Following the map that leads to you - Yusie

Le baiser est chaud et Elsie n’hésite pas un instant à se joindre à la danse que ma langue lui propose. Pour une fois, et ça fait bien longtemps que ce n’était pas arrivé, je sens mon coeur jusque dans le fond de ma gorge, cognant bruyamment contre mes côtes tandis que la rousse se hisse un peu plus vers moi. Je n’ose pas encore déloger ma main de sa mâchoire pour la poser sur une autre partie de son corps mais par contre, elle se glisse volontiers contre sa nuque que j’appuie légèrement quand commence à bouillir dans mon ventre un feu ardent difficilement gérable.

Je suis presque déçu quand son visage s’éloigne du mien mais ma main ne la pas quittée et un léger sourire s’esquisse sur mes lèvres sur lesquelles je passe ma langue, comme pour goûter à nouveau le goût de la sienne. Hum… On devrait faire un truc qui demande moins de concentration... Je déclare, la voix chaude et légèrement suave. Puis mon corps bouge naturellement vers Elsie et ma main qui était restée jusque là contre sa nuque descend le long de son échine pour rapprocher son buste du mien. Je récupère à nouveau ses lèvres dans un mouvement furtif et reprend le baiser avec plus de fougue encore, avide de ce sentiment de bien-être qui ne m’avait pas effleuré depuis des lustres.

Je ne sais pas par quoi je suis transporté mais cette chose fait visiblement de moi un pantin complètement avide des baisers et des caresses subtiles que nous nous octroyons avec Elsie. Le baiser me rend fébrile et je dois avouer ressentir tout un tas de tensions qui mettent mon ventre en vrac tout en augmentant le désir que j’éprouve pour la rousse. Les mots sortent instinctivement de ma bouche sans que mon cerveau n’y prête la moindre attention et sans que je ne puisse réfléchir aux conséquences que ça puisse avoir sur la suite des événements. Pourtant, je ne suis pas mécontent de constater que mon empressement est identique chez la rouquine et qu’en résulte notre position bien plus qu’équivoque.

Un fois mon corps surplombant le sien, je laisse volontiers une de mes mains glisser le long de sa hanche et m’hasarder sur sa cuisse dénudée. Sa peau est douce mais le passage de mes doigts créé une chair de poule difficilement réfrénable. Soudainement, déliant nos lèvres dans un mouvement lent et doux, je rouvre les yeux sur elle avec une hésitation au fond de la gorge, comme subitement envahis d’un sentiment trop étrange. Ma main revient sur elle en balayant son visage des quelques mèches de cheveux qui lui barrent la vue et avec précaution, j’ouvre les lèvres pour souffler: “Tu me plais vraiment Elsie...” Je ne sais pas ce que je cherche à lui faire comprendre à cet instant précis. Peut-être est-ce aussi pour me convaincre que si l’on couche ensemble là, maintenant, ça signifiera vraiment quelque chose, que ce ne sera pas juste un coup comme ça alors qu’on ne s’est vus que quelques fois et peut-être qu’en fait je ne fais que me rassurer moi-même.

La main d’Elsie et cette caresse me procure plus de sensation que n’importe quel baiser qui nous a lié jusqu’ici parce qu’au-delà du fait que nous commençons vraiment à nous chauffer l’un et l’autre, j’ai l’impression que ce geste a une valeur sentimentale plus élevée encore. Je n’arrive d’ailleurs pas à réfréner les pulsations rapides et douloureuses qui font vibrer ma poitrine et bientôt mon corps tout entier. J’ai fermé les yeux un peu plus longuement qu’un simple clignement à l’approche de sa main et quand je finis par rouvrir les yeux, nous nous remettons à nous embrasser et je crois y mettre encore plus de fougue maintenant.

Un frisson parcourt l'entièreté de mon corps quand les mains de la rousse remontent contre mon dos déjà frissonnant et dans un mouvement, je l’aide à retirer le t-shirt dont le frottement commençait d’ores et déjà à m’ennuyer. Reprenant le baiser sans attendre, je me laisse à remonter à mon tour le haut de la demoiselle pour finalement délier nos lèvres et le lui retirer complètement avec son aide. Sa peau désormais mise à nu, il m’est plus facile de la caresser mais, sous une impulsion et par le manque d’espace que nous avons sur ce canapé, je me décide à me redresser, emporter la rousse avec moi et la soulever jusque dans ma chambre, à quelques mètres à peine. Là, je finis par la déposer comme on déposerait un bébé dans son berceau, précautionneusement et avec toute la délicatesse que je peux fournir. J’ai eu le temps d’observer son corps, sa peau laiteuse et ses taches de rousseur qui parsèment son corps un peu plus loin que son visage et ce n’est qu’au moment de me réinstaller sur elle que je me rends compte de la tension qu’exerce mon pantalon sur mon entrejambe. Je me niche néanmoins au creux de son cou, abandonnant ses lèvres pour déposer des baisers en ligne droite jusqu’à la jonction de ses deux seins alors que ma main qui ne me sers pas à me maintenir glisse dans son dos pour dégrafer son soutien-gorge. Je ne me rends pas compte non plus de ma respiration qui s’est soudainement accélérée, de ma gorge qui s’assèche à mesure qu’on s’abandonne l’un à l’autre et je finis par déglutir quand les dentelles de la demoiselle se retrouvent dans ma main.
Il n’y a que peu de lumière, la porte ouverte de ma chambre nous permet d’avoir assez de clarté pour qu’on puisse nous distinguer dans le noir mais il fait assez sombre aussi pour respecter la pudeur de la rousse -si tenté qu’elle soit pudique-.
Mes gestes sont lents quand je m’attaque à sa jupe dont je descends la fermeture et quand cette dernière est en bas de ses chevilles, ce sont ses collants que je m’hasarde à retirer. Je suis un peu plus impatient depuis que j’ai conscience de tout le sang qui s’est agglutiné dans ma queue, quand tout ce que je ressens est la pression qui ne cherche qu’à s’évacuer de mon ventre. Je remonte malgré tout sur le corps échoué de la rousse, silencieux mais bruyant de par ma respiration, mes lèvres épousant la forme d’une de ses cuisses et mon souffle qui s’échoue inlassablement contre son épiderme épineux. J’ouvre les yeux sur sa culotte que je crois reconnaître assortie à son soutien-gorge plus tôt ôté et mes lèvres s’entrouvrent finalement pour laisser vaquer ma langue à chatouiller la lisière du tissu qui me sépare d’Elsie. Je ne m’attarde pas encore, préfère revenir à elle, déposer un baiser sur ses lèvres chaudes et attraper dans un geste doux la rondeur d’un de ses seins dont je caresse l’extrémité déjà pointue. Le baiser est fougueux, presque indécemment fougueux et je crois prendre un plaisir malsain à la laisser patienter un petit peu.

Je n’ai pas conscience réellement de la vitesse à laquelle mes gestes s'enchaînent et je n’ai pas du tout l’impression d’être rapide. Malgré tout, je dois bien avouer que la pression que je ressens m’oblige à prendre les devants et de ce fait, débarrasser la jeune femme de ces vêtements qui ne nous servent, de toute façon, plus à rien.

Si je suis empressé, j’essaie néanmoins de ne pas le faire ressentir à la rousse et c’est la raison pour laquelle en me ressaisissant, je reviens vers sa bouche pour lui asséner un baiser langoureux doué d’une fougue sans pareille alors que les mains féminines s’acheminent vers mon pantalon. J’ai un frisson au contact de ses doigts contre mon ventre et si je n’ai pas encore repris mon souffle, je suis clairement en train de le perdre contre ses lèvres, les yeux fermés. Un peu d’aide lui suffit pour que le vêtement prenne le même chemin que les autres et je finis par dissoudre la distance entre nous pour venir me coller à elle, la chaleur de nos corps se mélangeant étrangement. Je suis parfaitement à l’aise avec la manière dont il faut que je m’y prenne, l’habitude étant forcément là, mais je dois avouer qu’une pointe d’appréhension se mêle à tous ces sentiments, rendant mon ventre davantage noué.

Pendant la course effrénée dans laquelle nos langues se sont lancées, nos bassins se frôlent sans vraiment se toucher tout à fait et je nous libère finalement, reprenant mon souffle presque sur ses lèvres en rouvrant les yeux dans les siens et même si je n’y vois qu’une lueur, c’est bien assez pour m’électriser tout entier. Je niche mon visage dans son cou, baise et mordille sa peau par moment tandis que je me décide enfin à m’appuyer contre elle, le bassin contre le sien, ma virilité pressée complètement contre la moiteur qui se dégage du dernier tissus qui recouvre Elsie. Je soupire presque contre son oreille, glisse une main en longeant son corps, effleurant sa poitrine puis son ventre pour finalement me laisser un espace afin de glisser mes doigts sous l’élastique du sous-vêtement. Il ne me faut pas longtemps pour que je trouve le chemin vers son intimité complètement mouillée que j’explore vivement, relevant le visage vers le sien, juste pour vérifier l’état dans lequel Elsie est. Je reprends finalement ses lèvres que j’attaque d’assaut en même temps que mes doigts s’enfoncent dans ses chairs plutôt ouvertes, bougeant agilement mais doucement en elle. J’étouffe mes soupirs, reprends mon souffle par moment et réfrène mon envie d’arracher ce tissus nous séparant pour me planter en elle aussi vite que mon coeur bat.

J’avais bien évidemment songé à ce que la soirée prenne cette tournure et je ne peux pas dire que ça ne me plaît pas, bien au contraire. Du coup, j’ai bien trop conscience de la boîte de capotes qui est logée dans un tiroir de la table de nuit et qui m’appelle depuis que je sais qu’Elsie est bel et bien sur la même longueur d’ondes, depuis que mes doigts trempent littéralement en elle. Je garde le contact avec sa bouche, m’efforce d’embrasser la rousse bien que ma respiration s’essouffle, comme si l’acte en avait besoin pour devenir plus sincère, plus vrai. Pourtant, je finis par rouvrir les yeux, défaire mes lèvres des siennes qui, je dois l’avouer, me manquent déjà, et passe ma langue entraînée sur les muqueuses détrempées. Mon regard essaie de capter celui d’Elsie sans vraiment y parvenir, l’obscurité me privant de la contemplation que je pourrais faire de son visage. Je sais pourtant que nous nous échangeons un regard, les lèvres entrouvertes, la cage thoracique se soulevant au même rythme et je finis par serrer les dents en sentant l’emprise de sa main autour de mon entrejambe qui tressaille déjà d’impatience. Mes doigts se retirent délicatement d’elle, reposant mon avant-bras à côté de son visage tout en resserrant mon poing, je tente de reprendre mon souffle, quasiment électrisé par la sensation que me procure les gestes de la rousse.

Quand l’attente devient trop insupportable, que mon ventre s’est assez noué pour avoir à peine de quoi respirer et qu’Elsie se tend un peu plus vers moi, je finis par allonger le bras vers la table de nuit et attraper le paquet de préservatifs dans le tiroir. Avant de me redresser, j’échoue un baiser hasardement sur un coin de son front et finis par me parer du morceau de latex que je glisse moi-même sur ma queue. Je retire mon boxer avant de m’emparer du dernier tissu qui recouvre la rousse, mon corps suivant les courbes du sien jusqu’à ce que ses dentelles prennent le même chemin que les autres habits et en remontant sur ses jambes, je finis par glisser mes lèvres juste au dessus de son intimité, faisant languir par la même occasion Elsie.
Surplombant son corps, j’ai un geste presque hâtif envers sa cuisse que je cale par dessus l’épine d’une de mes hanches et me jette littéralement sur ses lèvres que je dévore à pleine bouche, perdant encore une fois ma respiration entre sa langue et la mienne. Mon bassin s’est instinctivement rapproché du sien dans une envie sulfureuse d’assouvir nos envies respectives et dans un mouvement rapide mais maîtrisé, je nous lie enfin avec un grondement enfoui au fond de ma gorge. J’ai attrapé une de ses mains pour la déposer juste à côté de son visage, noué mes doigts aux siens et calé mes impulsions sur un rythme lent mais assez puissant pour pouvoir commencer à entendre des soupirs bruyants venant de la rouquine. Nos bouches se sont naturellement lâchées, la tâche de rester ensemble devenue un peu trop compliquée et j’ai enfoui mon visage à proximité du sien, mon souffle accéléré s’échouant contre la peau de son cou.
Les pensées s’envolent en même temps que les coups donnés et je m’égare, ne fait place qu’à la brûlure qui s’installe petit à petit dans l’ensemble de mon corps et les grondements que je retiens par les dents serrées.

La nuit ne me permet pas d’apercevoir le visage de la rousse, ni même d’appréhender les regards qu’elle doit certainement me lancer mais une sensation étrange remplace ce manque de visibilité, comme si je devinais facilement chaque mouvement, chaque expression qui se dessine sur ses lèvres ou sur ses joues que j’imagine rougies par nos chaleurs corporelles qui se mélangent. Mes mouvements sont d’un rythme constant, je n’ose pas encore accélérer la cadence, désirant avant tout qu’Elsie s’habitue à moi et à mon corps alors que ses mains dans le bas de mon dos me feraient presque frémir d’excitation. Je ne lâche pas sa main dont les doigts sont noués aux miens et j’ai comme l’impression que par ce geste, tout l’acte a une signification bien différente, mêlant à nos soupirs des sentiments naissants.

Emporté par la vague de plaisir et toujours enfoui en elle, mes vas et viens deviennent plus secs, plus hâtifs aussi. Puis je finis par laisser la main de la rouquine afin de glisser la mienne sur sa seconde jambe et comme l’autre, la remonter par dessus ma hanche. Je ne fais que suivre les gémissements et les suppliques tues par Elsie pour contrôler mes mouvements et même si la sueur roule le long de ma colonne vertébrale, que le plaisir risque de me faucher d’un instant à l’autre, j’attends de sentir ses chairs se rétracter autour de mon sexe, d’entendre sa voix augmenter involontairement et percevoir son corps se contracter fébrilement sous le mien. Le lit craque, la tête de lit cogne contre le mur et tous ces bruits se mélangent à nos grondements, nos soupirs et ses gémissements, faisant de l’instant un véritable concert.

Elle finit par gémir un peu plus fort tandis que je ne peux plus me retenir, me vidant littéralement dans le latex de la capote et petit à petit je m’arrête, relâchant absolument tous les muscles de mon corps pour laisser place au plaisir provoqué par l’orgasme. Mon visage s’échoue contre la joue d’Elsie et mon souffle ricoche contre sa peau un instant, le temps que je me reprenne, que mon esprit retrouve toutes ses capacités. Une fois revenu sur terre, je me retire d’elle avec une certaine douceur pour me mettre sur le côté et me débarrasser de la capote dont je m’occuperai plus tard puis me contente de m’étaler à côté, complètement repu. J’attire la rousse à moi en passant le bras derrière elle et glisse un baiser dans ses cheveux. Hésitant, je demande: Ça va ?T’es… Enfin, t’as… Eu le temps de…? Je me sens ridicule mais pour une fois, je me préoccupe réellement du plaisir de la fille qui m’accompagne ce soir.

La tension qui assaille mon corps finit par redescendre doucement dès qu’Elsie trouve place contre moi et je resserre notre étreinte quand je me mets à parler maladroitement. Je ne suis pas sûr, finalement, qu’épancher mes questionnements juste après avoir fait l’amour était une bonne idée et le silence pesant qui nous englobe après me conforte bien dans cette pensée. Je retiens mon souffle en réfléchissant aux mots que je vais utiliser pour m’excuser et reprends finalement ma respiration quand Elsie se décide à briser le blanc. Dieu merci. Un sourire léger se dessine sur mes lèvres dans l’obscurité et je réponds, secouant la tête: Désolé… C’était pas… Enfin, bref.

Je laisse mourir le malaise en gardant la rouquine contre moi, passant de temps en temps ma main sur son bras en caresse voluptueuse. Tu restes dormir, hum ? Ma voix est faible mais on peut y déceler une pointe d’espoir et sincèrement, ça fait tellement longtemps que je n’ai pas partagé mes draps avec quelqu’un qui compte vraiment que l’idée que la rousse reste ici me donne une drôle d’impression, comme si j’étais un adolescent qui allait accueillir sa copine pour la première fois. Je ne lui laisse cependant pas le temps de répondre puisque j’ajoute: Je sais faire des pancakes pas trop mauvais… Je sais qu’on avait dit que ce serait toi qui commencerait le concours mais on aura qu’à dire que ça compte pas. Je lui souris dans l’obscurité, mon corps se rafraîchissant petit à petit et je suis surpris de ne pas éprouver le besoin de fumer alors qu’il m’a toujours été nécessaire de le faire après l’amour.    

Il y a quelque chose de différent avec Elsie et c’est bien la première fois qu’il m’arrive d’être aussi perturbé par cette chose. Etrangement, je ressens le besoin que tout soit clair avec la rousse, que tout soit discuté et d’une manière, c’est un peu comme si je voulais faire les choses d’une manière assez parfaite pour qu’elle soit pleinement satisfaite. Alors quand elle accepte de rester pour la nuit et qu’en prime elle vient se blottir contre moi, la couverture nous enveloppant maintenant, je ne peux qu’être particulièrement heureux. Je ferai de mon mieux… Je souffle, refermant la prise de mes bras sur Elsie en posant ma joue contre le haut de son crâne. On est silencieux et honnêtement, je crois préférer cette option parce qu’on a l’air de beaucoup mieux s’exprimer par les gestes que par les paroles, ou en tout cas, pour ma part !

La sensation du corps nu de la rouquine contre moi continue de m’émoustiller malgré le fait que j’ai clairement joui quelques minutes plus tôt et j’entends ma poitrine s’ébranler des coups qu’elle reçoit un peu trop régulièrement. J’essaie tant bien que mal de garder les esprits clairs et tente aussi de profiter de l’instant en m’appropriant la douceur de la peau d’Elsie, son odeur et la chaleur qu’elle dégage. Je remonte la couette sur ses épaules et embrasse un coin de son crâne avant de soupirer de bien-être, repositionnant quelque peu le coussin sous ma nuque. El’... Tu veux pas me parler un peu de toi ? A part si t’avais prévu de dormir tout de suite…

Un sourire passe sur mes lèvres et je me tourne davantage vers Elsie quand la conversation reprend. Je sais d’avance que je connais assez de choses sur la rousse pour prétendre la connaître un minimum mais j’ai l’impression que tout ce que je sais est entouré de trous noirs que j'ai besoin de combler. J’émets un léger rire et passe un bras derrière ma tête pour me mettre à l’aise. Oui tu m’en as déjà parlé… Je voulais savoir les choses que je sais pas encore. Parle moi de ton enfance par exemple ? Je pince les lèvres et souris dans la pénombre en tournant le visage vers la rouquine. Tiens, j’aimerais bien voir à quoi tu ressemblais, petite. Je suis persuadé qu’elle a toujours eu ce visage un peu rond et ces traits fins qui font d’elle cette poupée qui me rend vraiment sensible aux taches de rousseurs alors que je ne prêtais jamais attention aux rousses, avant. Le problème avec ce genre de questions assez personnelles, c’est qu’elles sont très facilement retournables et que si Elsie se mettait à me poser des questions sur mon enfance, je serais certainement bien plus embarrassé qu’elle pour y répondre.

Il n’y a que mon envie d’en apprendre plus sur la jeune femme qui dicte mes paroles et bien que mon ton semble sûrement un peu trop sérieux, la conversation se veut plutôt détendue. Je sais pas pourquoi mais je m’en doutais. Un sourire fleurit sur mes lèvres et je tourne la tête vers Elsie, attentif, sincèrement désireux de savoir tout d’elle.
Et soudainement, je m’en veux d’avoir voulu trop en savoir parce qu’il fallait bien qu’elle me retourne la question et qu’on en vienne à moi. Les personnes qui me connaissent savent à quel point il m’est difficile de parler de mon enfance et de ma vie en général mais étrangement, je ne cherche pas à dévier le sujet avec la rousse parce que je me sens assez à l’aise avec elle pour lui dévoiler le peu qu’il y a à dévoiler. J’étais pas un enfant sage, ça c’est sûr. J’étais très proche de ma mère: du coup, j’étais un ange avec elle mais en dehors, c’était pas ça du tout. Puis mon père a toujours été violent aussi. Petit, je crois que ça me frustrait de ne rien pouvoir faire alors en général je déversais ma colère à l’école, j’étais le caïd, tu vois ? Un petit rire cassé se bloque au fond de ma gorge avant que je ne soupire un coup. J’ai une photo au salon, je sais pas si t’as fait attention. Ma mère me coiffait au bol, c’était ridicule, putain… Que je lâche, peut-être pour contrebalancer le fait que j’ai rien d’autre de moins triste à lui raconter.

Ma vie n’a jamais été très facile, c’est une certitude et je relativise aux mots réconfortants d’Elsie parce qu’elle n’a pas tort; je crois m’en sortir assez bien. En y réfléchissant, je suis même assez chanceux parce que je me suis éloigné des drogues sans d’énormes difficultés comme certains que je connaissais quand j’étais toujours au Bron et la mort de ma mère a certainement été le plus gros déclic pour que je puisse arrêter les frais. Oui, ça aurait pu être pire. Que je souffle en soupirant quelque peu, regrettant amèrement ce que j’ai fait subir à mon corps durant des années entières et que je tais pour le moment à la rousse qui doit sûrement se douter de mes frasques puisque si je lui ai caché mon passif de dealer, elle sait cependant pour l’hépatite.

Même si ce n’est que demain, je me rends compte seulement lorsqu’Elsie mentionne le fait de s’en aller que cette idée m’est désagréable et qu’il faudrait sans doute que je pense à profiter de l’instant présent au lieu de ressasser le passé sans cesse. Tu me diras ce que t’en penses… Et merci. J’ai un sourire à son attention. Non, pas vraiment. J’étais plutôt du genre à traîner dans la rue avec ceux de mon âge après l’école. J’ai jamais vraiment été attiré par le sport de toute façon. Mais j’ai trouvé une salle où je pourrais faire de la boxe, pas loin, j’crois que j’ai besoin de me défouler. J’imagine très bien Elsie faire de la gymnastique ou un peu de danse quand elle était plus jeune ou alors c’est la manière qu’elle a de me regarder qui me renvoie un peu à Eden et qui me joue ces tours-là. Et toi ? Tu faisais quelque chose ?

Je crois que la boxe sera un très bon moyen d’évacuer toutes sortes d’émotions qui tourbillonnent en moi depuis bien trop longtemps et l’idée de frapper, même si ce n’est qu’un sac, me libérera sûrement de certains démons récalcitrants. Je souris au commentaire d’Elsie, dont l’idée de me recoudre m’est évidemment passé par la tête bien avant qu’elle ne m’en parle. Crois moi, tu seras la première que j’appelle si j’ai besoin de soins. Je resserre mon étreinte pour coller la jeune femme encore plus à moi et un soupir de bien-être sort machinalement de ma bouche.


Alors tu dois pas avaler grand chose pour avoir le corps que tu as… J’étais persuadé qu’Elsie aurait eu une activité physique. Je la voyais très bien faire de la course à pied ou du cardio régulièrement. T’as l’air tellement… Altruiste, c’est rare de voir des gens comme toi, tu sais. Me reviennent en tête des images du Bronx et je ne me rappelle pas d’avoir jamais rencontré quelqu’un d’aussi gentille que la rousse. Oh, Eden l’était mais c’était bien différent. Quand j’étais au Bronx, j’ai côtoyé tellement de personnes malhonnêtes et égoïstes que j’avais l’impression de devoir me méfier de tout le monde. Bizarrement, je me suis jamais méfié de toi, j’devrais peut-être ? Je souris dans le noir, d’humeur à plaisanter.

Je me rends compte un peu tardivement de mes paroles peut-être un peu déplacées et je me ravise, serre les lèvres avant d’ajouter: Oui, je voulais justement souligner que t’es mince… Mes doigts longent une de ses clavicule que je ne vois que par la présence du faible faisceau lumineux provenant du couloir et Elsie a beau être aussi fine qu’une feuille à papier, les os apparents et la peau translucide, elle me plaît plus que de raison.

Le sujet meurt doucement et j’écoute Elsie, pendu à moitié à ses lèvres, les mains sur sa peau comme si je voulais m’y attacher pour le restant de mes jours. Pour plein de gens, j’crois que ça leur viendrait même pas à l’esprit, tu sais. J’ai arrêté d’avoir foi en l’humanité il y a un moment de toute façon. C’est quand même différent ici, je trouve. En tout cas, je me sens mieux ici. Il y a aussi le fait que l’Amérique à elle seule me rappelle ma mère et les choses atroces qu’elle a vécu et mon incapacité à faire quoi que ce soit pour éviter ça. Ce changement de vie est incroyablement bénéfique pour moi et notre rencontre, avec Elsie, me rend encore plus enthousiaste à l’idée de vivre définitivement ici.

Je réfléchis un instant aux raisons pour lesquelles Elsie devrait se méfier de moi et bizarrement, il y a beaucoup moins de choses qui me viennent à l’esprit que ce qu’il y aurait pu avoir il y a quelques années. Je t’aurais dit oui y’a quelques années mais plus du tout aujourd’hui. J’ai énormément changé depuis et je suis content de te rencontrer maintenant. Peut-être que la rousse fera partie de ce changement et même si ça ne fait que quelques fois que nous nous voyions, je sais qu’elle m’aidera dans ce sens.