À défaut de vivre on peut mourir ensemble - Slavina

Le boulot pépère que j'avais choisi pour pouvoir être à la maison tous les jours s'étant révélé pas si pépère que ça, et m'ayant attiré trop d'ennuis, j'ai repris les missions sur le rythme chaotique propre à ce job. Des soirs, des journées, parfois deux jours d'affilée mais j'essaye d'éviter autant que possible. J'ai fini le job de la nuit dernière ce matin, et quand je suis rentré, Nina partait au boulot. Je lui ai promis de passer la chercher ce soir. J'ai dormi une partie de la journée, avant de passer vite fait au QG pour faire mon rapport.

En entrant dans le bâtiment où bosse Nina, j'ai une boule d'appréhension que je m’efforce de refouler. Depuis que j'ai trouvé le dossier de divorce dans son bureau, je déteste cet endroit. Je sais bien que c'est ridicule. Je reste d'ailleurs à la porte, main dans les poches, en attendant qu'elle ait fini de ranger et qu'elle me rejoigne. Je souris de sa remarque de princesse. "Tu m'attendais plus tôt ? Je voulais être sur que t'ai fini pour t'avoir tout à moi" Je jette un coup d’œil autour de moi en me moquant d'un air détaché et gentiment railleur "Et j'ai l'impression que j'arrive trop tôt en fait !"

​Il ne rentre pas vraiment dans le jeu de ma plaisanterie et je hausse finalement les épaules dans un sourire indulgent. Non, t'en fais pas. Je savais pas trop à quelle heure tu finissais de bosser de toute façon. Bien-sûr que ses horaires sont bien moins agréables pour notre vie de couple depuis qu'il ne bosse plus pour Ymke. Mais vous savez ce qui est beaucoup plus agréable pour notre vie de couple ? Le fait qu'il ne bosse plus pour Ymke ! Si le voir moins est le prix à payer pour ne plus craindre qu'il couche avec sa boss quand on n'est pas ensemble, très honnêtement je pense que ça vaut le coup... Après maintenant que je suis ma propre patronne, je fais de mon mieux pour faire en sorte que mes horaires matchent avec les siens, je m'organise un peu comme je veux. J'ai seulement des impératifs auxquels je ne peux déroger et qui ne collent pas toujours, des réunions ou des soirées, par exemple.

Je me lève et m'approche, glisse mes bras autour de son cou dans un geste confondant de naturel. Non, tu arrives jamais trop tôt, moja duša. Je suis très loin d'imaginer qu'il n'aime pas cet endroit figurez-vous et je ne me presse donc pas particulièrement pour partir. Non, j'ai plus urgent à faire d'abord. Je me hisse sur la pointe de mes escarpins pour réclamer le baiser auquel j'ai songé toute la journée. On s'est à peine croisés en coup de vent ce matin, sans avoir même le temps pour un câlin, et on ne s'est pas non plus vus hier... Autant dire qu'il m'a manqué. Beaucoup. Je le dis seulement moins facilement qu'autrefois. Je me serre contre lui, abandonnant les airs de femme d'affaires que je prends la journée dès que je retrouve le confort de ses bras. Je suis bien trop vulnérable quand il est là pour vouloir tenter de faire illusion. Aussitôt je m'adoucis, cherche sa chaleur, frotte mon nez contre son cou dans un geste câlin. Je voulais qu'on aille manger dehors mais j'ai peur qu'il soit un peu tard pour ça... On rentre à la maison ?​

En femme d'affaires Nina est plutôt impressionnante si vous voulez mon avis avec son air sérieux, et je n'ai pas vraiment le cœur de jouer, elle me semble inaccessible. Les locaux sont neufs, de ces bâtiments poussés en centre ville pour les rares investisseurs étrangers et je dénote dans ma tenue noire de boulot avec mon treillis grossier. Il y a peu d'endroit où je ne me sens pas à ma place à Sarajevo mais celui-ci en fait partie. Pourtant tout s'efface quand elle me rejoint et me sourit. Mon regard accroche le sien avec cette avidité silencieuse qui témoigne de mon besoin grandissant d'elle, ce gouffre impossible à combler. Son visage se fait plus doux, et son air câlin me fait fondre, le cœur battant brusquement plus sourdement. Mes bras se referment sur elle, et je respire son odeur qui me fait tourner la tête. Son baiser accélère le sans dans mes veines, me donne une envie affamée d'elle à me nouer le ventre. Mes mains glissent du bas de son dos à la rondeur de ses fesses. "Tard ? Je suis sur qu'on peut encore trouver un restaurant...ou bien, on passe chercher le japonais que tu aimes pour qu'on mange à la maison." Je penche imperceptiblement la tête, offrant ma gorge à ses baisers mutins alors que subrepticement, je fais remonter sa jupe de quelques centimètres sur ses hanches, par fantasme surtout parce qu'elle n'est pas assez courte pour que je dévoile quoique ce soit de cette façon.

​La façon, qui pourrait pourtant presque sembler innocente, dont ses mains glissent le long de mon corps me fait frémir dangereusement. Je me colle un peu plus fort contre lui, remonte le bout de mes doigts dans ses cheveux qui ont un peu repoussé depuis qu'il ne travaille plus en tant que garde du corps... Mais je les lui recouperais. Si j'aime pouvoir m'y accrocher, je dois aussi admettre que cette nouvelle coupe lui allait superbement. Comme il penche la tête sur le côté, je glisse mes lèvres plus haut sur sa gorge, remonte vers l'angle de sa mâchoire que je mordille dans des baisers joueurs. Japonais, oui, c'est une bonne idée... Je ne suis soudain plus très sûre de vouloir affronter le monde extérieur en allant au restaurant avec lui. Ça fait bien trop longtemps qu'on n'a pas eu plusieurs heures rien que pour nous, et le manque de lui se fait brusquement sentir plus fort maintenant que je suis dans ses bras. ​

Pour autant je ne suis pas non plus très sûre de pouvoir -ou de vouloir- attendre d'être rentrée à la maison. Je relâche sa nuque pour glisser mes mains dans son dos, passant sous ses vêtements pour toucher sa peau comme j'aime le faire quand je suis en manque de son contact, de sa chaleur. C'est-à-dire plus ou moins tout le temps, finalement. Je passe la pointe de ma langue sur sa peau frissonnante, glisse mes mains dans les poches arrières de son treillis en pressant ses fesses contre mes paumes. C'était long sans toi... J'avoue finalement tout bas.

Je ne prenais pas de risque en proposant le japonais puisque Nina adore ça d'autant plus qu'il n'y a qu'un seul restaurant digne de ce nom à Sarajevo. Comme j'ai envie de lui faire plaisir tout en l'attirant à la maison, les sushis était le meilleur plan que j'ai pu trouver. Parce que moi non plus je ne pense pas survivre à une soirée dehors. Mon regard s'assombrit à la mention du manque, je n'aime pas avouer qu'elle me manque, parce que c'est comme un aveu de faiblesse. Pourtant j'opine à sa remarque, "oui c'était long..." Je n'ose pas ajouter que je n'aime pas quand nos agendas ne concordent pas, quand je bosse la nuit et elle le jour, quand on passe trop de temps loin de l'autre. Je n'aime pas ça mais ce n'est ni sa faute, ni la mienne et je ne voudrais pas que cela provoque culpabilité ou à l'inverse reproches. Pas quand mes doigts tiraillent gentiment sur le tissu de sa jupe pour continuer à le remonter.

Le contact de sa langue sur mon cou me fait gronder tout bas, une sorte de ronronnement de gorge animal et exigeant, destiné à l'encourager sans doute. Je crève d'envie de ses mains sur ma peau, partout, de sa paume s'enroulant autour de ma queue, et je me retrouve à la pousser contre le mur, avec cette brusquerie qui m'est propre pour l'embrasser en la coinçant entre moi et la cloison, à ma merci. Fébrilement, je défais un à un les boutons de son chemisier. Elle est tellement bandante dans sa tenue de femme d'affaires.

​Un frémissement de joie mêlée de satisfaction me traverse le corps quand il me pousse en arrière jusqu'à ce que mon dos heurte le jour. Je suis non seulement ravie que mon petit manège ait fonctionné, mais par dessus tout je suis soulagée de constater que je sais encore lui faire rendre les armes sans avoir besoin d'essayer trop fort... J'ai bien vu lorsqu'il est arrivé qu'il était prêt à repartir tout de suite, il ne comptait au départ même pas réellement entrer dans le bureau ! J'aurais été déçue, et blessée dans mon ego, qu'il résiste à mon numéro de charme -encore gentillet je l'admets- pour tourner les talons malgré tout. Je ne m'attends pas à ce qu'il dise explicitement que je lui ai manqué. Il ne le dit jamais, et c'est sans doute la raison pour laquelle je suis si frileuse à le dire moi-même... Je me contente de ce qu'il me donne, même s'il est avare de ce genre de déclarations, je n'oserais pas me plaindre en admettant que ça me manque, ça n'aurait aucune valeur si ce n'était pas naturel.

Sa bouche fond plus franchement sur la mienne et je m'accroche à son treillis en me cambrant pour lui offrir ma poitrine, qu'il s'emploie à libérer impatiemment. Mes seins, oppressés par un carcan de dentelle noire, se dressent malgré tout à travers le sous-vêtement comme pour réclamer ses attentions. Je ne me sens pas l'énergie d'être patiente et l'endroit n'est de toute façon pas propice aux préliminaires, alors je m'attaque à la fermeture éclair de son treillis, qui ne me résiste pas longtemps. Je défais ensuite la fermeture éclair de ma jupe pour pouvoir la faire glisser le long de mes jambes, elle est bien trop moulante pour qu'il puisse espérer la remonter sur mes hanches.

Je ne sais pas être patient, je n'ai jamais su mais c'est mille fois plus vrai avec Nina. Pourtant, de temps en temps, elle essaye de m'apprendre la patience, le jeu lent, mais alors seulement si on est à la maison ou dans un lieu propice, nos jeux à l'hôtel, dans des endroits de luxe. Unbouton cède trop fort, vole sur le sol dans un cliquetis que j'ignore. Ma tête se fourre avec délice entre les seins gainés de leur carcan de dentelle. La peau claire, si belle, si laiteuse, tranche avec le tissu. Je tire sur le chemisier alors que je sens que Nina défait ma ceinture. Le bruit des fermetures éclairs fait grimper l'excitation, un simple petit bruit. Ma langue passe sur la chair d'albâtre et un gémissement affamé meurt dans ma gorge. Je croque la chair offerte, l'aspire en me débarrassant du soutien-gorge qui m'agace. Je me moque des fioritures, Nina n'est jamais plus belle que nue.

La jupe est tombée au sol et mon corps s'écrase sur celui presque nu de Nina. Je couine parce que je ne sens pas sa peau, et Nina m'ôte mon pull, mon tee-shirt avant qu'enfin ses seins s'écrasent chauds et doux contre mon torse. Je deviens fou à la douceur de sa peau qui me fait frissonner. Je plaque une main possessive sur son cou, relève sa jambe sur ma hanche, écarte les tissus qui nous séparent - dont la culotte en dentelle qui ne me résiste pas - encore pour une prise de possession brutale. Un cri étouffé, rauque, passe mes lèvres quand enfin je trouve ma place et imprime de brusque va-et-vient qui font très vite monter le désir.

​Mes vêtements fuient la scène, rapidement suivis par les siens qui ne font pas le poids face à notre impatience. La fébrilité qui m'a saisie s'amplifie sous ses caresses possessives et brusques, et mon rythme cardiaque s'emballe gravement quand son corps s'écrase contre le mien. Des images d'une précision redoutable flashent dans mon esprit, sa bouche, ses mains partout sur ma peau, ses gémissements contre ma gorge, ses dents qui marquent ma chair trop blanche. Je m'accroche à lui dans un couinement, soudain affolée qu'il ne soit pas déjà en moi, tout en maudissant intérieurement le collant qui le tient loin de ma peau. Je n'ai pas mis de bas aujourd'hui, il fait trop froid ici pour que je m'y amuse si je ne suis pas avec lui. Heureusement le tissu ne résiste pas à son assaut et collant et culotte craquent de concert quand il tire dessus pour se frayer un chemin entre mes cuisses, se logeant dans mon ventre d'un mouvement sec qui me fait gémir.

La position pourrait difficilement être plus inconfortable. Malgré mes talons il reste beaucoup plus grand que moi et je dois me hisser sur la pointe des pieds tandis que lui plie les genoux pour être à la bonne hauteur. Malgré tout je ne m'éloignerais de lui pour rien au monde. Je ne peux cependant pas bouger beaucoup, et je me contente de mordre sa peau tandis qu'il me pilonne, vite et fort. L'orgasme nous fauche à l'unisson au bout de trois minutes à tout casser et j'exulte dans un cri, le corps secoué de tremblements que je peine à soutenir ainsi perchée sur mes échasses.

L'orgasme me fauche rapidement, mon esprit vole en éclat dans le plaisir brut. J'ai une main entre ses fesses, la soulevant à demi, l'autre sur sa gorge et ma bouche partout sur ses seins, la parsemant de suçons haletants, bleus. Je ne la repose que lorsque les spasmes qui m'agitent se calme, mais je ne la relâche pas pour autant. Bien au contraire je la serre à l'étouffer contre moi, venant chercher un langoureux baiser, plus dous, très lent. Je souffle, la voix cassée par l'émotion qui a explosé dans ma poitrine volim te, volim te, ti si moj andjeo, moje zlato malo...

Je flatte son corps doux, ses fesses, le bas de son dos, bécote ses épaules et son cou. Je hume l'odeur de sexe qui nous entoure, je n'ai jamais rien tant aimé que nos odeurs mêlées. J'aime déjà beaucoup plus son bureau que tout à l'heure. Je peine à me séparer de sa peau, je n'en ai pas envie, c'est devenu un vrai problème de baiser à l'extérieur, je n'en ai jamais assez, je veux plus que ces étreintes à la sauvette qui pourtant m'affolent et me plaisent immensément. "On devrait rester ici et commander les sushi...on rentrera après manger..."

​Je crois que je frôle la crampe tout le temps qu'il met à me reposer enfin au sol, mais je ne dis rien, bien trop heureuse de ses attouchements délicieux auxquels j'ai aspiré toute la journée... Et toute la nuit passée. Je suis rentrée tard mais lui n'est pas rentré du tout, pas avant le matin en tout cas, et j'ai rêvé de sa peau durant des heures, incapable de dormir réellement tant j'avais envie, besoin de lui. Ses baisers me liquéfient et je tremble contre lui, de plaisir qui peine à s'étioler. Très souvent dans ces moments-là, je songe au temps que j'ai passé loin de lui, à toutes les fois où j'ai espéré entendre encore ces mots-là. J'en ai la gorge nouée par l'émotion et j'enfouis mon visage dans le creux de son cou en soupirant de bien-être.

Sa proposition a beau être tentante, je secoue la tête. Non, non, molim te, je veux rentrer chez nous, j'ai besoin de plus que ça... Et je ne parle pas de sexe, contrairement à ce qu'on pourrait croire ! Je n'aspire qu'à me vautrer dans notre canapé, devant la cheminée, pour profiter de sa peau jusqu'à l'épuisement. Tant qu'on est ici, on n'a pas la nuit devant nous puisqu'il nous faut rentrer. Je l'embrasse longuement pour avoir gain de cause et lorsqu'il me relâche enfin, je l'embrasse encore, avant de m'écarter pour me rhabiller. Déjà, je finis de me déshabiller en fait, parce que je retire mon collant complètement filé et me débarrasse de ma culotte déchirée. Alors seulement je remets ma jupe et mon chemisier, que je ne peux même pas boutonner jusqu'en haut parce qu'il a pété un bouton. J'espère que t'es pas garé loin...

Son corps chaud et câlin ne me donne pas envie de quitter la pièce et je couine de frustration quand elle me refuse de rester ici mais je capitule à son désir, bien sur. Je me rhabille en silence en tâchant de reprendre mes esprits et d'éloigner les images crues qui me hantent encore. C'est terrible de faire l'amour - baiser serait plus juste comme mot - et de n'être que soulagé physiquement, d'être bien loin d'être rassasié. Je ramasse le bouton de Nina un peu plus loin sur le sol, l'empoche machinalement pour lui rendre plus tard.

"Non, je suis garé en face." Je ne suis jamais garé loin parce que je me gare mal s'il n'y a pas de place sans jamais payer mes amendes qui finissent dans le caniveau. Si un jour on saisit ma caisse, je n'aurais qu'à faire jouer des contacts ou graisser des pattes. Ou encore changer de bagnole, je m'en fous. J'attends Nina et quand elle a fini de se rajuster, on gagne la voiture. "On passe chercher des sushis ?" Parce que maintenant qu'on s'est de toute façon interrompus, autant prévoir notre pitance. Je n'ai pas si faim que ça - décalé, j'ai mangé au QG cet après-midi - mais tout à l'heure j'aurais sans doute les crocs. sur le trajet j'allume une clope. A cette heure, il ne faut pas plus de dix minutes pour arriver chez le jap'. "assortiment de sushis ?"

Je peux au moins enfiler un manteau long par dessus mes fringues encore débraillés. Outre le fait que ça me protégera un peu du froid, je n'ai pas non plus très envie de me balader dans les rues de Sarajevo à moitié à poil, Slavenko a beau être avec moi, je crois que ce serait vraiment tenter le diable... On sort ensemble de l'agence que je prends le temps de fermer à clé, et je m'engouffre dans sa voiture en claquant des dents. J'admets que l'absence de collants se fait douloureusement ressentir et je note mentalement de laisser une tenue de rechange dans mon bureau pour les prochaines fois. Dans la voiture, je reste contre son bras, ma joue posée contre lui, ma main quelque part sur son ventre parce que moi aussi je regrette d'avoir rompu le contact. Mais on sera bien mieux chez nous, au chaud et confortablement installés.

Le japonais est encore ouvert mais il n'y a pas grand monde et je profite de cette solitude relative pour me glisser entre les bras du slave. Je sais bien que les effusions publiques le gênent à Sarajevo mais je me sens d'humeur tactile et en plus de ça, je dois avouer que la façon qu'il avait de me coller constamment me manque. Je m'entoure de ses bras, me niche contre son torse tout en choisissant les sushis que je veux commander, et j'essaie de me tenir tranquille pendant qu'on nous prépare la commande. C'est un peu long, à tel point que je regrette presque qu'on ne soit pas rentrés directement, pour ce qu'on va sans doute manger de toute façon... On aurait pu faire des pâtes ! La voiture est encore un peu chaude lorsqu'on la prend pour rentrer enfin, mais je cherche la chaleur de Slavenko malgré tout. Je suis distraite, pensive et silencieuse, et je ne remarque pas que la voiture garée non loin derrière nous démarre en même temps que nous. Ce ne serait pas vraiment inquiétant si la même voiture n'avait pas déjà fait la même chose lorsqu'on a quitté l'agence. Tu pourras faire un feu quand on rentre...? Je ferais couler un bain moussant pendant ce temps... Les sushis vont pas refroidir de toute façon.

Nina est gelée, je m'en doute, elle est frileuse et sans collant, elle va dire qu'elle va mourir de froid ! Je la laisse se coller à moi, ça me gêne moins dans ce restaurant où les propriétaires sont asiatiques, étrangers. Et puis Nina a ce don de grignoter mes barrières peu à peu, et je suis déjà moins regardant aujourd'hui qu'il y a un ou deux mois.

J’aperçois la voiture qui démarre et sur l'instant quelque chose me chiffonne sans que je sache dire quoi. Je reporte mon regard sur la route en répondant à Nina avec un sourire. "Bien sur mon ange, je vais faire un feu d'enfer, tu n'auras pas froid, je te promets." Je la réchaufferais de mes bras et de mes baisers. J'accélère un peu, pressé de rentrer. "De toute façon, j'ai pas faim maintenant, j'ai mangé cet aprem au QG. Le congelo est encore rempli des restes de la fête nationale." - Janvier, on enchaîne grave les fêtes, le nouvel an classique, puis la Noël, le Nouvel An serbe, et enfin la fête nationale de la RS. Cette période signifie, beaucoup de boulot, beaucoup de fête, beaucoup d'alcool.

Je me gare devant notre immeuble avant de me tourner vers Nina pour quémander un baiser d'un regard rieur et grave tout à la fois. "Voilà madame, nous sommes arrivés à destination."

​Il me promet d'allumer la cheminée pour moi, et il n'a jamais réellement besoin de le dire parce que c'est presque un automatisme, il s'assure toujours qu'il fasse suffisamment chaud pour moi partout où l'on va... Mais j'aime l'entendre faire ces promesses-là, déclarer presque solennellement qu'il prendra soin de moi, toujours. Dieu que ça peut me manquer quand il n'est pas là, comme j'ai toujours l'impression de mourir de froid loin de ses bras, peu importe la température de la pièce d'ailleurs ! Mh ça ne fait rien, moi non plus j'ai pas faim maintenant, on n'est pas pressés... Je bosse pas demain, je me suis arrangée pour finir aujourd'hui, tu devais pas bosser non plus... C'est toujours d'actualité ? Il n'y a aucun reproche caché dans ma voix, seulement son emploi du temps est susceptible de changer rapidement à la base il devait avoir sa journée et moi aussi, mais je ne serais pas surprise qu'on lui ait collé une mission de dernière minute.

On ne met pas beaucoup de temps à arriver à l'appartement et je suis déjà détachée quand il se tourne vers moi, prête à réclamer ses baisers parce que c'est comme si on était déjà chez nous, n'est-ce pas ? Je me tourne vers lui, esquisse un sourire tendre en tendant le cou pour nouer mes lèvres aux siennes. C'est en reculant légèrement que je les vois, trois types (pour l'instant en tout cas ils ne sont que trois) fringués tout en noir, arme au poing comme si on n'était pas en pleine rue, à peine dissimulée contre leurs jambes.

Appelez ça l'instinct de survie, ou l'habitide d'avoir la poisse mais je sens qu'ils sont là pour nous. Pour être honnête, je pense surtout qu'ils sont là pour Slavenko mais ça revient au même. Je blêmis, déglutis. Redémarre. Je lance d'un ton sec, affolée pourtant. ​

Il suffit que Nina m'ordonne de bouger pour que je réagisse d'instinct, la compréhension est au delà des mots, sans doute étais-je déjà inconsciemment sur mes gardes parce que je remets le moteur en route en une seconde, défais le frein à main et enfonce l'accélérateur. Ils ont le regard sur nous et je gueule à Nina "Baisse-toi !".

Peut-être que si j'avais été seul, j'aurais tenté ma chance sur place, au risque d'y rester; mais Nina est là et je ne la mettrais jamais en danger de cette façon irréfléchie. Toutes les missions qu'on a fait ensemble étaient préparées. Je me souviens trop de ce moment terrible où elle a été blessée par les russes au Stan's. J'aurais préféré mourir que la voir ainsi blessée. A chaque fois que j'embrasse la cicatrice fine et pâle sur sa peau, j'y songe.

Des balles fusent, dans le rétro je vois les hommes bondir vers leur voiture et nous prendre en chasse. "On va essayer de rejoindre le QG. Reste baissée. Mon flingue est dans la boite à gant. Prend-le." Passer par un axe principal me semble risqué, s'il y a d'autres voitures, je les aurais placées sur le chemin du Pussynight, pour nous barrer la route. Je ne les distance pas, mais il ne me rattrape pas non plus. La circulation est assez fluide pour que je puisse griller sans trop de risques les feux et les stops qui se mettent en travers de mon chemin.

Je suis habituée à l'adrénaline et à la prise de risques, on ne peut pas dire que je sois une enfant de chœur. Pour autant, les dangers auxquels je suis confrontée n'ont rien à voir avec ceux dans lesquels Slavenko baigne constamment, disons que je crains plus de me retrouver en taule que de me prendre une balle en pleine tête ! Concrètement, je parviens à prendre sur moi suffisamment pour capter très vite que la situation est dangereuse et que je dois passer en mode pro, mais ça n'empêche pas qu'intérieurement je suis en train de me liquéfier de trouille. Je gère toujours bien sous pression, en revanche quand ça retombe et que ça m'explose en pleine tronche, ça fait mal.

Instinctivement, je passe surtout en mode petit soldat obéissant, parce que Slavenko a l'habitude de ce genre de situations, moi pas. Je mets mon cerveau, et mon ego, en mode OFF, et je me baisse quand il m'ordonne de le faire. Je sursaute malgré moi quand les balles sifflent près de la caisse et tente d'ouvrir la boîte à gants tout en restant baissée pour récupérer son arme. Y en a un autre ? Je ne sors plus armée depuis bien longtemps, et le flingue que Slavenko m'avait offert m'a été confisquée par Rauera à l'époque du Bronx, quand il craignait trop que je me tire une balle. Disons que sans Slavenko et habitant Brooklyn, j'avais moins besoin d'être armée !

Si on ne parvient malheureusement pas à les semer, on parvient à traverser le quartier sans se faire buter. Ils se barreront forcément si on atteint le QG. Il faudrait être dingue pour affronter les Tigrovi sur leur territoire à trois contre quoi... Mille ? D'ailleurs, dès qu'on arrive à quelques rues du Pussynight, l'autre caisse bifurque brusquement, signe qu'ils connaissent parfaitement le quartier.

"Non, j'ai que celui-là". En dehors des missions, je suis beaucoup moins armé que dans le Bronx. Parce que je n'en ai pas besoin. Mon Beretta me suffit généralement et surtout mon écusson des Tigrovi. Il arrive qu'on se bastonne mais ça se fait beaucoup à mains nues, à l'arme blanche, rarement au gun. Mais il y a des exceptions à tout ! De toute façon, je me vois mal conduire et tirer en même temps, c'est un coup à perdre ses balles inutilement.

"je sais..." Le QG c'est la sécurité, c'est une évidence. On y est presque et je vois la voiture bifurquer, s'esquiver. J'en suis soulagé, je ralentis sensiblement pour éviter de perdre le contrôle de la voiture. Il y a une route qui est à ma gauche, j'ai priorité. Je vois à la dernière seconde la camionnette débouler à toute vitesse. Elle percute la golf avec violence, je lâche le volant sous le choc, les air bag se déclenchent, je n'y vois plus rien. J'essaye d'agripper à nouveau le volant mais le véhicule est de toute façon hors de contrôle. On échoue contre des voitures garées dans la rue. Le choc est à nouveau violent, je vois trente-six chandelles "Nina, Ninaaaaa !" Je sais déjà qu'ils vont venir, ouvrir la portière et je ne veux pas qu'ils s'en prennent à Nina peu importe qui ils sont. Du sang poisseux me coule dans l’œil, sans doute l'arcade sourcilière ou le cuir chevelu qui a morflé, ça saigne toujours à mort, les bruits sont sourds comme étouffés. J'essaye d'enlever ma ceinture de sécurité pour m'extraire de là, les éloigner de Nina à tout prix.

​Du temps où on vivait dans le Bronx, j'aurais eu le raisonnement complètement inverse, je n'aurais pas voulu les attirer à l'Entrepôt de crainte de mettre le Klan en danger par une attaque surprise. Mais ici, l'aura des Tigrovi baigne sur l'intégralité de la ville et tout le monde sait pertinemment où se trouve leur secteur de prédilection. De la même manière que tout le monde sait, normalement, qu'il vaut mieux éviter de s'en prendre à un Drazavic. ​C'est exactement ce que je me dis et la raison pour laquelle je suis naïvement soulagée lorsque je vois la voiture tourner, je songe que si l'histoire n'est pas terminée au moins nous sommes saufs pour cette fois-ci.

C'était sans compter sur la ténacité de nos poursuiveurs. Le choc me surprend et me coupe le souffle, je n'ai pas remis ma ceinture tout à l'heure et j'aurais fini dans le pare-brise si les airbags ne s'étaient pas déployés. Je n'ai pas le temps d'être soulagée que la bagnole s'en mange d'autres et je heurte violemment la vitre côté passager dans un bruit sourd qui ne présage rien de bon. La voix de Slavenko m'apparaît déjà comme dangereusement lointaine et je porte une main à ma tempe en clignant des yeux pour découvrir le sang qui macule mes doigts. Mes oreilles bourdonnent douloureusement et je suis déjà bien moins alerte lorsque la portière s'ouvre de mon côté. De surprise, je manque de me fracasser hors de la caisse quand le type qui me chope par le bras m'achève d'un coup sur le crâne.

Le flingue est là, à portée de main, je le saisis quand la portière de Nina s'ouvre. De mon coté la portière s'ouvre aussi mais c'est sur l'homme que je vois frapper Nina que je tire. En plein dans le buffet, il s'effondre. Je sens une présence sur ma gauche et je sais que je n'arriverais pas à me débarrasser des autres, ils sont encore au moins deux, ceux de la voiture, plus au moins un conducteur dans la camionnette. Je rampe vers la place déserte de Nina, donne un coup de pieds pour me défaire des mains qui tentent de me saisir les pieds. Je me bats assez longtemps pour saisir mon téléphone et déclencher la touche d'appel rapide. Je laisse tomber le téléphone dans ma caisse alors que le canon froid d'une arme se pose sur ma tempe. Je m'immobilise, je suis quasiment à plat ventre sur les siège. Au sol devant moi, Nina est inconsciente.

Une voix prononce en croate Ils sont croates, leur accent ne trompe pas. "bute-le, il a tué Javic, bute-le !". Je ne me prends pas une balle mais un coup de crosse sur le crâne et je n'entends pas le reste de la conversation.

​C'est la douleur qui me réveille. Une douleur lancinante qui pulse dans mes tempes, dans mon crâne, et une autre, en second plan, au niveau de mon ventre. Un goût désagréablement âcre me brûle la langue, douloureuse également, je crois que je me suis mordue lorsque la camionnette nous a heurtés. Je cille en songeant à la camionnette, le fil des événements peinant à reprendre forme dans mon esprit. Je cligne des yeux, et c'est en tentant de porter une main à mon front que je réalise qu'elles sont immobilisées, nouées dans mon dos. Une vague de panique me saisit mais je tente de la faire taire tant que je ne sais pas où je suis. Je ne suis pas morte, j'imagine que c'est déjà un point positif, non ?

Allongée sur le flanc, sur ce qui semble être un lit de camp, j'ouvre les yeux sur une pièce plongée dans une demie-pénombre qui me permet de distinguer au moins ce qui se trouve en face de moi. En l'occurrence, un autre lit, sur lequel je reconnais immédiatement Slavenko, allongé dans la même position que moi. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. Slavo ? Slavo... La crainte qu'il ne se réveille pas me tord le bide mais s'il était mort, ils n'auraient pas pris la peine de l'attacher. Je constate que mes chevilles sont attachées également en voyant la corde qui enserre les siennes et je ne prends pas encore le risque de m'extraire de la couche.

C'est la voix de Nina qui me fait reprendre conscience. Un geste brusque pour me relever m'apprend que un, c'est une mauvaise idée parce que ça pulse violemment dans ma tête, et deux je suis ficelé comme un cochon ! Je grogne de douleur et tente de me redresser pour regarder Nina. "ça va ?" Je suis soulagé de la voir et qu'elle me parle mais elle n'est guère en meilleure posture que moi. Je ne m'inquiète pas trop. Je veux dire, on est en vie et s'ils ne nous ont pas déjà tués, c'est qu'ils attendent quelque chose de nous, informations ou rançon. Alors ça nous fait gagner du temps.

Je m'assieds lourdement en faisant basculer mes jambes sur le coté, je me plie en deux avant de me redresser. Je regarde autour de moi la pièce mais il fait assez sombre. Je me rapproche du mur pour voir si je peux frotter mes liens dessus, les éroder. Ce faisant, je souffle d'une voix rauque à Nina "écoute-moi, si on t'interroge, tu dis rien. si on parle, on est mort. ça va aller ?" Il y a des chances qu'ils nous fassent mariner jusqu'à ce qu'on pisse dessus. L'humiliation est en générale une des premières étapes pour faire craquer quelqu'un. Avec la douleur. J'ai surtout peur qu'ils s'en prennent à Nina pour me faire craquer, savent-ils qui elle est ?

​Il sursaute et j'ai un hoquet de soulagement tant j'ai eu peur de ne pas parvenir à le tirer du sommeil. Dans la pénombre je ne parviens pas réellement à voir s'il est blessé, mais j'essaie de ne pas me focaliser là-dessus... Dans ma position, je ne pourrais de toute façon rien faire pour lui venir en aide. ​​Je ne crois pas utile de répondre quand il me demande si ça va, on est plus ou moins dans le même ​état et l'important à retenir pour l'instant c'est qu'on est tous les deux conscients et encore capables de parler, non ? Il se redresse mais je n'ose pas encore faire de même, pour tout dire la tête me tourne vraiment trop et je ne suis pas certaine de pouvoir le faire sans me sentir réellement mal.

Je secoue la tête, promets d'une voix éraillée : Je dirais rien... D'une part parce que de toute façon, je ne sais finalement pas grand chose de ce que les Tigrovi font à Sarajevo... Ensuite parce que je si ce n'est pas eux qui me tuent après que j'ai parlé, les Tigrovi le feront sans doute si je les ai balancés. Je tire machinalement sur mes liens dans un geste ridicule qui viserait à me détacher. Tu sais qui ils sont... Ils t'ont dit quelque chose ? Je ne l'ai pas vu se faire assommer, j'étais déjà dans les vapes moi-même et je ne sais pas combien de temps s'est écoulé entre l'accident et maintenant. Il n'a cela dit pas vraiment le temps de me répondre parce que la porte s'ouvre sur deux types, ceux-là même qui conduisaient la bagnole, et ils se dirigent directement vers Slavenko. Mon rythme cardiaque s'affole et cette fois je me redresse, maladroitement, le regard écarquillé de trouille. Ils lui causent en croate, autant dire que je ne comprends pas un mot, et le chopent par les épaules.

Je sais que j'ai l'air dur, peut-être trop détaché ou militaire comme elle dirait. La peur pour elle me tenaille mais je ne peux pas me laisser aller à montrer mon inquiétude, rien ne serait plus dangereux et contre-productif. Montrer que je l'aime, que je me soucie d'elle, c'est la mettre encore plus en danger. Je souffle en réponse à sa question quand la porte s'ouvre "croates.

Je n'ai pas réussi à défaire mes liens, on n'est pas dans un putain de film, et deux hommes s'approchent de moi. Je crois reconnaître celui qui m'a asséné un coup de crosse et un rictus déforme mon visage tandis qu'ils me mettent debout. Je suis en équilibre, les pieds entravés, ne tombant pas que parce qu'ils me tiennent. "allez viens, on a des questions à te poser." "va te faire foutre." "Ah mais moi non, mais ta copine là, je la foutrais bien ouai." Je dois faire appel à toutes mes ressources pour ne pas lui sauter à la gorge, jouer le jeu de celui qui s'en fout. S'ils savent que Nina est la seule chose qui compte, ils l'utiliseront. Je grogne "si tu veux passer après un serbe, croate, vous êtes bien des vautours, à s'contenter des restes. Alors qu'est-ce qui se passe? Hein ? On n'a pas apprécié la fête nationale ? On devrait p'tre appeler Čović ?" un violent  coup dans la face me fait taire puis un autre et je m'affaisse. On me traîne dehors. Au moins grâce à mes provocations, j'ai évité qu'ils s'intéressent à Nina de trop près. Il suffit de tenir jusqu'à l'arrivée des Tigrovi. C'est mon frère que j'ai appelé. J'ai toute confiance en lui. Il faut juste tenir.

​Comme nous sommes encore seuls tous les deux, je ne prends pas son détachement comme une technique pour me protéger, je me demande au contraire si j'ai dit ou fait quelque chose qui nous a mis dans la merde... C'est déjà arrivé par le passé, après tout. A moins qu'il ne se braque d'avance parce qu'il ne me fait pas confiance pour me taire ? En est-on arrivés au point où il craint plus pour la sauvegarde des Tigrovi que pour la mienne ? Oh, non, attendez, ça a toujours été le cas.

Je ne pense pas comme lui à donner le change, faire semblant qu'il ne compte pas, ça se lit bien trop dans mon regard angoissé quand ils entrent et foncent droit sur lui. Je ne crie pas cela dit, ne l'appelle pas, ne tente pas de me faire remarquer pour détourner leur attention parce que ce serait stupide et que malgré toute mon inquiétude, j'ai encore un semblant de jugeote. Je tremble quand ils le cognent, mords ma lèvre au sang quand il s'affaisse, mais je ne peux que regarder, impuissante, tandis qu'ils le traînent hors de la pièce. Je me retrouve seule dans l'obscurité, la seule fenêtre étant obstruée par des planches clouées au mur, à l'extérieur.

​Je tente moi aussi de défaire mes liens, sans grand succès, pourtant je dois rester plus d'une heure seule dans cette pièce à frotter la corde contre le mur, jusqu'à ce que mes avant-bras et mes mains soient en sang. Des coups de feu me font sursauter, suivis de cris dont la teneur m'échappe, et il s'écoule encore de longues minutes avant qu'ils ne se rapprochent de moi. Je me plaque brusquement contre le mur lorsque la porte s'ouvre de nouveau. Le regard de Camenko s'éclaire lorsqu'il se pose sur moi, en miroir du mien quand je le reconnais, mais s'assombrit de nouveau quand il constate le lit vide en face du mien. ​​​Où est-ce qu'il est ? Je secoue la tête. Ils... Ils l'ont emmené tout à l'heure... Vous l'avez pas trouvé ?​