Un peu de sauce soja avec vos sushis ? - Slavina

19/03 22h26

Je rentre tard ce soir, mais Nina le savait, et on s'est arrangé. Je devais simplement ramener à manger qu'on puisse au moins partager le repas du soir. J'ai repris du service, assez molo pour commencer, ça fait à peine un mois que je me suis fait tirer dessus et je suis loin d'être au top de ma forme. D'autant que la baston prématurée avant le voyage n'a pas arrangé les choses, même si j'ai minimisé l'impact auprès de Nina. J'aurais mieux fait de me tenir tranquille. Je crois qu'il m'est assez dur de constater que la convalescence à 40 balais est plus longue qu'à 20 ! Bref, je m'occupe de la surveillance du QG, des putes, je fais l’inventaire, parfois j'ai le droit de sortir pour aller faire quelques rappels de paiements pour protection quand je deviens tellement insupportable que Damir lui même me fout dehors, ha ha. Le reste du temps, je suis sagement à la maison, ou j'essaye de faire doucement un peu de sport, ce qui consiste pour l'instant à marcher, puis trotter trois cent mètres avant de cracher mes poumons, pas très reluisant.

Le coté positif, c'est que nous avons signé pour la maison, et qu'on a rendez-vous à la banque ma semaine prochaine. J'ai aussi commencé à chercher pour le mariage, et ça me tient occupé. Bon, ok, je subis les moqueries de mes camarades quand il me surprennent à surfer sur des sites genre...mariageparfait.com, mais je réglerais mes comptes quand j'irais mieux.

Je pousse la porte du pied en jonglant avec mes paquets qui proviennent du seul vrai restaurant japonais de la ville, et qui fait aussi les meilleurs sushis. J'en ai pris blindé, parce que Nina adore ça et que j'ai faim. Nina a repris un peu de poids, bonne mine et durant Bali, on a pu lui faire diminuer la kétamine jusqu'à l'arrêt. Je suis fou de joie et je me comporte toujours comme une mère-poule avec elle, surveillant son appétit et son humeur avec ce drôle de soin méticuleux, presque excessif. Je suis un peu étouffant sans doute, pas assez occupé par le travail.

"Srce ! Je suis rentré et j'ai les sushis ! Je pose ça dans le salon. Ça a été ta journée ?" Je pose mes paquets encombrants sur la table basse et je pars en quête de ma fiancée - que j'aime ce mot - pour le baiser qu'il me démange d'avoir ! Elle m'a furieusement manqué toute la journée.

La tête penchée vers l'avant, une serviette enroulée autour de la poitrine, je secoue mes cheveux mouillés pour les essorer et éviter qu'ils ne me dégoulinent trop sur les épaules. La journée a été bien trop longue pour que je trouve l'énergie d'utiliser un sèche-cheveux. Ce qu'il y a de bien maintenant qu'ils sont plus courts -bien qu'ils aient déjà commencé à repousser- c'est qu'ils sèchent aussi plus rapidement. Lorsque je relève la tête, les cheveux en bataille, je croise mon regard dans le miroir de la salle de bain et fronce les sourcils de contrariété. Jelenko est parti depuis presque deux heures maintenant, mais je ne sais toujours pas quoi penser de notre étrange conversation, et de sa proposition pour le moins surprenante. Ca m'a travaillé tout le reste de la soirée après son départ, à tel point que j'ai eu du mal à me concentrer sur le boulot que j'étais censée faire.

Je suis d'ailleurs encore en train de ruminer lorsque la voix de Slavenko retentit dans l'appartement jusqu'alors silencieux. Mon visage s'illumine aussitôt de manière tout à fait perceptible, et les ombres qui assombrissaient mes traits s'envolent, chassées par la lueur de joie pure qui envahit mon regard. Bali était une parenthèse magique, enivrante, mais le sentiment de bonheur qui m'habite depuis que nous y sommes allés ne m'a pas quittée à mon retour. Bien-sûr, la réalité nous a rattrapés, mais on ne s'est plus réellement disputés depuis, et je suis constamment transportée d'une félicité presque surnaturelle quand nous sommes ensemble. Et cette soirée, malgré mon humeur étrange, n'échappe pas à la règle.

Je suis dans la salle de bain ! Il me rejoint presque aussitôt et je tends les bras, me jette à son cou, ma bouche trouvant le chemin de la sienne sans que j'ai besoin de réfléchir. Mes mains plongent naturellement dans ses cheveux, mon corps encore légèrement humide se presse contre le sien et je l'embrasse à perdre le souffle, comme si je ne l'avais pas vu de plusieurs jours. Mon amour... Je souffle, éperdue d'adoration, contre sa bouche.

Ces derniers temps, je suis d'humeur non seulement sereine et gaie, mais moins lunatique, ce qui mérite d'être souligné. Même ma convalescence qui perdure ne parvient pas à entraver la même félicité qui s'est emparée de moi, et de Nina. Nous vivons sur un nuage un peu étrange et hors du temps. Ça a commencé avant Bali, mais le voyage a amplifié le phénomène, ainsi que les décisions prises : celle d'avoir une maison, de se remarier, et peut-être aussi de penser à faire un bébé - même si je dois encore faire mes preuves là-dessus (mais l'idée ne me lâche pas).

Quand je rejoins Nina; elle est nue (ou presque, une serviette n'est qu'un piètre obstacle) dans la salle de bain et réceptionner son corps nu contre le mien m'enflamme aussi surement qu'une étincelle tombant sur de l'amadou. Je gémis contre sa bouche - moj andjeo ! - couinant de cette joie pure qui me parcoure à la retrouver. Elle est pieds nus et toute petite contre moi, je me voute, l'enveloppe de ma carrure, possessif et protecteur. Accroché à sa bouche, je la soulève, la pose sur le meuble de salle de bain en dénouant sa serviette qui échoue par terre. Sa peau d'albâtre est encore rougie de la chaleur de l'eau. Nina est un poisson tropical, elle ne vit que dans une température extrême qui me fascine. Je la marque d'un suçon-morsure dans le cou, ma main soulevant délicatement son visage pour le laisser l'accès à sa gorge comme si j'étais un vampire. Je hume son odeur et ma main libre glisse sur sa peau de soie pâle, douce, désirable. Je suis époustouflé par sa beauté, les sens déjà enivrés par le seul contact de son corps après lequel je suis toujours enragé. Bali a réveillé en moi le désir brut, inextinguible. Durant dix jours, on a été vautré dans l'amour et la luxure et je n'en ai pas encore assez, c'est juste un besoin exponentiel, insatiable.

Mon coeur s'affole, mon souffle se fait plus lourd, et mes mains tremblent de fébrilité contenue lorsque je me retrouve dans ses bras. De sentir son corps contre le mien, j'en ai des palpitations, des vibrations dans le bide, des étincelles dans le regard. J'ai la sensation que même les premiers jours de notre rencontre, ces sentiments n'étaient pas si forts, si constants ! En réalité c'est surtout qu'aujourd'hui ils ne sont plus entravés par toutes ces émotions délétères qui m'ont si souvent blessée. Mes nuits sont agités de cauchemars qui reviennent depuis que j'ai arrêté les pilules, mais ce n'est pas grave parce qu'il est toujours près de moi pour les apaiser, calmer mes angoisses et m'aider à me rendormir contre sa peau. Et malgré ces nuits hachées, je me sens mieux que je ne l'ai jamais été.

Je m'enroule toute entière autour de lui quand il me soulève dans ses bras pour me déposer sur le meuble de salle de bain. Je suis déjà nue, et lui toujours trop habillé. La tête renversée, la gorge offerte, je gémis de désir et de contentement sous ses baisers affamés. Mes mains glissent sous ses fringues, en quête désespérée de sa peau qui m'a douloureusement manqué. J'ai pensé à toi toute la journée... Je murmure en revenant chercher sa bouche pour nouer ma langue à la sienne avec fièvre. Je renonce pour l'instant à l'idée de lui ôter son haut parce que je ne veux pas cesser de l'embrasser, alors je glisse mes mains sur son treillis pour pouvoir l'en défaire. Le désir qui m'anime ne faiblit jamais, je me contente de l'étouffer quand on ne peut pas y laisser libre court, mais il m'explose en pleine poitrine chaque fois qu'on se retrouve.

Je passe mes nuits collées à Nina, le nez dans ses cheveux, contre sa peau, un creux d’épaule ou blotti entre ses seins, sans souci de l'infernale chaleur de nos draps. Et quand les cauchemars l'agitent, je la berce de baisers et de ronronnements d'amour qui finissent par l'apaiser et souvent nous mènent à une de ces délicieuses étreintes nocturnes qui tiennent du rêve éveillé. Et plus les jours passent, plus je suis accro, retrouvant en effet les excès de nos débuts mais sans cette angoisse qu'elle ne m'échappe. Quant aux journées, cantonné à des travaux sans intérêts, je les passe en grande partie à rêvasser et à donner le change au taf. Ma rage s'est comme évaporée dans des volutes roses guimauves.

Je ne cherche pas non plus à me déshabiller, trop occupé à la dévorer patiemment, méthodiquement avec cet entêtement slave qui me caractérise. Je ne parle même pas, réponds seulement par des baisers, des morsures, des grognements intelligibles qui montrent bien que j'ai régressé au stade animal. Il suffit qu'elle me libère de mon carcan de tissu pour que je vienne entre ses cuisses, sans heurts, d'un simple geste possessif, sur de mon droit. Je bloque ses reins d'une main, renverse sa gorge pour venir la lécher, y haletant mon plaisir à chaque coup de boutoir qui m'enfonce en elle avant le reflux. Je ne maitrise rien du tout, c'est mon corps qui parle tout seul, avec le sien, laissant le plaisir grimper avec cette fulgurance explosive qui s'achève dans ce flash blanc, incandescent, mes sens cramés, mon cœur sur le point de se barrer hors de ma poitrine. Ça fait déjà un moment que ma conscience s'est tirée, au moment où la serviette est tombée au sol je crois bien.

J'enlace Nina avec cet élan possessif, la presse contre moi doucement, amoureusement, ébloui d'amour et groggy de plaisir. Je gronde en boucle, tout bas, d'une voix grave, sérieuse et trop amoureuse "volim te, volim te". Je picore encore sa peau de baisers-frissons, peu enclin à me détacher d'elle malgré l'inconfort de la position, le meuble n'étant pas exactement à la bonne hauteur.

On se fond l'un en l'autre, liés par la même attraction naturelle inévitable, mus par un même désir, et quand nous ne faisons plus qu'un, j'ai enfin la sensation d'être entière. Moja duša, il n'imagine pas à quel point ce surnom que je lui donne est empli de sens à mes yeux, à quel point je ne le prononce jamais à la légère. Il est l'autre moitié de mon âme, celle sans laquelle j'ai été bancale, incomplète toute ma vie jusqu'à ce qu'il en fasse partie. Et quand il m'a abandonnée, j'étais comme amputée d'un membre, d'un organe vital puisque j'avais finalement l'impression d'être morte. Entre ses bras je reviens à la vie, et chaque étreinte éloigne un peu plus les spectres de l'année qu'il a passée loin de moi.

Le plaisir enfle dans ce crescendo infernal qui me fait me tendre vers l'arrière, affole mes sens, fait trembler mes membres jusqu'à l'implosion. Ses mots d'amour me font frémir aussi fort que ses baisers et je goûte avec délice à la plénitude qui m'envahit, la même chaque soir, chaque nuit, chaque fois que je m'éveille à ses côtés. J'ai du mal à réaliser que ça ne cesse pas, que ça ne faiblisse jamais, et la bouffée d'amour qui m'oppresse serait terrifiante si je n'étais pas si heureuse. On se bécote encore un moment, nos mains parcourant la peau de l'autre comme pour la réapprendre avant qu'enfin il ne me laisse descendre de mon perchoir.

Nichée entre ses bras, contre son corps massif et brûlant, je susurre dans un sourire : J'ai entendu parler de sushis, je crois...? Je me hisse sur la pointe des pieds pour frotter mon nez au sien, et on quitte la salle de bain. Je récupère ma nuisette au passage pour me couvrir un peu, même s'il règne une chaleur infernale dans l'appartement, comme toujours.

"Tu as bien entendu srce moje..." Comme elle s'habille, moi j'achève de me déshabiller, ne gardant que mon caleçon. Vivre avec Nina, ça veut dire vivre nu en ce qui me concerne, parce qu'elle aime une température ambiante bien plus élevée que moi. D'ailleurs, je m'attelle à raviver la cheminée tandis qu'elle déballe les paquets avec son air de souris plus curieuse qu'affamée. Une fois que c'est fait, je la rejoins et l'invite silencieusement à venir s'asseoir sur mes genoux. On a repris cette bonne (ou mauvaise pour certains) de manger collés l'un à l'autre quand nous ne sommes qu'à deux. C'est sur que dehors, nous sommes plus discrets qu'à NY - je suis sans nul doute bien plus pudique dans ma ville, mon pays, qu'aux USA. Je sais que ça gêne un peu Nina, mais je ne peux pas faire autrement, c'est viscéral ancré dans mon éducation. Mais à la maison, depuis Bali, on retrouve nos anciennes habitudes de couple fusionnelles et j'ai oublié toutes me réticences à ne pas l'étouffer, à mal faire. Ma peur de mal faire semble s'être envolée et même si je ne fais pas tout bien, pour l'instant, ça n'a pas suscité de drames, mais ça ne fait finalement que deux jours, je ne vais pas crier victoire trop vite.

On s'installe sur le canapé pour pouvoir se vautrer l'un sur l'autre en mangeant, collés comme des aimants, incapables de rester deux minutes sans être en contact, même infime avec l'autre. Sur ses genoux, blottie contre son torse chaud, je viens lui voler un baiser avant de m'intéresser, enfin, à la bouffe qu'il a ramenée. Mon regard s'éclaire parce que c'est bien l'un de mes plats favoris, les sushis, et je suis contente qu'on soit parvenus à trouver en ville quelqu'un qui en fasse, et des bons ! Je sors une petite boîte que je pose sur mes cuisses pour qu'il puisse piocher dedans, j'ai bien conscience que je le gêne un peu dans ses mouvements mais ce n'est pas grave. Merci d'avoir ramené à manger. Il est rentré moins tard que je m'y attendais finalement, en comparaison de certains soirs on est presque chanceux et je savoure le temps que je peux passer avec lui.

C'est lorsque mon cerveau se dépêtre enfin des endorphines, que les relents de plaisir refluent que je réalise que je ne lui ai pas encore parlé d'un truc pourtant hyper important. Ton père est passé me voir tout à l'heure. Je repose mes baguettes, je ne sais pas à quel point cette conversation doit être sérieuse ou non mais ça me rend toujours un peu anxieuse de parler de Jelenko. Il est venu me proposer de bosser pour le Klan, sur une mission de hacking à Banja Luka. Et je dois avoir le regard un peu écarquillé en le disant, parce que je n'arrive toujours pas à croire que ce soit réellement arrivé !

"c'est normal srce..." Je n'ai pas grand chose d'important à faire ces derniers temps, m'occuper de la bouffe c'est la moindre des choses. J'ai toujours ce besoin d'être utile et je ne peux le faire pour le moment que dans ces gestes infimes. Sans m'encombrer de baguettes, je pioche un sushi que je gobe avant de le mâcher méthodiquement. L'annonce de Nina me fige de surprise. Mon père qui passe la voir, ça peut être explosif et je suis aussitôt mal à l'aise, Nina m'a souvent reproché l'attitude de ma famille. Je cille à la suite mais bizarrement ma première réaction, mon premier sentiment, c'est un sentiment de jalousie. Je suis envieux qu'on lui propose une mission quand je suis cantonné à ne rien faire. Bien sur j'ai tout de suite honte de cet élan. "Tu vas travailler pour les Tigrovi ? " J'ai du mal à réaliser, j'aurais pensé que jamais elle ne ferait ça. Elle n'a jamais compris notre combat et je pense qu'à ses yeux, on reste des grosses brutes mal dégrossies avec un combat d'un autre âge. Peut-être que je me trompe, je n'ai jamais vraiment cherché à savoir ce qu'elle pensait parce que je n'ai pas envie de connaitre la réponse. "C'est...c'est à Banja Luka ? Mais quand ? et combien de temps ?"

Forcément il se fige, de surprise, et sa réaction me rassure parce qu'une partie de moi se demandait quand même s'il était au courant. Je suis un peu étonnée que son père ne lui en ait pas parlé avant de me le proposer, et j'admets que je ne sais pas comment me sentir vis-à-vis de ça. J'oscille entre trop de sentiments différents. Je suis à la fois flattée dans mon ego parce que ça peut vouloir dire qu'on n'estime pas que j'ai besoin de la permission de mon mari pour partir... Mais je suis aussi trop méfiante pour ne pas imaginer que c'est une nouvelle façon de nous diviser. Je ne sais pas, je n'ai pas encore répondu. Je voulais t'en parler d'abord et puis... Je sais pas, c'est étrange qu'il me propose ça. Y a deux semaines il voulait que je quitte le pays, c'est limite s'il menaçait pas de m'envoyer en Russie entre quatre planches, et maintenant il voudrait que je bosse pour vous ? Je suis la seule à trouver que c'est terriblement louche ?

Je hausse les épaules, fronce les sourcils parce que j'ai très peu de détails sur la mission en question. Il faudrait que je parte jeudi, je ne sais pas combien de temps ça doit durer exactement, il m'a dit que ce serait l'affaire de deux ou trois jours... Mais j'ai pas vraiment pu en savoir plus sur le job en question. Disons qu'il ne voulait pas prendre le risque de m'expliquer en quoi ça consiste sans avoir mon accord... Et moi je ne veux pas le lui donner sans savoir en quoi ça consiste, vous voyez un peu ?! Je me tourne vers lui, cherche son regard. Je sais pas ce que je devrais faire... qu'est-ce que tu en penses ?

Je hausse un sourcil avant de protester " mon père te ferait pas de mal Nina..." Je veux bien qu'il ait essayé de la persuader de me laisser, pour que je puisse construire un idéal de vie comme il l'envisage mais il ne la tuerait quand même, j'en suis convaincu. Par contre ses motivations me restent floues et mon commandant de père ne me parle jamais de ses stratégies. A sa décharge, disons qu'à mon arrivée ici, il a essayé mais que ça ne m'a jamais intéressé étant donné que je suis un homme d'action, pas de décision. Ça l'a beaucoup déçu. Comme beaucoup de choses à mon sujet sans aucun doute.

Je ne peux donc qu'émettre des suppositions, ce que je fais en appuyant mon menton sur l'épaule de Nina "peut-être que maintenant qu'on va se marier, il veut t'intégrer..." Après tout, c'est lui qui m'a confié la bague de ma grand-mère. "C'est pour une mission de hacking tu dis ? " Je soupire. Trois jours sans Nina, je vais me morfondre mais j'ai la sensation qu'on doit passer ce "test" "Tu seras à la hauteur de toute façon. Et je t'envie... tu devrais accepter." J'aimerais partir en mission, faire quelque chose qui me procure un peu plus d'adrénaline qu'un mec bourré chahutant une pute au Pussynight. Dieu que le terrain me manque. "En plus c'est bien la preuve que mon père te voit pas comme une épouse traditionnelle ! C'est pas ce que tu voulais ?"

Je secoue la tête. Bien-sûr que si. Son père serait parfaitement capable de me faire du mal, de ça je suis absolument convaincue, et c'est de la naïveté de sa part que de croire le contraire. Si demain il estime que je suis réellement un danger pour son fils par exemple, il n'hésitera pas à se débarrasser de moi. La dernière fois, il a insinué que c'était le cas, mais on sait bien tous les deux que c'est seulement parce que ma présence -ou plutôt mon existence même- le dérange, au fond je ne fais pas de mal à Slavenko et il le sait. Si notre relation devenait réellement problématique, s'il quittait les Tigrovi par ma faute par exemple... Honnêtement je ne suis pas sûre qu'il ne me ferait pas de mal.

Je fronce le nez. Il veut pas m'intégrer dans sa famille mais il veut m'intégrer aux Tigrovi ? Excuse-moi mais je trouve ça bizarre. L'idée me traverse que c'est peut-être un piège, je suis extrêmement paranoïaque lorsque ça concerne Jelenko, ou Mirko. Il va me faire kidnapper à Banja Luka, ou disparaître, et il fera croire à son fils que c'était un accident. Je me serre un peu plus contre le slave, les sourcils froncés par la réflexion et la contrariété. Je plisse les yeux, les lèvres dans une moue d'excuse, tendant la main pour effleurer l'angle de sa mâchoire. Tu pourras bientôt retourner sur le terrain, t'en fais pas moja duša, tu t'es déjà bien remis... Il n'est plus vraiment en convalescence, reste à ce qu'il se remette en forme maintenant. Je hausse les épaules, pose un instant ma joue contre son épaule. Si, c'est ce que je voulais... Je vais lui dire que je suis d'accord. Et puis s'il planifie mon assassinat, au moins je serais fixée, haha ! Je soupire, anxieuse malgré tout. J'appréhende un peu... Je sais pas trop comment ça va se passer... Je suis doute que les Tigrovi soient ravis de m'avoir avec eux... Je me sens suffisamment rejetée ici, alors là-bas, sur leur territoire, entourée de Tigrovi H24 et sans Slavenko pour m'épauler... Ouais, ça me fait pas vraiment rêver quoi.

J'esquisse un sourire, Nina est mignonne par moment à ne pas comprendre notre fonctionnement. "Mais les Tigrovi ou la famille, c’est pareil srce !" J'embrasse un coin d'épaule pour la peine tant sa candeur me fait fondre. "En plus il essaye de t'accepter srce, sinon il ne m'aurait pas donné la bague de sa mère. Même ma mère ne l'a jamais portée/" Je n'ai d'ailleurs jamais su pourquoi - enfin je ne m'étais jamais posé la question jusqu'à aujourd'hui. Toujours est-il que pour Jelenko ses fils sont ses soldats, ses Tigrovi, c'est la même chose, et pour moi, il veut faire la même chose avec Nina.

J'écarte le problème de la remise en forme, après tout ce n'est pas le sujet et comme dit Nina, ça viendra. Je retournerais sur le terrain à un moment ou un autre. Je me focalise à nouveau sur sa mission "Je dis pas que c'est pas un test, après tout, tu es américaine et tu ne dois pas vraiment comprendre ce qu'on fait. J'ai bien conscience que ça doit te sembler... idiot ou futile qu'on veuille l'indépendant de la RS mais si tu travailles pour les Tigrovi, ce sera dans ce but...et pour nos affaires courantes aussi..." Je préfère être honnête avec Nina même si je pense personnellement qu'elle doit faire cette mission, que c'est important pour notre avenir. "Si c'est du hacking, peut-être que Cam en sera... Mais je préfère te dire qu'à Banja Luka, tu vas surement croiser mon oncle."

Je suis de très mauvaise foi, je le sais, c'est bien pour ça que je me tais alors que j'ai envie de répondre tout un tas de trucs affreux. Genre que pour ce que j'en sais, sa bague c'est une fausse, il l'a peut-être récupérée sur le cadavre d'une autre nana qu'il aurait buté. Tiens, peut-être une qui tournait autour de Camenko cette fois ! Non mais c'est vrai, il l'a déjà vue sa grand-mère avec cette bague au doigt ? Et puis ça se trouve, il la détestait sa daronne, et c'est pour ça qu'il m'a filé la bague, et pas à sa femme à l'époque. Enfin bref, voyez bien qu'il vaut mieux que je me taise sur ce coup-là, hein...

Évidemment que c'est un test enfin. Alors ça, c'est très clair dans mon esprit depuis le début. Même si c'est un piège pour m'assassiner, c'est aussi une façon de tester mes capacités, et sans doute ma résistance, je suis persuadée que ces trois jours seront une véritable épreuve pour mes nerfs. Je secoue la tête. Je travaillerais pas pour les Tigrovi, Slavenko. Pas de façon permanente en tout cas. Je vais déjà faire cette mission-là et voir comment ça se passe. Mais il est hors de question que je devienne moi-même un membre du Klan. De toute façon je ne suis pas serbe, je suis sûre que c'est contre leur règlement. Je sais, oui... J'ai bien compris que Mirko était là-bas, et ça m'enchante pas des masses. J'ai l'impression d'une épreuve du feu. D'abord on me fait suivre, ensuite on me colle une période d'essai d'un an sur le dos et maintenant on veut me tester.. Je soupire, agacée, et puis piquée aussi parce que je sais que Slavenko n'aurait jamais supporté tant de choses pour moi. Il serait devenu fou bien avant, m'aurait collé un ultimatum, ou bien se serait tiré... Ah ben d'ailleurs c'est ce qu'il a fait. Il m'a collé un ultimatum ET il s'est tiré. Je relève les yeux sur lui et demande très sérieusement, prenant le risque qu'il se vexe et donc se braque : Tu les laisserais me blesser...? Je ne parle pas que de blessures physiques, entendons-nous bien.

"Je me doute bien que le but n'est pas que tu intègres les Tigrovi, enfin pas de cette façon... Tu es déjà bien occupée avec ta boite et j'ai pas envie qu'on ne se voit plus parce que tu seras en mission d'un coté et moi de l'autre. " Cette mission c'est juste pour voir si elle est digne de confiance, quelque chose comme ça, et de me point de vue, ce n'est pas aberrant quand on sait qu'on est un groupe mafieux, paramilitaire, très très borderline avec la légalité !

Je ne percute pas qu'elle ne parle pas de blessures physiques, quelles autres genres de blessures peut-il donc y avoir ? Et je suis donc choqué me qu'elle pose cette question. Choqué et offensé surtout qu'en ce moment, on ne peut pas dire que j'ai un comportement distant ou ambigu à son égard. Autant je peux comprendre qu'à certaine période elle aurait pu le penser, autant en ce moment, je trouve ça vexant "Mais bien sur que non que je les laisserais pas ! Et je t'assure que personne de chez moi te fera du mal !" Ils ont tous pu voir ces deux derniers jours comme j'étais sur un nuage à la perspective du mariage. Alors même s'ils ne l'aimaient pas - sincèrement je doute que ça aille si loin, ils sont juste méfiants, ils ne la connaissent pas et elle est américaine -qui serait assez cruel pour me faire ça ?

Moi je trouve ça aberrant qu'on cherche à tester ma confiance, c'est comme remettre en question ma loyauté envers Slavenko. Or je pense avoir prouvé plus souvent qu'à mon tour que j'étais d'une fidélité et d'un dévouement sans failles envers lui. J'estime avoir déjà fait mes preuves, et en réalité lorsque j'ai accepté de le suivre à Sarajevo, je pensais que ce serait à lui de me prouver que je pouvais lui faire confiance ! Le fait que les rôles soient ainsi inversés, avec le passif qu'on a, me blesse plus que je ne veux bien l'admettre, et ça me paraît toujours dingue qu'il ne le comprenne pas tout seul. Je suis peinée de devoir prouver à sa famille que je mérite ma place à ses côtés, quand ce sont eux -Slavenko inclus- qui m'ont toujours mise de côté, qui m'ont toujours blessée. Et chaque fois que j'y pense, je peux vous assurer que ça perce violemment cette bulle de bonheur qui flotte autour de nous en ce moment. C'est le genre de trucs qui, dans les moments de tension ou de conflits, me donne envie de tout casser pour me barrer sans me retourner. Heureusement donc que nous sommes en bons termes en ce moment.

Il ne réalise pas qu'ils me font déjà du mal. Avec leurs remises en question perpétuelles, avec leurs accusations, leurs menaces, cette drôle de mise à l'épreuve. Tout ça, c'est déjà me faire du mal. Il ne peut pas le comprendre. Ses instincts protecteurs à mon égard s'arrêtent là où commence sa loyauté envers sa famille. C'est d'ailleurs pour ça que je n'ai pas encore dit oui à son envie d'avoir un enfant, tant que je ne serais pas certaine de sa loyauté envers moi, tant que je ne serais pas sûre de passer avant (et pour l'instant je suis sûre de passer après), la réponse sera toujours négative. Les mots n'ont pas de sens, plus aujourd'hui, à présent j'ai besoin de preuves, et pour l'instant je n'en ai pas. Les seules preuves que j'ai, c'est que c'est moi qui m'adapte et fais des sacrifices. J'acquiesce malgré tout, j'ai bien compris que c'était l'épreuve du feu et que je ne pourrais pas m'y soustraire sans en payer le prix. D'accord, j'irais. Je m'écarte de ses bras, et me lève pour aller chercher mon téléphone dans la cuisine. J'envoie un sms rapide à Jelenko -qui m'a donné son numéro, rien que ça je m'y fais pas- pour lui dire que je suis partante.

Elle s'écarte et je ne comprends pas trop pourquoi. Les mots qu'elle dit ne correspondent pas avec son attitude et je la suis du regard avec cette impression que le gouffre qui s'était refermé menace de resurgir. Un instant, je suis désemparé mais elle envoie un sms (à mon père ? Je ne savais même pas qu'elle avait son numéro). J'ai la désagréable impression de lui avoir forcé la main et au final, je ne sais pas trop quoi penser de tout ça.

Inquiet et perturbé plus que je ne veux bien l'admettre - non pas par la mission au final, plutôt par l'attitude et les réserves émises par Nina - je me lève à mon tour pour prendre mes cigarettes, perdues dans la salle de bain. Je reviens dans le salon en allumant ma clope. "Mais c'est quand cette mission?" Je ne crois pas qu'elle ait répondu à cette question, ou je ne me suis pas focalisé sur la réponse. Deux ou trois jours, mon ventre se tord à cette idée. Je n'ai pas l'habitude que ce soit à moi d'attendre, et j'avais déjà eu cette impression quand elle est partie en Italie. Je voudrais pouvoir l'accompagner mais je crois que ça nuirait complètement à notre crédibilité, à elle comme à moi. Je ne crains pas des Tigrovi, mais plutôt de la partie adversaire et j'aurais préféré être là pour protéger Nina. Cependant Jelenko ne m'a pas proposé la mission, alors c'est peut-être plutôt à moi qu'il fait passer un test.

​Je n'ai pas du tout cette sensation du gouffre qui se rouvre, parce que je suis bien décidée à ne surtout pas laisser la distance s'installer entre nous, pas cette fois, pas quand tout va si bien ! ​Je le suis du regard en fronçant les sourcils tandis qu'il s'éloigne pour aller chercher ses clopes, et je tique parce qu'il reste debout en revenant. Alors ok, on pourrait se dire que c'est pour ne pas m'incommoder avec la fumée, mais ces derniers jours ça ne l'a jamais dérangé, on était collés l'un à l'autre tout le temps, quoiqu'il fasse. Je répète la réponse à cette question qu'il m'a déjà posée, éludant la réponse, sans doute trop préoccupé par le reste. Je dois partir jeudi matin... Et oui, c'est un délai assez court mais je crois que c'est courant chez les Tigrovi, n'est-ce pas ?

Je soupire et me lève pour le rejoindre, passant d'autorité mes bras autour de sa taille, le forçant à écarter sa cigarette pour que je puisse me couler contre lui. Je pose mon menton sur son torse, lève le museau vers son visage anxieux. Moi non plus, je n'ai pas envie de te laisser... Mes mains se plaquent dans son dos, remontent lentement contre sa peau dans une caresse à la fois tendre et possessive. Je t'écrirai, c'est promis. Tiens, ce sera l'occasion de lui prouver qu'on peut être en mission ET envoyer un sms à sa femme/son mari pour le rassurer ! J'esquisse un sourire. Tu as raison, c'est l'occasion de montrer ce que je vaux, pas vrai...?

Je ne suis pas surpris du délai court, si les commandants et lieutenants sont prévenus en avance pour préparer la mission, il n'en est pas de même pour les simples exécutants. Je frémis quand Nina vient se blottir contre moi, menaçant de faire fondre le début de carapace que je me forge à l'idée de la laisser ces quelques jours. Je me suis beaucoup trop ramolli et c'est beaucoup trop douloureux de la laisser. Bien sur tout ça étant imposé par ma famille, ça ne me permet pas vraiment de me plaindre ! Soyons lucide ! Mon regard s'adoucit sur elle, toujours nébuleux mais j'ai confiance en Nina et ses compétences. Je n'ai jamais douté de son talent. "Je sais que tu t'en sortiras très bien, tu es talentueuse srce, mais ne prends pas de risque. Si tu peux pas m'écrire c'est pas grave" J'esquisse un sourire même s'il n'est que d'apparence "mais si tu peux, ça me fera plaisir" En vérité, ça me rassurera surtout. Je vais devoir attendre et je n'ai jamais été patient, je fais semblant seulement quand en vérité je ronge mon frein intérieurement.

Ma main libre se cale contre sa joue, la caresse d'un geste rassurant. L'étrange pensée que si elle était enceinte, elle n'aura pas été en mission, me traverse et m'étonne moi-même. J'appuie mon front contre celui de Nina et j'inspire à fond pour éviter de débloquer complètement. Quand je me redresse, je me force à sourire. "T'as rien mangé alors que t'adores les sushis. Allez viens." Je l'invite à retourner dans le canapé et de reprendre le repas - assise sur mes genoux - même si je n'ai plus très faim. Comme je suis capable de faire semblant en ce qui concerne la nourriture, je donne l'exemple en prenant un second sushi.

Je secoue doucement la tête. Je ne prendrais pas de risques... Quant à mes talents... Et bien ça me surprend toujours qu'il semble aussi convaincu de mes capacités quand il ne m'a finalement jamais vraiment vue à l'action, en tout cas pas sur le hacking ! On a fait quelques cambriolages ensemble mais c'est tout, et je doute que Jelenko ait besoin de mes services pour forcer une serrure vous voyez ? Ses doigts sur ma joue me font vibrer d'amour, une vague de tendresse infinie me submergeant et je lui souris en retour. Essaie de t'occuper en mon absence, mon amour... Je sais qu'il commence à en avoir assez d'être cantonné à des missions de surveillance qu'il juge inintéressante, et j'ai peur qu'il finisse par faire une connerie qui le mettrait en danger...

On retourne ensemble sur le canapé où je viens me nicher contre lui, et je reprends la boîte de sushis, décidée à manger moi aussi... Surtout parce que je ne veux pas qu'il s'inquiète pour moi. Je vois bien depuis que j'ai arrêté la kétamine qu'il surveille mon alimentation très scrupuleusement ! Tu crois que tu vas pouvoir retourner sur le terrain bientôt...?

"Oh t'inquiète pas, je suis occupé... Je t'ai trouvé une wedding planner bilingue aujourd'hui, elle va te contacter, et je me suis occupé des papiers pour la banque pour la maison. On a rendez-vous la semaine prochaine pour les signatures du prêt. Je pense même pouvoir caler la signature chez le notaire dans la foulée la même semaine." Bien sur je ne suis pas occupé au point de vue taf et je ronge mon frein. Malheureusement nous ne sommes pas en sous effectif et le Doc est intraitable. Il est pire qu'une mère ! Et je vous jure que j'essaye aussi d'être raisonnable pour Nina. Le savon qu'elle m'a passé à Bali a porté ses fruits, je ne suis pas retourné aux arènes bien que l'envie m'en démange.

Je reprends quand je suis assuré que Nina mange. "Je sais pas... ça dépendra du Doc. Je me suis remis au sport, c'est déjà pas mal même si j'crache mes poumons. Trop de clopes et pas assez d'entrainement. Peut-être que si vous êtes nombreux à aller à Banja Luka, on sera en sous-effectif ici et je serais employé en renfort. Pour l'instant c'est plutôt calme, y a pas que moi à m'emmerder..." Je soupire parce que moi je suis vraiment cantonné au QG et hormis des parties de cartes avec Sonja (en tout bien tout honneur !!) ou de la muscu avec Cvetko, je m'ennuie ferme. "Y a un meeting vendredi soir, je vais demander à faire partie de l'équipe de garde du corps ... on verra si ça passe. Et pour ton boulot comment ça va aller ? T'as besoin d'un coup de main ?"

Comme à chaque fois qu'il parle du mariage, mon regard s'éclaire et un sourire émerveillé fleurit sur mon visage. Je suis surexcitée à l'idée qu'on se marie à nouveau, et rien que pour cette opportunité je ne regrette pas d'avoir demandé le divorce ! Bon je dirais jamais ça à Slavenko, il me prendrait pour une folle. Et ben ma parole t'as pas chômé ! J'aimerais qu'on la rencontre ensemble la wedding planneuse tu sais, au moins la première fois... C'est important à mes yeux qu'on fasse ça ensemble, mais j'ai aussi besoin de lui pour qu'il explique ce qu'il attend d'un mariage orthodoxe, parce que je serais bien incapable de le faire à sa place. Et pour la maison, tu crois qu'on pourra emménager quand du coup ? Tu veux emménager avant de faire les travaux, ou après ? Comme on ne va pas non plus tout péter, on peut très bien faire les travaux tout en vivant dans la maison, c'est chiant quelques temps mais loin d'être impossible.

Je dodeline de la tête. Je sais que ça t'enchante pas et tu fais bien ce que tu veux, mais tu devrais peut-être arrêter de fumer.. Ou au moins réduire. Moi je fume de façon très aléatoire, à certaines périodes je peux fumer un paquet par jour, d'autre je ne vais pas toucher une clope pensant une semaine entière. Ça dépend beaucoup de mon humeur et comme j'ai toujours eu les cachets, ça diminuait mon envie de nicotine. Quand je rentre on se remet sérieusement au sport tous les deux, hum ? Si je savais qu'il passe ses journées avec Sonja, j'aurais déjà buté la pute, je peux vous l'assurer. J'ai des élans de haine très violents envers cette femme. Dimitri n'est pas là, il va devoir rester à NY quelques temps alors je sais pas... Si c'est juste trois jours ça devrait aller...

"Bah tu prendras rendez-vous quand elle t'appelera. Même si je bosse au pire, vous passez au QG et on se prend une heure." Je suis persuadé d'être encore cantonné au Pussynight la semaine prochaine ! "Je prefèrerais qu'on ai fait le plus gros des travaux avant d'emménager, surtout si tu veux refaire la cuisine et la salle de bain. Pour le reste, les chambres ou la terrasse, on peut être dans la maison, c'est pas un souci. On devrait pouvoir emménager début mai... qu'est-ce que t'en penses ?"

Je grogne vaguement à la judicieuse remarque de Nina "Je sais ..." Mais pour l'instant l'ennui fait que je passe mon temps à fumer. Ça occupe deux minutes par clopes, c'est pas mal. Je repousse à "après". Mon visage s'éclaire d'une lueur malicieuse "du sport ? seulement tous les deux, ha ha..." Nina va atrocement me manquer durant ces trois jours, son corps doux contre le mien me le rappelle. Comment est-ce que je vais m'en priver si longtemps ?

Je crois que je serais surpris de la haine de Nina envers Sonja. Sonja est une pute du Pussynight et je suis cantonné au QG, par la force des choses... Quand elle ne bosse pas, elle passe du temps en bas, chez les Tigrovi. Bizarrement quand je suis là, les autres rechignent à la toucher pourtant, je m'en fous royalement, je ne l'ai jamais considérée comme ma propriété, ni comme ma régulière ou quoique ce soit. C'est une pute hein... elle est à qui paye ou la prend par définition.

"Si tu veux que je passe jeter un coup d’œil à une soirée ou autre chose pour tes filles, je peux. Donne leur mon numéro au cas où y a un problème" Je ne veux pas foutre le business de Nina en l'air en l'envoyant bosser pour les Tigrovi ! Après avoir encore manger deux sushis, j'en reste là pour me libérer les mains tout à fait, ma clope finie. Je les pose sur le ventre de Nina et colle mon visage contre son dos, près de son épaule, humant son odeur. Je peine à me dire que dans trente-six heures, je vais la laisser aller loin de moi.

Ça me va, moi aussi je préférerais avoir fait les travaux avant d'emménager. L'inverse ne m'aurait pas dérangée mais si j'ai le choix, j'aime autant emménager dans une maison qui ne soit pas en chantier, ce sera plus agréable. Pour le coup elle n'est pas meublée du tout alors il va falloir qu'on fasse quelques investissements. Mais Slavenko étant blessé, c'est assez compliqué pour lui de ramener de l'argent. La mission tombe bien finalement, ça nous fera un peu d'argent en plus. Quand tu te sentiras mieux, on préparera un cambriolage tous les deux, tu veux ? On en parle depuis un moment, et chaque fois quelque chose nous en a empêchés. Pourtant il serait vraiment temps qu'on gagne du fric, et pas qu'un peu vu nos projets en cours, notamment son mariage princier qui va sans doute nous coûter une blinde. Pour une fois que ce n'est pas à cause de moi qu'on doit faire un truc de luxe ! Je soupire malgré tout. Début mai ça me paraît tellement loin... J'ai hâte.

Sa réflexion sur le sport me fait sourire et je secoue la tête d'un air faussement désespéré. On fera tous les sports que tu veux, mon amour... Mais aussi du sport à la salle ! Et si tu t'entraînes bien, t'auras une récompense, ça te va ? Je crois que c'est un bon compromis, non ? On sait bien tous les deux qu'on est de toute façon incapables de rester tranquilles. Moi non plus, je n'ai aucune envie de m'en aller et d'être trois jours loin de sa peau. Comme on a retrouvé une grande complicité et que je ne veux plus lui cacher mes sentiments, je finis par souffler d'un air désolé : Tu vas me manquer... J'appréhende beaucoup le fait de devoir dormir seule aussi, ce n'est qu'en sa présence que mes cauchemars s'éloignent et là-bas je sais que je ne me sentirais pas à l'aise. Je sens que ça va être une épreuve désagréable et douloureuse, même si nécessaire sans doute. C'est gentil mon ange, je leur donnerais ton numéro. Tu voudras bien passer, au moins vendredi dans la journée ? Juste une heure histoire de voir si tout se passe bien...

Je souris dans mes moustaches, fais mine de capituler sur ce point sans importance puisqu'on est déjà d'accord "oui, aussi à la salle moj andjeo, et j'essaierais de moins fumer... j'aurais double récompense non ? " Pour la seconde assertion, je m'avance un peu, il n'y a qu'avec elle que je fume moins parce qu'elle m'occupe à d'autres choses. Je proteste avec un ronchonnement enfantin "Mais je me sens mieux ! Quand tu rentres, on peut s'y mettre." Je suis d'accord avec elle concernant l'argent, mais je pense à la maison. Une partie du mariage sera forcément financée par ma famille, je ne m'interroge même pas là dessus, c'est traditionnel. Par contre la partie qui l'aurait été par la famille de Nina le sera forcément par nous.

Je hoche la tête silencieusement sans répondre. Elle va me manquer aussi mais le dire à haute voix c'est donner de la consistance à la douleur. Je n'aime pas ça. "Oui, je passerais vendredi après midi avant le meeting, y a des chances que l'une ou l'autre y aille d'ailleurs. " Celle dont j'oublie le nom mais qui est toujours fourrée par l'un ou l'autre Tigrovi, si j'peux dire... Mes mains enserrent la taille de Nina, reviennent en arabesque lentes sur son ventre et glissent, aériennes vers ses seins que j'empaume par dessus la nuisette avant de les relâcher et continuer ma promenade sur son corps. Mon nez appuyé contre sa peau me shoote de l'odeur de Nina, sucrée et apaisante. J'aime entendre les battements de son cœur et sentir les frissons de sa peau. Je bécote la peau près d'une bretelle de satin. Un léger bisou rejoint par un autre, puis un autre, si légers qu'ils semblent s'envoler. Je fais tomber les bretelles sur les cotés pour faire glisser la nuisette et dévoiler sa merveilleuse poitrine. De ma posture, j'ai une vue imprenable. Un pouce vient aguicher une jolie pointe rosée puis je reproduis le geste en symétrie, silencieux et attentif, à l'affut comme un prédateur. C'est mon moyen pour chasser la peine, la peur du manque aussi. Avec un entêtement d'enfant qui se fiche du principe de réalité, je pense juste que je veux qu'elle reste dans mes bras pour toujours.