça a été ? comment tu sens, duso ?"

J'ai aménagé un petit bureau de fortune en posant le plateau repas sur ma table de chevet, et mon ordinateur portable sur la tablette que je peux ramener au-dessus de mes cuisses. J'ai un morceau de pain dans une main, et l'autre posée sur le pavé tactile du pc quand Slavenko passe la porte de la chambre. Je n'étais pas sûre de le revoir aujourd'hui, et mon visage s'illumine aussitôt. Un sourire fleurit sur mon visage à la vision du bouquet de fleurs, je n'en suis pas friande en temps normal mais j'admets qu'un peu de couleurs dans cette chambre ne peut pas faire de mal. « C'est une très bonne idée, merci. » Je réponds à son baiser, et le suis du regard pendant qu'il s'installe.

« J'ai dormi, j'ai mangé, Tomas a bougé, son cœur bat toujours bien... Alors ça va. » Chaque heure passée est une victoire, un pas de plus vers la guérison. Je n'ai pas encore commencé à compter les heures qui me rapprochent de ma sortie d'ici, mais ça ne saurait tarder. « Et toi, ç'a été...? Vous avez du nouveau ? » Il a peut-être besoin de parler de futilités après sa journée, mais j'ai besoin de savoir si les choses avancent. J'essaie de ne pas trop y penser, mais ça m'angoisse forcément de savoir qu'il persiste un potentiel danger.

Je pose le bouquet de côté et souris aux bonnes nouvelles de la chambrée. Je suis soulagé, Nina a l'air plus reposé et détendu et si le bébé bouge, tout va bien à ce qu'on m'a patiemment expliqué. Je suis sur que l’œdème va se résorber pour peu que Nina soit raisonnable, et je sais qu'elle le sera. "Très bien ! Ce bébé est un warrior, comme sa mère." De mon sac, je sors un paquet en papier plein de gras que je déplie sur mes genoux, mon treillis n'est plus à ça prêt. J'en tire des chaussons à la viande. "Tu en veux un ?" demandé-je à Nina avant d'en croquer un.

A sa question, je hausse les épaules, mâchouillant ma bouchée avant de pouvoir répondre. "humm ben le russe a balancé tout ce qu'il pouvait. On en tirera rien d'autre. On hésite à le refiler à la Bratva en cadeau mais j'ai peur qu'il balance l'incident et j'ai pas trop envie. J'attends Camenko pour lui demander son avis là-dessus. et j'l'attends pour d'autres trucs s'il daigne bouger son cul." Je ronchonne, je sais que mon frère a ses propres emmerdes mais c'était pas le bon timing. On a la poisse tous les deux. A moins qu'il n'y ait un lien que je ne perçois pas. "Les deux autres sont des croates, sont plus coriaces mais on a compris qu'ils bossaient pour une femme. Un des deux a lâché cette info. J'vais demander à Drisna de me filer un coup de main. Elle saura p'tre me dire qui a pu engager ce genre de sbires et pourquoi. ça doit bien circuler dans le milieu par chez eux."

Je secoue la tête dans une légère grimace écœurée quand il me propose de manger encore, je ne pourrais plus rien avaler de la soirée, et un truc aussi gras me file juste la nausée. Je suis de toute façon trop occupée à l'écouter me raconter le déroulé de sa journée. J'ai toujours beaucoup de mal à faire le lien entre ce qu'il me dit, et le fait que ce soit lui qui agisse. Typiquement quand il me dit qu'ils ne pourront rien tirer de plus du Russe, je sais très bien, au fond de moi, qu'il a du se montrer persuasif pour le faire parler. Et j'ai beau être parfaitement consciente de la violence dont il peut faire preuve, à mon grand malheur d'ailleurs, j'ai encore un mal fou à admettre qu'il était en train de torturer un type juste avant de m'acheter des fleurs. On ne va pas se mentir, j'ai toujours été très ambivalente sur le sujet. La première fois qu'on a couché ensemble, il bossait pour un type auquel je devais un paquet de pognon. J'ai toujours été attirée par la dangerosité qui émane de lui, comme j'ai toujours ressenti une certaine adoration pour lui, parce que je sais ce qu'il est capable de faire pour me protéger.

« Drisna ? » Le nom ne me parle pas du tout, mais on sent bien la pointe de jalousie qui perce dans ma voix. Je suis enceinte et enfermée dans une clinique, on ne peut pas dire que je sois au top niveau estime de soi. Je reformule malgré tout ses explications. « Du coup... Hormis leur nationalité, on n'a pas la moindre idée de qui ils sont, ni de ce qu'ils foutaient-là ? » C'est extrêmement rassurant. Je tends la main vers lui, la pose sur son avant-bras, interrompant le geste qu'il allait faire pour porter la bouffe à sa bouche. « Slavenko tu me promets que tu fais attention à toi, dehors ? »

"Drisna Marishkova, tu sais ?" non visiblement, elle ne sait plus, alors j'explique. "La femme qui nous a passé sa villa à Neum. Elle a beaucoup de contact en Croatie. Du coup j'me dis que si c'est une femme capable d'engager des gros bras qui l'a fait, y doit pas y en avoir cinquante." On s'échange volontiers des services avec Drisna, c'est une cliente de longue date et on se connait bien. Je dois bien admettre que Nina a raison. "Non pour l'instant, je n'en sais pas beaucoup plus mais le renseignement, c'est pas trop mon domaine et j'voulais pas mêler Mirko à ça. J'attends le retour de Cam."

J'ai un sourire rassurant pour Nina, entre deux bouchées de pain de viande "Je suis même pas sorti du QG srce, ah si, pour voir un type mais rien à voir avec l'affaire qui nous occupe. Je crains rien." Je déglutis et poursuis "en attendant, j'ai deux hommes qui surveillent la clinique et quand tu rentreras et que je serais pas là, pareil. Jusqu'à ce qu'on trouve qui a fait ça. Ou sinon..." Je marque une pause "ou sinon tu vas à NY le temps que ça se tasse."

J'avais complètement oublié que c'était une alliée des Tigrovi qui nous avait prêté sa villa, mais j'aurais dû m'en douter. Je ne crois pas qu'il reste encore dans l'entourage de mon mari des gens qui ne soient pas liés de près ou de loin au Klan. « Avec ses contacts et ceux de ton frère, vous trouverez forcément quelque chose. » J'ai appris très vite que Camenko était particulièrement doué pour récolter des informations, même les plus sensibles. A l'heure actuelle, je ne sais toujours pas si c'est lui qui m'a faite suivre lorsque Jelenko a demandé à ce qu'on garde un œil sur moi. J'imagine bien que Camenko n'aura de toute façon pas perdu son temps à prendre des photos compromettantes de moi, mais il a toujours pu engager les hommes pour le faire.

Sa proposition me fait soudainement blêmir. « A NY ? Tu veux m'envoyer toute seule à NY ? » J'ai déjà du mal à admettre l'idée qu'on ne peut se croiser que brièvement chaque jour tant que je suis coincée ici, maintenant il propose en plus de m'expédier sur un autre continent ? « Je n'ai pas le droit de prendre ma douche autrement qu'assise sur un tabouret, tu crois vraiment qu'ils vont m'autoriser à prendre l'avion ?! » Je ne peux m'empêcher de penser qu'il cherche seulement à m'éloigner de lui. « Tu bosses pour la mafia, Slavenko, si tu comptes m'envoyer aux USA chaque fois que la situation devient dangereuse autant que je retourne vivre là-bas. »

"J'espère bien" Je pince les lèvres, frustré de ne pas déjà avoir pu voir Camenko. Mais je sais bien à quoi il est occupé en ce moment, je sais pour Maggy et je ne suis pas con. Mon frère me trop ressemble en cela. Je ne sais pas de qui on a hérité cette capacité à s'attacher si férocement. Surement pas de Jelenko.

Je ne m'attends pas à ce qu'elle saute de joie mais j'aurais aimé qu'elle ait l'air au moins d'y réfléchir. J'arbore un air morose et grave en répondant, mortellement sérieux. "J'en sais rien, en jet privé p'tre que c'est possible... Je cherche une solution pour que tu sois à l'abri, justement parce que tu ne vas pas pouvoir bouger. C'est sérieux Nina, je n'ai aucune idée de ce qui s'est passé, ni ça peut nous retomber sur le coin de la gueule, et j'suis pas convaincu que ce soit pas toi qui était visée." je dépose mon sac et le reste de nourriture, essuie mes mains sur mon froc avant de m'approcher de Nina pour prendre sa main. "C'est pas que j'ai envie de t'envoyer à l'autre bout du monde, srce, c'est juste...je veux que vous soyez en sécurité toi et le bébé. Tu comprends srce ? "

Je secoue la tête en même temps qu'il parle. Non seulement je suis sûre que ce n'est pas possible, mais en plus même si c'était le cas depuis quand est-ce qu'on a les moyens de se payer un jet privé ? « Si c'est vraiment moi qui suis visée tu crois franchement que c'est une bonne idée de m'envoyer sur un autre continent ? Les types qui me cherchent vont s'arrêter à la frontière ? » Je suis toujours convaincue qu'ils n'en avaient pas expressément après moi. Je ne vois pas ce que j'aurais pu faire, mais surtout à qui j'aurais pu le faire pour qu'on me veuille du mal à ce point. Cela dit si c'était vraiment le cas, alors ce serait même plus simple que je sois à NY, sans les Tigrovi pour me protéger !

Je fronce les sourcils, en essayant de calmer la colère qui commence déjà à gronder, quand il s'approche de moi, prend ma main dans la sienne. « Non. Je ne comprends pas comment tu peux me protéger si tu n'es pas avec moi. »

Je suis perturbé par les arguments de Nina. Sincèrement, la seule chose que je veux c'est qu'elle soit à l'abri. Peu importe où sauf que je n'ai pas le sentiment que je puisse la protéger à Sarajevo. Mais peut-être que je ne le peux nulle part. Cette pensée est très dérangeante. Je m'assombris en chipotant les doigts de Nina avant d'admettre à contrecœur. "Parce que j'ai pas l'impression de réussir à te protéger ici. Et si c'était pas toi, mais à cause de ma mafia comme tu dis ?" Je ne considère pas vraiment le Klan comme une mafia, c'est sans doute puéril mais à mes yeux notre but efface cet aspect ou en tout cas le fait passer en second plan, je nous ai toujours vu comme un groupe paramilitaire. Pourtant, Nina a raison, avec le temps nous sommes devenus bien plus une mafia qu'un groupe se battant pour son idéal. Nous ne faisons que satisfaire des politiques avides de pouvoir et d'argent, leur fournir leurs besoins, obtenir des faveurs en retour. Je cille et chasse cet accès de lucidité dérangeant.

Je passe une main embarrassée dans ma tignasse, avant de soupirer. "ok, de toute façon sans savoir ça sert à rien... " J'embrasse la main de Nina en me penchant dessus avant de me lever. "J'suis crevé, ça t'embête si je me couche ?" Je vais laver mes mains à la salle de bain, pisser un coup et après j'ôte mes grolles. J'installe le lit de camp au plus près de celui de Nina avant de m'allonger dessus. c'est spartiate, j'ai l'impression d'être sur une table d'autopsie sans dec'.

Je lui épargne la répétition de ce que je viens de dire : s'il ne parvient pas à me protéger ici, comment le pourrait-il là-bas ? Je suis extrêmement bornée sur le sujet, ça ne devrait plus le surprendre depuis le temps. « Je ne veux pas être séparée de toi. » On n'a eu que trop de malchance déjà dans notre vie pour que je n'imagine pas le pire. On ne sait pas combien de temps ça durerait, on ne mettra peut-être jamais la main sur le commanditaire, ou bien Slavenko se fera assassiner avant, à des milliers de kilomètres de l'endroit où je me trouverais.

Je soupire, abandonne sa main quand il s'éloigne pour aller se débarbouiller. Je ne supporte pas quand il avorte nos discussions de cette façon. Je repousse mes affaires, replie le pc portable que je pose plus loin pour libérer mon lit. Les sourcils froncés par la contrariété, je me tourne sur le flanc, face à lui. J'avais oublié à quel point dormir ensemble dans une chambre d'hôpital, ce n'est pas dormir ensemble. Il me manque la chaleur de sa peau, le contact de ses bras autour de moi, son souffle sur ma nuque, ses mains posées sur mon ventre. Il me manque alors qu'il est juste là, à quelques centimètres de moi, je n'ose pas imaginer la torture s'il m'envoyait à New-York. Je tends le bras vers lui pour chercher sa main, à défaut de pouvoir me blottir contre lui. « Je veux rester avec toi... » Je mords ma lèvre inférieure, ajoute un ton plus bas : « Molim te... »

Je suis sur le dos, mon bras valide replié sous ma tête, l'autre est allongé pour soulager la tension, mais quand Nina se tourne vers moi, je fais aussi un quart de tour vers elle malgré l'inconfort de la position. Je ne me faisais pas beaucoup d'espoir quant au refus de Nina mais peut-être avais-je l'espoir qu'elle veuille mettre le bébé en sécurité. Seulement cette dernière est si illusoire que son refus est logique. Je refuse seulement d'admettre à haute voix que je suis terrorisé et impuissant. Les deux sentiments s'alimentant dangereusement. Bien évidemment, je ne peux pas dire ça à Nina, elle subit déjà assez sans que j'aille la paniquer, et dans ces conditions, autant épargner mon ego.

Je tente me rapprocher comme je peux, en espérant que le trou entre les deux lits ne s'accentuent pas. Je pose ma main sur son épaule, que je caresse pour redescendre vers sa hanche. "c'est entendu srce moje. Je ferais sécuriser la maison" Oui, bien sur que je capitule, je ne peux pas faire autrement. Si j'étais sur que ce soit la solution pour la garder en vie, je le ferais, mais je ne peux même pas garantir que cela n'empirera pas les choses, la livrant à la merci de ceux qui voudraient s'en prendre à elle. "Ja volim te mon ange"

Ma poitrine se soulève d'une vague de soulagement, parce qu'il accepte que je reste ici. Soyons honnêtes, j'ai beau prétendre qu'on ne peut me forcer à rien, Slavenko aurait parfaitement les moyens physiques et humains de m'expédier de force aux USA s'il le voulait. Bon, ça signerait probablement la fin très prématuré de notre second mariage, mais il pourrait le faire ! « Je suis peut-être alitée mais je sais encore donner des ordres, tu sais ? Tu oublies les talents de ta femme, je peux faire de notre maison la baraque la plus surveillée de Bosnie en moins de 24h. » Je connais parfaitement le matériel à installer, et si on se procure le matos en question, et un peu de main-d'oeuvre pour l'installer, je peux transformer la villa en véritable forteresse technologique. Bon, j'irais pas poser des mines pour empêcher les gens d'entrée, mais on pourra surveiller toutes les entrées et sorties en continu. Si ça le rassure, s'il pense que c'est nécessaire, c'est faisable.

Je prends sa main dans la mienne, la porte à ma bouche pour en embrasser le dos. « Je serais prudente moja duša, repose-toi... » Mes doigts noués aux siens, je ferme les yeux, prête à trouver le sommeil moi aussi.